Cafephilos › Forums › Les cafés philo › Les sujets du café philo d’Annemasse › Est-on moins courageux en démocratie ? Présenté par Chantal le lundi 30.05.2022 + compte rendu + schéma
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25 mai 2022 à 15h09 #6284Merci à Chantal pour son sujet : Est-on moins courageux en démocratie ?
(Inspirée par Philomag)Est-on moins courageux en démocratie ?
Et des questions préalables et/ou associées :
Qu’est-ce que le courage ?
Qu’est-ce qui nous rend courageux ?
Peut-on s’entraîner à être courageux ?
Si le courage est une vertu, peut-il s’enseigner
Etre courageux, est-ce défendre le bien ou n’importe quelle cause ? (est-il indépendant de la « cause » pour laquelle on le mobilise) ?
Qu’est-ce qui rend courageux ?Définition : Courage ( Wiki)
Le courage (dérivé de cœur) est une vertu qui permet d’entreprendre des choses difficiles en surmontant la peur, et en affrontant le danger, la souffrance, ..
Dérivé du latin cor (« cœur »), le courage désigne la force d’âme, la fermeté et l’endurance du cœur dans les épreuves difficiles, et celle de l’esprit pour défendre des idées hardies.Quelques repères philosophiques du courage
Depuis Platon le courage, ou force d’âme, est considéré comme l’une des quatre vertus cardinales, les trois autres étant la prudence, la tempérance et la justice.Platon développe une conception intellectualiste du courage. Il le définit, au terme de l’ouvrage : « Lachès » (Général Athénien qui dialogue avec Socrate), comme « le savoir qui concerne tous biens comme tous maux, à quelque moment de la durée qu’ils appartiennent ». C’est le courage de savoir. Par ailleurs, le courageux prend un risque en connaissance de cause, sans se laisser paralyser par les peurs irrationnelles qui envahissent la plupart des gens.
Aristote : le courage de la modération
Pour Aristote, le courage est une vertu et, comme toute vertu, il est un « juste milieu », une modération prudente entre les deux excès de « la peur et de la témérité ». Comme il l’écrit dans Éthique à Nicomaque.Pour Jankekevitch, le courage est la vertu inaugurale du commencement
« Le courage n’est pas un savoir mais une décision, non pas une opinion mais un acte : c’est pourquoi la raison n’y suffit pas »
« Pour commencer,il faut commencer, et l’on n’apprend pas à commencer. Pour commencer, il faut simplement du courage »
« le courage est l’intention de l’instant en instance »Des citations :
– Le courage est la première des qualités humaines, car elle garantit toutes les autres. ~ Aristote (Éthique à Nicomaque°-Le courage n’est rien sans la réflexion. ~ Euripide (Fragments)
– Le courage s’apprend, comme l’enfant apprend à parler. ~ Euripide– C’est dans les affaires les plus désespérées que l’on emploie le plus de hardiesse et de courage. ~ René Descartes
– Le courage n’est pas une vertu, mais une qualité commune aux scélérats et aux grands hommes. ~ Voltaire
– Le courage, c’est oser se lever et parler ; mais c’est aussi savoir rester assis et écouter. ~ Winston Churchill
– Le courage est comme un muscle ; il est renforcé par l’utilisation. ~ Ruth Gordon
– Le courage, vertu des temps difficiles. ~ Anonyme
– Comment serait votre vie si vous n’aviez pas le courage de tenter des choses ? ~ Vincent Van Gogh
– Les sentiments produisent le courage actif, et la philosophie le courage passif. ~ Marie-Jean Hérault de Séchelles
– Le courage du faible est d’une autre qualité, souvent meilleure, que celui du fort. ~ Yi King
Le courage est une chose qui s’organise, qui vit et qui meurt, qu’il faut entretenir comme les fusils. ~ André Malraux
Il faut commencer par le commencement, et le commencement de tout est le courage. Il faut dire que le courage est la vertu inaugurale du commencement. Vladimir Jankélévitch
Le courage est contagieux. Il suffit qu’un homme en fasse montre pour que d’autres relèvent la tête. ~ Billy Graham
J’ai appris que le courage n’est pas l’absence de peur, mais la capacité de la vaincre ~Nelson Mandela
La peur est ce qui gronde derriere le courage ; ce qui pousse le courage au-delà du but~ Alain
« Sisyphe, qu’évoquait Camus il y a quarante ans, est plus que jamais une figure d’actualité. Il incarne en effet le courage contemporain, celui dont ont besoin ceux qui réalisent que la tâche ne sera jamais terminée, qu’elle ne fait que changer de niveau. » J-L Servan-Schreiber
Le courage est comme un cerf-volant : c’est le vent contraire qui le fait lever. ~ AnonymeDes ressources.
– La ressource de Philomag, (lien vers doc. word)
– Le courage est une question d’entrainement. Jankélévitch lu par Enthoven en 16mn à l’ENS
– Cynthia Fleury, 16mn pour présenter son ouvrage sur le courage.
– Autre vidéo de Cynthia Fleury en 7mn sur le même thème
– Charles Pepin. De Philomag lors des Entretiens de Valpré 2021.
– Le courage à contre-courant selon Emmanuel Faber, ex PDG du groupe Danone qui change sa perspective.
> Voir ici le discours d’Emmanuel Faber, où il raconte « sa prise de conscience » en 2016.
————————————Pas de compte rendu du dernier débat (du 23.05.2022), mais une réflexion sur ce que doit supporter un café philo, en particulier, celui d’Annemasse. Lien ici.————————————-
Règles de base du groupe
– La parole est donnée dans l’ordre des demandes, avec une priorité à ceux qui s’expriment le moins.
– Chacun peut prendre la parole, nul n’y est tenu.Pour limiter les effets de dispersion dans le débat
– On s’efforce de relier son intervention à la question de départ, de mettre en lien ce que l’on dit avec ce qui a été dit.
– Pour favoriser une circulation de la parole, de sorte à co-construire le débat avec les autres participants, on reste concis.
– On s’attache davantage à expliquer la raison de sa pensée, plutôt qu’à défendre une opinion.
– On s’efforce de faire progresser le débat.
– Concrètement, on évite de multiplier les exemples, de citer de longues expériences, de se lancer dans de longues explications, mais on va au fait de son argumentation.
————————————————–Avec ou sans préparation, chacun est le bienvenu.
Les cafés philo sont par définition, contre toute forme de discrimination et de sélection par la classe sociale, le niveau scolaire, etc.————————-
René Guichardan, café philo d’Annemasse.
> Lien vers les sujets du café philo d’Annemasse, ici.
> Lien vers notre forum anti-covid, anti complotisme ici.
– Lien vers notre forum sur le thème de la guerre Russo-Ukrainienne.
> Vous pouvez nous rejoindre sur notre groupe Signal (cliquer ici)2 juin 2022 à 17h22 #6299Compte rendu de : Est-on moins courageux en démocratie ?Nous étions une quinzaine de personnes. Le débat s’est plutôt bien déroulé, il y a eu peu de « hors sujet », et on a pu observer des questions qui se répondaient, tout en ouvrant sur de nouvelles questions (nouvelles perspectives, dialectiques et approfondissant le sujet) au lieu de l’enfermer dans des rapports d’oppositions stériles.
Après une brève définition du courage (rapport au cœur, à la confiance, à l’audace, au risque, mais pas nécessairement à un juste milieu entre témérité et son contraire, lâcheté – Artistote), il a été rappelé une dialectique, celle de Cynthia Fleury : au courage peut succéder le découragement, une non-disposition structurelle ou ponctuelle. Et ce premier obstacle peut laisser place à une mélancolie, qui est un effondrement, une perte totale de sens où l’être se trouve absorbé par un vide existentiel, une non-énergie.
Ainsi, dans un rapport à soi, le courage peut se présenter comme un volet à trois faces : oser faire face à une adversité (extérieure à soi), mais aussi à soi-même, mais ne pas en avoir les moyens (ressources) et finalement, s’amenuiser dans un effondrement (vide existentiel).
De son côté, Elisabeth a rappelé « le courage est situationnel » (Jankélévitch), il se révèle dans un rapport à des circonstances, à un moment opportun.A partir de là, se posent les questions de ce à quoi le courage répond :
> Que demande-t-il de soi ?
> A quoi répond-il ?
Autrement dit : comment faut-il être disposé pour l’exprimer ? Quel est l’événement qui le convoque, en quoi nous mobilise-t-il ? Comment interprétons-nous, accueillons-nous, comment nous approprions-nous cet événement ? Quel risque nous demande-t-il de prendre ?
Il semble, pour qu’il y ait « courage » qu’il ait fallu une forme de liberté de choix, la possibilité de relever le défi ou pas. C’est un aspect de la question vers lequel notre débat s’est orienté.Mais préalablement, un peu de méthode, revenons à la question de départ : Est-on moins courageux en démocratie ?
L’ambition de la question nous invitait tout d’abord à explorer le sujet à partir de questions préalables (définition du courage, contexte, cas d’exemple), mais aussi à définir le rapport entre le courage en soi, tel qu’il s’éprouve comme individu, de même que tel qu’il semble s’éprouver en tant qu’individu « pris-dans-un-groupe », un corps social, une démocratie. L’idée étant de cheminer par cercle concentrique, augmentant la difficulté d’analyse au fur et à mesure où les questions préalables sont suffisamment clarifiées.
Ainsi, nous ne nous donnons pas comme priorité de répondre d’emblée à la question posée, mais de progresser par étape au fur et à mesure que nous nous approchons de la question initialement posée. Avancer pas à pas, dans un collectif en débat, est important, il s’agit de ne pas perdre son auditoire en route ou de faire en sorte qu’un maximum de participants suivent la progression de la pensée, tout en prenant en compte ce qui s’est dit. (A l’inverse, et si on n’y est pas attentif, on peut assister à une succession de déclarations d’opinions – chacun disant ce qu’il pense sans le mettre en lien avec les raisonnements qui précédent)Revenons au débat.
Du courage collectif au courage en soi.
L’éthique sacrificielle, le goût du risque, l’inconscience, l’excès de confiance, le devoir accompagnent souvent l’idée du courage, notamment l’acte qui le concrétise. Mais quel est la part motivationnelle de ces éléments, pervertissent-ils le sentiment de bravoure, de noblesse associée au courage, lui donnent-ils son sens ?
Par exemple, le sacrifice a-t-il été librement consenti ou est-il le fait d’un chef de guerre peu scrupuleux, celui qui envoie ses soldats au casse-pipe ?
Dans ce cas-là, ces soldats doivent-ils se sacrifier ?
Les soldats ayant préféré la désertion, et le risque d’exécution qui va avec, peuvent très certainement faire montre d’une autre raison donnée au courage : ils auront été plus lucides, plus valeureux, car ils auront pris sur eux d’assumer leur choix contre tous. En revanche, ceux ayant suivi le mouvement n’ont-ils pas été entraînés par un effet groupe ? Se sont-ils laissés embrigader par la propagande du moment ? Étaient-ils mus par une fuite quelconque ou excités à l’idée de combattre ? Est-ce encore du courage ? Difficile de trancher. Admettons pour l’instant que le courage ne se définit pas seulement par la forme et l’aspect public sous lesquels il se présente. Ainsi, l’idée d’un peuple ou d’un chef de guerre courageux, et qui le serait par des choix que des médias mettent en scène, peut être trompeur. Nul ne sait ce qui s’est passé dans le for intérieur de chacun des protagonistes.Un schéma, avant d’aller plus loin.
Entre le courage exprimé par le choix d’un groupe et celui du gendarme qui échange sa place contre celui de la caissière pour qu’elle ne soit pas prise en otage par le terroriste, quelle est la différence ?
Dans le cas du gendarme, le courage est libre, mais il n’est pas conçu comme un sacrifice (selon la famille du témoin), c’est librement qu’il se porte volontaire et, ajoute-t-on, en pleine conscience de ses chances. Mais peut-il s’agir d’un excès de confiance, d’un mauvais calcul du risque ? (Sans rien vouloir nier de l’idée d’un courage conscient, assumé, lucide quant aux risques pris par ce gendarme)Le courage, dans l’intimité de son for intérieur.
Nous ouvrons avec cette question de la confiance et du calcul du risque à un registre plus profond du questionnement. Dans l’intimité du rapport à soi, face à sa propre conscience, que nous disons-nous ? Qu’est-ce qui se dit en soi ? Avons-nous le temps d’en prendre conscience, de le questionner ? Sommes-nous dépassés par la situation qui nous saisit instantanément ? Le courage semble s’imposer de lui-même à la surprise même de son auteur.
L’en-soi (Sartre, la part invisible de soi et à ses propres yeux) dit-il quelque chose de cet acte ? L’en-soi est-il structuré comme un langage (Lacan) ? Est-ce encore la société qui parle à travers l’en-soi (inconscient sociétal, déontologie intériorisée du rôle du sauveur) ? Est-ce la société qui percole en soi ou seulement le sentiment de sa présence sur laquelle nous projetons notre imaginaire ? Qu’est-ce qui percole entre l’individu et le groupe ? Qu’est-ce qui le lie au groupe ? C’est une question qui s’est posée à nous, mais en ouvrant sur un doute.La part d’inconnu à toute situation contient sa part de risque.
L’évaluation de la situation peut ne pas être « parfaite », il y a toujours trop d’inconnus. Ainsi, même conscient de ses risques, le soldat (du feu, le militaire ou autre) assume un risque, dont il ne connait pas l’issu.
L’excès de confiance peut reposer sur une bonne évaluation de ses compétences, et ne serait pas ainsi un « excès », à la différence celui/celle qui cherche se prouver quelque chose (à lui, à autrui, notamment au moment de l’adolescence).
Ceux qui ont pris un risque qui mettait leur vie en danger, témoignent le plus souvent qu’ils ont été saisis d’un élan instantané. Cela allait de soi. La réflexion rétrospective se fait généralement après coup.On se demande (moi, je me le demande), si l’on s’efforce à faire la pesée de tous les pour et les contre, ose-t-on encore prendre un risque, sachant, par ailleurs, qu’aucune situation se révèle à soi dans la totalité de ses risques et de ses potentiels ?
L’idée est émise que, la « confiance en soi » que suppose le courage, est peut-être un pur élan de vie saisi sur le vif de l’instant (et non une confiance soi acquise), il est néanmoins relatif à une noblesse de coeur, à une éthique, voire à une empathie (le sens de l’autre) qui agit sans « conscience de soi » pour précisément sauver une personne (ou plusieurs).
Se pose néanmoins la question, certaines personnes semblent incapables d’empathie, du sens de l’autre, sont-elles alors sans courage ? Si l’on est toujours dans un rapport au calcul, sommes-nous encore capables de courage ?
Le courage, pour qu’il soit possible, laisse supposer une « gratuité », un lâcher-prise, une aptitude au don. Il suppose de laisser parler une « générosité ».
Il est possible que le courage requière une part de « générosité » (un don), un espace en soi disponible, et où ne s’opère aucun calcul. Tandis que l’excès de calcul serait antinomique du courage.————————-
René Guichardan, café philo d’Annemasse.
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