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Bonjour à tous,
Voici mes notes. J’ai respecté l’ordre chronologique des prises de parole pour rendre compte de la manière dont progresse le débat, comment les arguments se font écho et comment ils se répondent.
Bonne lecture B)Premier tour de parole : interrogation des participants
– Notre jugement est-il neutre au départ ?
– Pourquoi ne peut-on pas aborder l’esprit critique en classe ?Deuxième tour de parole : définitions de l’esprit critique
– Il faut distinguer l’esprit critique (qui consiste à interroger) et le fait de critiquer. Ce débat n’est pas autour de la liberté d’expression. L’esprit critique relève d’une éducation.
– C’est la capacité à réinterroger toutes les choses à chaque fois.
– Avoir de l’esprit critique c’est l’examen des idées et des choses dans l’intention d’aller « pour » et non d’aller « contre » l’idée ou la chose.
– Avoir de l’esprit critique ce n’est pas être dans l’hypercritique.
– L’esprit critique c’est le fait de ne pas absorber une idée sans se poser des questions. Nous sommes formatés et on nous demande en même temps d’avoir un esprit vierge afin de remettre en question ce que l’on nous apprend.
– Est-ce que développer son esprit critique s’approche plus d’essayer d’avoir différents points de vue ou bien est-ce que c’est le fait de chercher une objectivité / des vérités (dans le dernier cas, cela revient à un débat stérile).
– Une des conditions qui permet d’avoir un esprit critique est d’avoir un minimum d’expertise dans le sujet en question.
– Une des conditions qui permet d’avoir un esprit critique est de posséder une grille de lecture, d’avoir des principes.– Pourquoi naturellement certaines personnes ont un esprit critique et d’autres non ?
– L’esprit critique semble faire partie de l’esprit humain. Nous pourrions nous demander à quelles conditions on exerce ou on n’exerce pas son esprit critique. Pour avoir un esprit critique, faut-il comprendre l’autre ? / faut-il pouvoir prendre en compte l’autre ?
– L’expérience de Milgram de la soumission à l’autorité peut éclairer le débat sur les conditions d’exercice de l’esprit critique.
– L’exercice de son esprit critique suppose que le sujet mette en forme un raisonnement qui est soutenu par un ensemble, un monde, une logique, un système entier.
– Avoir un esprit critique c’est se mettre à la place d’une autre personne. Il faut « être choqué » par ce qu’elle dit ou ce qu’elle fait. Les limites de ce qui nous choque ne doivent pas être définies par la loi / le droit car ce sont des limites que chacun doit apprendre à mettre.
– Il faut savoir d’où on se place pour exercer son esprit critique. Par exemple, si je me place du côté d’une culture λ, je dois avoir conscience du point de vue duquel je me place pour penser la situation.
– L’exercice de son esprit critique peut se trouver diminué ou limité s’il n’est pas possible de remettre en cause toutes choses faisant attrait à l’examen critique. Le sacré ou la sacralisation rend-t-il « intouchable » l’idée, le fait ou la personne qui fait l’objet d’un examen critique ?
– Le point de départ de l’exercice de son esprit critique est l’écoute. Être dans une position de neutralité permet de prendre en compte ce que l’on entend.
– Une des raisons pour lesquels on n’exerce pas toujours un esprit critique c’est que l’on a besoin de sécurité et donc de certitudes.
– Pour faire l’exercice de son esprit critique il faut avoir des armes : il faut pouvoir opposer un raisonnement construit au raisonnement qui se présente comme donné. « J’accepte que quelqu’un ne soit pas d’accord avec moi. Mais je n’accepte pas qu’elle ne soit pas d’accord avec elle-même. » (C’est de qui ???)
– Parce que l’esprit critique n’est pas « utile » ni « efficace » au sens de productif, il faut du temps. C’est un processus lent qui ne peut se faire que dans la paix et le confort.
– Nous avons tous des points aveugles c’est à dire des idées prérequises qui sont articulées par une logique admise se pensant comme fondée. C’est à partir de ces points que l’on juge que ce sont les autres qui manquent d’esprit critique. La religion n’est pas le seul domaine où il est difficile d’articuler les concepts avec un examen critique de la situation. Le contexte sanitaire actuel en est la preuve. Il faut savoir poser des catégories et repenser constamment l’architecture dans lesquelles elles se comprennent.
– L’autocorrection se définit comme le moment à partir duquel nous remettons en cause nos propres théories. C’est à partir de là que l’on commence à penser. Dans le contexte de l’enseignement, nous ne faisons pas preuve d’esprit critique si chaque question de l’élève est tout de suite résolue ou comblée par une réponse fermée et définitive. C’est en nourrissant et en supportant le questionnement des élèves que l’on développe leur esprit critique.
– « On mesure l’intelligence d’un individu à la quantité d’incertitude qu’il est capable de supporter.» Emmanuel Kant
– L’autorité est une valeur structurante.
➡ Pour résumer, il semble que les conditions données ci-dessus pour mettre en œuvre son esprit critique peuvent être regroupées en 6 groupes :
Le temps
La sécurité et la liberté d’expression
Un socle de connaissance, une intelligence du propos
L’autonomie de penser (face au sacré, à l’autorité, …)
L’empathie, l’écoute, la prise en compte de l’autre
La neutralité, l’autocorrection contre le formatage➡ L’esprit critique peut-il être mise en œuvre si une des 6 conditions n’est pas respectée ?
10 novembre 2020 à 21h25 en réponse à : Confinés, saison 2.1. Zoom philo : Qu’est-ce qu’une vie accomplie ? (à partir d’une interview de François Galichet), lundi 02.11.2020 + zoom filmé. #5959Bonjour à tous,
J’ai fait un compte-rendu à partir de mes notes.
Il existe trois manières de voir la vie :
– Une vision biologique qui nous pousse à perpétuer notre espèce. L’individu persévère dans son être (cf Spinoza)
– Le désir de reconnaissance
– Une approche esthétique de la vie. Elle est une œuvre dont nous sommes les auteurs et les seuls lecteurs. Elle a une valeur pour elle-même.Ce débat part du constat qu’en France, la pandémie du Covid a poussé la capacité hospitalière de prise en charge en réanimation, à son extrême limite. Dans un contexte où 70% des morts du Covid ont plus de 80 ans, on peut dire que ce sont eux, les principaux demandeurs de place en réanimation. Ils semblent donc monopoliser un service qui est disponible pour toutes les tranches d’âge en temps normal.
Par opposition, la vie des jeunes semble aujourd’hui sacrifiée. Les mesures du gouvernement visant à protéger les plus âgés et à éviter le risque d’engorgement des hôpitaux, ont un impacte sur la vie des jeunes (récession économique, restriction des activités sociales et sportives, chômage). Le risque encouru est d’ordre éthique. En cas d’engorgement, les médecins seraient dans l’obligation de choisir les patients qui peuvent bénéficier d’une place et du service de réanimation. On ne peut pas accepter dans une démocratie, d’imposer cette charge aux médecins, ni de passer par la loi pour poser des critères de choix de vie ou de mort.
Ainsi ce qui est demandé aux personnes âgées, est de laisser leur place à d’autres personnes qui ont besoin d’un lit. Ce faisant, elles font un sacrifice c’est-à-dire qu’elles offrent leur vie pour sauver celle de quelqu’un d’autre. C’est aussi une question d’honneur car il s’agit de s’effacer devant autrui, selon la pensée de Lévinas qui place la responsabilité de l’autre comme une éthique (Après-vous). Cela semble faire partie des gestes éthiques et vertueux dont il est difficile d’évaluer la portée. Il existe trois types de personnes admirables : les héros, les sages et les saints.Interventions :
– Nous parlons du sacrifice des jeunes comme s’il s’agissait de quelque chose d’essentiel. Pourtant, on les prive de sortir boire un verre ou on fait obstacle à leur recherche d’emploi. Mais cela est-il comparable au sacrifice d’une vie. Peut-on appeler cela un sacrifice ?– « La génération sacrifiée » est un terme utilisé dans le domaine du développement durable pour désigner les nouvelles générations qui héritent d’une planète, la Terre, dont les ressources sont limitées et polluées, d’un système bancal qui n’est plus viable à long terme et qui menace la survie de l’espèce humaine. Ce terme, sortie de son contexte initiale, ne cristalliserait-il pas l’opposition des générations ?
– Le problème n’est-il pas dans le fait que le budget de la santé a été sacrifié ? (perspective économique et politique de la question)
– Nous possédons tous un instinct de survie. Alors, pourquoi moi – qui suis sénior – je devrais mourir pour tel autre individu ? En quoi mérite-t-il plus la vie que moi ? En quoi sera-t-il plus utile à la société que moi ?
– Reprendre l’expression : « Les femmes et les enfants d’abord » (pour expliquer le sacrifice demandé aux personnes âgées), signifie-t-il que l’on assiste au naufrage de l’hôpital et du service public ?
– Peut-on parler d’un échec du dialogue intergénérationnel ?
– Quel est le sens de la valeur donnée à une vie dans la mesure où nous sommes liés les uns aux autres. Ainsi, si je donne un sens à ma vie, je ne sais pas quelle importance j’ai pour autrui. C’est à la société de se réapproprier la mort afin de permettre à penser la mort sur un plan collectif / et non plus de manière autocentrée.
Bonne soirée !
13 septembre 2020 à 23h44 en réponse à : « Ce n’est pas parce que les choses sont difficiles que nous n’osons pas… » Sénèque, une citation proposée par Laurence pour lundi 14.09.2020 #5925Voici un extrait de la lettre n°104 d’où est tirée la citation :
« Ce couple affreux à voir, la souffrance et la mort, ne l’est nullement pour qui ose l’envisager d’un œil fixe et percer de trompeuses ténèbres. Mainte fois les terreurs de la nuit se changent au matin en objets de risée. Ce couple affreux à voir, la souffrance et la mort, dit si bien Virgile, et non point affreux en réalité, mais seulement à voir ; il entend que c’est pure vision, que ce n’est rien. Qu’y a-t-il là, répétons-le, d’aussi formidable que ce qu’en publie la renommée ? Qu’y a-t-il, je te prie, Lucilius, pour qu’un homme de cœur craigne la souffrance, un mortel la mort ?
Je ne vois que gens qui réputent impossible ce qu’ils n’ont pu faire; et puis nos doctrines sont trop hautes, disent-ils, elles passent les forces de l’homme, Ah ! combien j’ai d’eux meilleures opinions qu’eux-mêmes ! Eux aussi peuvent, mais ils ne veulent pas. L’essai qu’on leur demande a-t-il jamais trahi ceux qui l’ont tenté ? N’a-t-il pas toujours paru plus facile à l’exécution ? Ce n’est point parce qu’il est difficile que nous n’osons pas ; c’est parce que nous n’osons pas, qu’il est difficile. D’ailleurs, s’il vous faut un exemple, prenez Socrate, vieillard éprouvé par tous les malheurs, poussé sur tous les écueils, et que n’ont vaincu ni la pauvreté, aggravée encore par ses charges domestiques, ni les fatigues des camps qu’il dut subir aussi, ni les tracasseries de famille dont il fut harcelé, soit par une femme aux mœurs intraitables, à la parole hargneuse, soit par d’indociles enfants qui ressemblaient plus à leur mère qu’à leur père. Quelle vie passée presque toute ou à la guerre, ou sous la tyrannie, ou sous une liberté plus cruelle que la guerre et que les tyrans ! Après vingt-sept ans de combats, la fin des hostilités fut l’abandon d’Athènes à la merci de trente tyrans, la plupart ennemis de Socrate. Pour calamité dernière, une condamnation le flétrit des imputations les plus accablantes. On l’accusa d’attenter à la religion et de corrompre les jeunes gens qu’il soulevait, disait-on, contre les dieux, contre leurs parents et la république : puis vinrent les fers et la ciguë. Tout cela, bien loin de troubler son âme, ne troubla même pas son visage. Il mérita jusqu’à la fin l’éloge admirable, l’éloge unique que jamais nul ne le vit plus gai ni plus triste que de coutume : il fut toujours égal dans ces grandes inégalités du sort.
Veux-tu un second exemple ? Prends M. Caton, ce héros plus moderne, que la Fortune poursuivit d’une haine encore plus vive et plus opiniâtre. Traversé par elle dans tous les actes de sa vie, et jusque dans celui de sa mort, il prouva néanmoins qu’un grand cœur peut vivre et mourir en dépit d’elle. Son existence se passa toute soit dans les guerres civiles, soit à une époque déjà grosse de guerres civiles ; et l’on peut dire de lui, comme de Socrate, qu’il vécut dans une patrie esclave, à moins qu’on ne prenne Pompée, César et Crassus, pour les hommes de la liberté. Personne ne vit changer Caton, quand la république changeait sans cesse : toujours le même dans toute situation, préteur ou repoussé de la préture, accusé ou chef de province, au forum, aux armées, à l’heure du trépas. Enfin, au milieu de toute cette république en détresse, quand d’un côté marchait César appuyé des dix plus braves légions, de tant d’étrangers ses auxiliaires, et quand de l’autre était Pompée, Caton seul suffit contre tous. Quand ceux-là penchaient pour César, ceux-ci pour Pompée, Caton lui seul forma un parti à la liberté. Embrasse dans tes souvenirs le tableau de ces temps, tu verras d’une part le petit peuple et tout ce vulgaire enthousiaste des choses nouvelles ; de l’autre, l’élite des Romains, l’ordre des chevaliers, tout ce qu’il y avait dans l’État de vénéré, de distingué ; et, délaissés au milieu de tous, la république et Caton. Ah ! sans doute, tu considéreras avec admiration
Agamemnon, Priam, et terrible à tous deux Achille…; car il les improuve tous deux, il les veut désarmer tous deux. Voici comme il juge au sujet de l’un et de l’autre : « Si César triomphe, je me condamne à mourir ; si c’est Pompée, je m’exile. » Qu’avait-il à craindre celui qui, défait ou vainqueur, s’infligeait les peines qu’on n’attend que du plus implacable ennemi ? Il mourut donc, selon son propre arrêt. Vois si l’homme peut supporter les travaux : il conduisit à pied son armée à travers les solitudes de l’Afrique ; s’il est possible d’endurer la soif : Caton, sur des collines arides, dépourvu de bagages, traînant après lui les débris de ses légions vaincues, souffrit la disette d’eau sans quitter sa cuirasse, et chaque fois que s’offrait l’occasion de boire, il but toujours le dernier. Vois si l’on peut mépriser et les honneurs et les affronts : le jour même où on lui refuse la préture, il joue à la paume sur la place des comices. Vois si l’on peut ne pas trembler devant des puissances supérieures : il provoque à la fois César et Pompée, quand nul n’osait offenser l’un que pour gagner les bonnes grâces de l’autre. Vois si la mort peut se dédaigner aussi bien que l’exil : Caton s’imposa l’exil ou la mort, et pour prélude la guerre. Nous pouvons donc contre pareil sort avoir même courage : il ne faut que vouloir soustraire sa tête au joug. Or avant tout répudions les voluptés : elles énervent, elles efféminent, elles exigent trop de choses, et toutes ces choses, c’est à la Fortune qu’il les faut mendier. Ensuite méprisons les richesses, ce salaire de tant d’esclavages. Renonçons à l’or, à l’argent, à tout cet éclat qui pèse sur les heureux du siècle : sans sacrifice point de liberté ; et qui tient la liberté pour beaucoup doit tenir pour bien peu tout le reste. »A demain :side:
Salut à tous !
Pour préparer la discussion de demain, je propose une reformulation de la question.
A défaut de changer le monde, la pensée positive peut-elle changer les individus ?Chaque individu essaye de changer le monde, car le monde semble aller mal. Il pense avoir des réponses ou des solutions à apporter pour que le monde tourne mieux, mais quand il met son idée en oeuvre, rien ne change, voir, cela ne fait qu’empirer les choses.
Devant cet obstacle, l’individus guidé par son intelligence se recroqueville et se rabaisse.
La pensée positive semblerait être une méthode pour redonner à l’individus confiance en lui. Autrement dit, une pensée positive, par la formulation de l’intention et la visualisation du succès de son action, permettrait à l’individus de ne pas « laisser tomber » et d’aller de l’avant, c’est-à-dire de dépasser les obstacles qu’il rencontre. Dit autrement, l’homme se laisse arrêter par un obstacle mais il se laisse aussi entrainé par ses idées.
A ce stade, j’ai du mal à penser ceci : la méthode de la pensée positive semble permettre aux individus de dépasser les blocages qu’il rencontre en ne se laissant pas décourager. Cependant, la pensée stoïcienne n’apprend-t-elle pas au contraire à se détacher de ce qui ne dépend pas de soi au lieu de persévérer dans une logique binaire ?22 juillet 2019 à 4h40 en réponse à : Un Eloge de la Fragilité. Présenté par Wedad pour lundi 15.07.2019 #5795Bonjour,
Je me suis prêté à un petit exercice : traiter ce sujet « Ce qui est fragile en soi a-t-il quelque chose à nous apprendre ? » en 20 minutes. Voici mes idées sur le sujet, ce qui m’est venu en tête. bonne lecture !
Introduction :
PIERRE CORNEILLE (Rouen 1606-Paris 1684) Polyeucte, IV, 2, Polyeucte
« Allez, honneurs, plaisirs, qui me livrez la guerre :
Toute votre félicité
Sujette à l’instabilité
En moins de rien tombe par terre ;
Et comme elle a l’éclat du verre,
Elle en a la fragilité. »
La fragilité se définit comme étant le caractère de ce qui se casse facilement. Tout objet fragile doit être manipulé avec précaution et douceur sinon il se brise. C’est un objet dont le matériau n’accepte qu’une très faible déformation et rompt au moindre effort. A l’inverse les impératifs sociaux ou économiques comme la force mentale ou la productivité sont souvent mis en avant afin d’expliquer a posteriori un succès ou de justifier un échec. Mais dans quel but ? A quelle fin ? Être meilleur ou être « le » meilleur ? Progresser ou accéder « au progrès » ?
Tout d’abord, en quoi parfois la fragilité s’identifie à tort à une faiblesse ? L’expression « Au royaume des aveugles, les borgnes sont rois », souligne le caractère relatif de la fragilité. Dès lors, cette faiblesse apparait comme une force.
Cette première question nous amène à réfléchir sur la manière dont on se représente les capacités humaines. L’homme est-il intrinsèquement faible ? Autrement dit, en quoi la fragilité en chacun de nous nous rend plus humain ?
Notre capacité à revenir sur des événements passés et à réfléchir sur nous-même est source d’effort car il semble que souvent, nous cherchons davantage à masquer notre fragilité aux autres. Que suppose l’acte de révéler notre fragilité ? Dans la mesure où ce « quiconque » pourrait en tirer profit, n’y a-t-il pas de condition pour faire preuve de fragilité ?I] La fragilité humaine est-elle une caractéristique « en soi » ?
A) La fragilité (nom féminin) est un caractère que l’on prête à quelque chose ou à quelqu’un de fragile. C’est un attribut intrinsèque qui définit complètement la chose que l’on désigne. Ainsi, même s’il existe des verres plus ou moins résistants, le verre casse par définition.
Lorsque l’on dit qu’une personne est fragile, on suppose que de caractère ou suite à un événement, elle a acquis une fragilité permanente. Cela en fait quelqu’un de vulnérable en soit ou dans une situation donnée puisque toute agression extérieure tendra à avoir un impact toujours négatif sur elle. Cela explique que souvent, la fragilité est signe de faiblesse.B) La fragilité définit souvent un trait de caractère ou l’état mental d’une personne qui a subit un traumatisme. Cependant, si le sujet fragile n’est pas mort, c’est que précisément, le mal qu’il a subi n’est pas atteint son point de rupture physique (qui provoque la mort) ou mentale (qui provoque des séquelles irréversibles). « Ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort ». C’est ainsi que de nombreux malades partagent leur expérience de survie afin de montrer que tout obstacle que l’on croit insurmontable, remis dans son contexte, est dépassable.
Ainsi, en psychanalyse, le patient prend du recule et se libère progressivement de son blocage en remettant dans son contexte l’événement traumatique mal vécu. Il peut se reconstruire et poursuivre sa vie. Jean Paul Sartre dans Les Mots, raconte comment la prise de conscience de sa laideur physique a constitué un événement traumatique qui a agit sur son caractère comme un processus d’initiation. Tout d’abord, l’apprentissage de sa laideur marque la fin du monde imaginaire dans lequel le cantonnait son cercle familial. Dans sa vie d’adulte, il a eu un certain nombre de conquêtes amoureuses qui montrent que cette laideur n’en a pas fait un être repoussant. Ainsi, pour autant qu’une belle personne semble être favorisée, en société par rapport à une personne laide, ces notions de laideur et de beauté sont relatives et ne peuvent décider du destin d’un individus.
S’il l’on dit souvent « Ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort », c’est qu’il y a beaucoup à apprendre de ses fragilités. Elles nous apprennent à sortir d’un conditionnement qui tendrait à réduire l’individus à sa fragilité. Au contraire, elles permettent aux individus de se construire.
Cf Psychanalyste : pour (se) prouver qu’ils ne sont pas morts suite à un échec, certains dépressifs, se mettent plus ou moins consciemment dans la position de malade.II) L’invulnérabilité est signe de mort
A) Que nous révèle notre tendance à vouloir être invulnérable ? L’attrait pour l’idéale perfection. Qui cherche-t-on à égaler ? Que cherche-t-on à fuir ?
L’imagination est une des causes qui nous poussent à nous penser grand alors que nous sommes tout petits. Cf Blaise Pascal : La disproportion de l’homme, § Les deux infinis, Pensées.
L’homme pense tout connaître de lui. Freud postule au contraire, qu’une part inconsciente en nous nous fait agir malgré nous. Être moins vulnérable passe nécessairement pas la prise de conscience d’une partie de notre inconscient.
C’est à force d’échecs, à force de se confronter à des épreuves que tout homme apprend à faire face à une difficulté. Ce qu’il apprend : puiser dans ses ressources propres et parfois insoupçonnées. Autrement dit, la capacité d’apprentissage est une condition indispensable pour tout être vivant. Théorie de l’évolution.
B) Se croire invulnérable est alors beaucoup plus dangereux que de reconnaitre sa fragilité.
La société est sensée pourvoir aux besoins de chacun et sortir les hommes du régime de la simple survie. C’est là ce que l’on appel souvent « le progrès ». C’est en exerçant tous les jours sa capacité d’adaptation à l’environnement et au changement, que les hommes cohabitent entre eux et avec l’environnement tout entier.
Ainsi, rester fermé à une fragilité et ne pas la reconnaitre peut donner lieu à de plus grand dégâts.
Cf la destruction de l’environnement est une question récente à l’échelle humaine. Reconnaitre notre responsabilité dans la dégradation de notre milieu naturel nous permet de mieux comprendre en quoi nous sommes en constante et en complète interaction avec elle. Notre dépendance aux ressources naturelles nous oblige à tenir compte de la fragilité des écosystèmes sont les équilibres ont été perturbés par l’activité humaine.
Notre proximité avec les machines et appareils électroniques / virtuels du quotidien tend à nous renvoyer dans un monde de performance. Le labeur ne connait plus de limite de temps, l’homme ne vit plus au rythme naturel (du levé au coucher du soleil, en fonction des saisons).
Cf Marx, l’aliénation.
Reconnaitre sa fragilité c’est lui donner existence, réalité. C’est l’occasion de recommencer un cycle et de se réinventer. Cf l’art de la réparation des céramiques japonaises (Kintsugi). Au contraire, se croire invulnérable, vivre dans l’illusion d’un monde virtuel (cf toutes les dépendances et les maladies liées à l’explosion des écrans), c’est s’enfermer dans un blocage et prendre le risque de scléroser sa capacité d’apprentissage et d’adaptationIII) Prendre conscience qu’il est possible de vivre en adéquation avec soi-même et son environnement. Qu’est ce qui nous sauve de l’attachement à la peur de la mort ou de la souffrance ?
A) Que nous apporte la communauté ? Qu’est ce qui se joue dans le fait de révéler sa fragilité ?
La psychanalyse, vertus du retour sur soi.
Statut des autres : de l’ennemis à l’allier. De la lutte à la coopération. L’homme est un loup pour l’homme : qu’est ce qui me prouve que lorsque j’aurai reconnu ma faiblesse, l’autre ne s’en servira pas contre moi ? Le défit de faire confiance.
L’amour. Dans une vie de couple, accepter les fragilités de l’autre passe par l’acceptation de ses propres fragilités.
Voltaire et Condorcet : débat sur la tolérence et la liberté.B) La conscience de l’universel, remède contre toutes les fragilités ?
Finalement, nous ne recherchons pas à être plus fort (nécessaire uniquement en cas de survie), mais à être plus libre. Ainsi, tout ce qui peut m’éloigner de la souffrance et mieux accepter la mort me permet de mieux vivre. La peur est ce qui nous paralyse. Proverbe italien : « Celui qui a peur de mourir meurt chaque jour, celui qui n’a pas peur de mourir ne meure qu’une fois. »
La religion, vertus du dépassement de soi. La fraternité, la compassion, l’empathie. Lz croyance dans l’au-delà.
La méditation, vertus de l’éveil, « être en dehors de soi et du temps ». Arrêter d’utiliser la force.
Morihei Ueshiba : « Nul ne peut m’enlever ma force puisque je ne m’en sers pas. ».Il n’y a pas de conclusion, juste une invitation à d’autres partages.
29 octobre 2018 à 20h26 en réponse à : Sommes-nous libres de désobéir ? (Avec un texte de Durkeim) Sujet proposé pour lundi 22.10.2018 + Un compte rendu de Laurence. Merci. 😉 #5709Ouverture
Comment les individus peuvent-ils trouver un sens aux règles et une place dans une société anomique (qui n’est plus capable de transmettre les règles sociales) ?
Peut-on penser la liberté dans un régime anarchique ?
Dans quelle mesure peut-on ignorer la loi ?29 octobre 2018 à 20h26 en réponse à : Sommes-nous libres de désobéir ? (Avec un texte de Durkeim) Sujet proposé pour lundi 22.10.2018 + Un compte rendu de Laurence. Merci. 😉 #5708Références et auteurs
• « On use de l’autorité, on abuse de son pouvoir »
• E. de La Boétie : Discours de la servitude volontaire
• Hannah Arendt : Eichmann à Jérusalem : Rapport sur la banalité du mal (1963)
• Jean-Jacques Rousseau, Du Contrat social (1762), Livre I, Chapitre VIII : « De l’état civil ». « On pourrait sur ce qui précède ajouter à l’acquis de l’état civil la liberté morale, qui seule rend l’homme vraiment maître de lui ; car l’impulsion du seul appétit est esclavage, et l’obéissance à la loi qu’on s’est prescrite est liberté. »
• Gandhi : la désobéissance civile = Non-Violent Resistance (Satyagraha) (2001)
• Charles De Gaulle (Citation) « Comment voulez-vous gouverner un pays où il existe 258 variétés de fromage ? »
• Visconti, Le Guépard, d’après le roman de G.T. Lampedusa (1958) « Il faut que tout change puisque rien ne change ».29 octobre 2018 à 20h25 en réponse à : Sommes-nous libres de désobéir ? (Avec un texte de Durkeim) Sujet proposé pour lundi 22.10.2018 + Un compte rendu de Laurence. Merci. 😉 #5707Voici les points de vus échangés lors du débat :
1) Le texte de Durkheim : Les formes élémentaires de la vie religieuse
Ici l’obéissance est provoquée par une émotion. On obéit à une personne suite au sentiment qu’elle provoque en nous et non pas sous le coup d’un discours qui s’adresse à notre raison.2) Définition des notions d’autorité et de pouvoir
Définitions proposées : L’autorité est le pouvoir de commander autrement que par la force ou la persuasion. Elle peut dépasser le cadre de la personne.
Le pouvoir agit par la contrainte.
« On use de son autorité, on abuse de son pouvoir ». Le cadre juridique (ex : droit du travail) est sensé nous prémunir contre les abus de pouvoir. L’autorité est pensée comme un tempérament « naturellement » fort.3) Relations entre autorité et pouvoir
Quelles sont les origines de l’autorité ? Sur quoi s’appuie l’autorité ? Pourquoi je respecte quelqu’un ? Existe-t-il une autorité sans pouvoir et vice versa ?
Exemples :
La relation entre maître et élève
L’obéissance/la désobéissance au sein de l’armée
La relation entre parents et enfants
La relation des jeunes et les traditions / les normes
Les hommes politiques face au peupleCcl 1 L’autorité peut être attachée à une personne : le charisme, le sentiment d’infériorité, la servitude (…) car elles proviennent des représentations que l’on se fait d’une personne.
Ccl 2 Cette autorité est-elle légitime ? On questionne ce qui fonde mon obéissance : j’obéis car je reconnais une capacité à la personne ou un statut social.
Ccl 3 Dans ce cas, pourquoi remettre en cause une autorité que je juge légitime de décider à ma place ? Cela révèle que l’autorité se caractérise comme un pouvoir que je donne à une personne sur moi. C’est l’investir ou s’investir d’un pouvoir et accepter qu’il/elle dicte ma conduite. Cf Rousseau : « (…) l’obéissance à la loi qu’on s’est prescrite est liberté. »4) Les relations entre liberté et obéissance/désobéissance
– Nouveau point de départ : la liberté c’est la loi que je me donne, la contrainte ce sont toutes les autres lois (extérieures).
– Dans ce cas, pourquoi désobéir à une loi si c’est pour en instituer une nouvelle ? Existe-t-il des lois transcendantes et sacrée que je respect sans être libre de les contester ? En démocratie, la loi est acceptée et appliquée sous l’action d’un accord né de l’union entre les hommes / du rassemblement autour de valeurs, d’intérêts ou d’objectifs communs.
Exemples :
– L’attachement des Américains à la Constitution Américaine
– Les relations professionnelles : à la fois nécessaires et remises en cause dès qu’elles deviennent injustes
– Le nazisme : une autorité sacralisée par la masse vs Hannah Arendt : Le Procès Eichmann
– Tuer le père : la rébellion de l’enfant face aux règles érigées par ses parentsCcl 1 L’obéissance et la désobéissance sont des relations qui évoluent au cours du temps. Elles actent un changement entre deux périodes. On fait et défait des lois ou des responsables (politiques ou moraux). C’est le signe que rien n’est immuable.
Ccl 2 Ces actes de désobéissance semblent être « nécessaires » car ils permettent au système d’évoluer, au collectif de prendre du recul et rester critique, à l’individus de penser le changement.5) Vers une nouvelle définition de l’autorité
Autorité = ordre mis en place, capacité d’organisation.
– Nouveau point de départ : L’autorité puise sa force dans la relation/le lien/l’attachement que j’entretiens avec elle. L’ordre est une donnée naturelle : même les animaux s’organisent selon une hiérarchie. Dans ce cas, l’autorité nait de l’argumentation entre deux egos (au minimum). Tout être vivant semble avoir besoin d’une règle / d’une norme / d’un repère pour pouvoir exister et prendre une direction (ex : un oiseau hypnotisé par un stylo / un papillon tournant autour d’une lumière).– On peut conquérir le pouvoir à partir du moment où l’on comprend et l’on maitrise le système, la situation, les représentations qui nous font agir. (ex : le despote qui assoit son autorité sur sa capacité à se faire aimer du peuple). L’accès au pouvoir d’un despote est de la responsabilité du peuple compris comme une masse passive, qui se juge incapable de désobéir. Paradoxalement, Gandhi prône la résistance passive comme principe de désobéissance civile : l’obéissance peut être une notion positive si elle se fonde « sur de bonnes raisons ».
– La désobéissance est problématique quand il faut remettre en question notre rapport à nous-même. Ex : La manipulation, la dépendance psychologique, l’anorexie, la folie. Quand l’individu « perd la raison » il perd la raison qui commande ses actes.
Ccl 1 Le devoir de la société est de rendre les individus autonomes. Notre responsabilité individuelle et collective est : 1) de conserver cet esprit critique sur les lois que nous respectons et sur ceux qui les votent, 2) de proposer un nouvel ordre en remplacement de celui que l’on conteste afin de donner une direction à l’action collective. Il reste problématique d’éduquer la masse : un sujet éclairé (c’est-à-dire usant librement de sa raison dans le sens du bien ou du bon) doit naitre d’un moule unique et identique à tous les membres de la société. Cf De Gaulle souligne la nécessité de gouverner en respectant la pluralité des opinions et des croyances : « Comment voulez-vous gouverner un pays où il existe 258 variétés de fromage ? ».
Ccl 2 Qu’est-ce qu’une loi juste ? Comment concevoir les lois quand les hommes politiques eux-mêmes ne les respectent pas ?
Ccl 3 « Il faut que tout change puisque rien ne change » : la survie d’une société est liée à sa capacité d’évoluer, de se remettre constamment en question. Être libre c’est le rester c’est à dire à toujours obéir ou désobéir et assumer ses choix.
Ccl 4 Pensée stoïcienne : se libérer c’est savoir distinguer ce qui dépend de nous et ce qui ne dépend pas de nous. En opérant cette distinction, l’individus est libre des liens qui le relient à toute autorité et peux serrer ou desserrer la contrainte qu’elle a sur lui. Non sans commander un total repli sur soi, nous sommes invités à l’éveil de la conscience. Individuellement nous devons cultiver notre capacité à vivre pleinement l’instant présent et collectivement à développer notre esprit d’a propos (capacité de prendre les ‘bonnes décisions’ c’est-à-dire celles qui sont prises au moment juste). -
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