Cafephilos › Forums › Les cafés philo › Les sujets du café philo d’Annemasse › Café philo chez Réginald : La Raison peut-elle atteindre la Vérité ? Présenté par Laura pour lundi 27.09.2021 + un compte rendu et photos
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23 septembre 2021 à 20h13 #6081Merci à Réginald qui accueille nos rencontres « café philo » dans sa villa au :
n°10 impasse Mon-Idée à Thonex (Suisse) à 100 mètres de la frontière Mon-Idée d’Ambilly.La boisson est laissée à 1 euro (café, vin ou ce qui est disponible)
Apéritif dinatoire après le débat. Apportez votre guacamole, votre houmous, votre thon ou votre camembert; contribuez comme bon vous semble. Vous remportez les restes, éventuellement, ils sont mis de côté pour une prochaine fois.
> On prend soin de l’endroit et on le laisse propre et rangé après usage.Accueil dès 18h45 pour se mettre en place. Débat à 19h00
Transport
Depuis Genève : Bus 32, 37 arrêt : Mon IdéeDepuis Annemasse : Tag n°3, arrêt : Edelweiss ou Martinière (douane Mon-Idée)
Google map ici
Si vous venez en voiture, merci de vous parquer dans la rue Mon-Idée (et non dans l’impasse)XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX
Le prochain sujet. Merci à Laura pour sa proposition :
La Raison peut-elle atteindre la Vérité ?« C’est évident !», lorsque nous trouvons la vérité, nous l’accueillons avec un sentiment de certitude, accompagné souvent par l’illusion d’avoir atteint un abri. Mais lorsque nous cherchons la définition de vérité, plusieurs définitions possibles s’ouvrent à notre esprit. A bien y regarder, nous ne sommes pas les seuls à avoir des problèmes avec la vérité : toute être sur Terre semble devoir se conformer à un monde et à d’autres êtres qui lui préexistent…
La raison est-elle une prédisposition strictement humaine ? Une première définition de vérité pourrait être l’adéquation de la pensée à la réalité. Or, pour tout être vivant, vivre nécessite de concilier et harmoniser son propre corps physique et sa propre volonté de vivre aux objets de la réalité matérielle et aux autres volontés. Lorsqu’ un corbeau s’envole depuis une branche d’un arbre pour rejoindre une volée, il profite du mouvement des ailes pour atteindre son objectif et rejoindre son groupe. Si la vérité est la correspondance entre la pensée et la réalité, alors tous les êtres vivants partagent une forme de réflexion. Le système nerveux des animaux et la sensibilité des plantes sont également acteurs de ce processus très ancien d’adaptation de la vie au monde physique. De plus, le mouvement de la vie, celui qu’on observe également dans la poussée des plantes, se réalise selon des processus complexes d’adaptation et de jeu/combat avec les autres volontés pour la survie sur Terre.
Toutefois, chercher la vérité n’est pas aisé et la majorité des gens préfèrent croire dans la certitude qu’autrui lui délivre. Alors, la vérité est saisie par le groupe ou par l’individu ? L’être humain préfère la conformité à la vérité. L’expérience de Asch en 1951 le montre ; dans une expérience réalisée en classe, un groupe d’élève a été préparé à donner la même réponse fausse à une série d’exercices. On a montré à des élèves trois lignes sur une carte, ensuite une quatrième et on lui a demandé laquelle des trois premières avait la même longueur. Les élèves complices ont répondu juste seulement la première fois, puis pendant 12 fois ils ont donné la mauvaise réponse. A l’issue de l’expérience les trois quarts du groupe avaient rejeté la vérité pour se conformer au groupe et s’intégrer.
Qu’est-ce qui rend la définition humaine (classique) de la vérité si spécifique ? Lorsque nous définissons la vérité, les êtres humains tentent de la formuler essentiellement par le biais de notre langage. Toutefois, les animaux également se transmettent des messages et ont des formes de communication dans les espèces et parmi les espèces. Les corbeaux se transmettent les informations sur les dangers à proximité. Les dernières études d’éthologie montrent que certains singes peuvent apprendre le langage des signes pour décrire leurs agissements et leurs sentiments. Les animaux aussi se transmettent des savoirs et des connaissances entre les générations. Mais nous, nous avons construit des théories qui nous permettent de décrire le monde ; ces théories (du grec « theoros », spectateur), ou visions du monde, des sciences ou des religions, sont comme des réseaux qui retiennent des vérités cohérentes. Certaines sont démontrées, comme pour les sciences, d’autres n’en ont pas besoin, comme pour les religions.Problématique et questions :
La vérité est-elle une donnée fixe et immuable ? Dans un monde où tout est sujet au devenir, fixer la vérité dans un jugement pourrait apparaître comme dangereux et amener à une forme de savoir dogmatique et fermé sur soi-même.
– Existe-t-il un fondement certain dans la base de notre connaissance ? Ce fondement pourrait-il être le savoir des mathématiques ? Ou il s’agit plutôt d’un savoir intuitif ?Ressources
– Sur l’effet Asch (vidéo + explication). Site de psychologie sociale
– Une série de conférences sur la vérité (Rencontres de Langres 2011). Choisir sa thématique.
– Points de vues philosophiques sur la vérité. Un article de Catherine Deshays. Gelstalt. Cairn info.
– La vérité. Article Grand public de l’Encyclo-philoPour limiter les effets de dispersion dans le débat :
– On s’efforce de relier son intervention à la question de départ, de mettre en lien ce que l’on dit avec ce qui a été dit.
– Pour favoriser une circulation de la parole, de sorte à co-construire le débat avec les autres participants, on reste concis.
– On s’attache non pas à affirmer son opinion, mais à expliquer la raison de sa pensée. En effet, c’est sur la base des argumentations, que l’on met en lien avec la question/le thème de départ, que l’on tente de faire progresser le débat, c’est-à-dire, d’en clarifier les enjeux.– Concrètement, on évite de multiplier les exemples, de citer de longues expériences, de se lancer dans de longues explications, mais on va au fait de son argumentation.
– Pour les plus avertis, on s’efforce d’identifier, de formuler les thèses, les problématiques sociales, éthiques, philosophiques qui sous-tendent son argumentation.
– La parole est donnée dans l’ordre des demandes, avec une priorité à ceux qui s’expriment le moins.
————————-Ici sont postées des news anti complotistes et critiques de la gestion de l’épidémie par le gouvernement
> Vos avis, contre-argumentations et analyses sont les bienvenues. Merci d’avance28 septembre 2021 à 13h49 #6090Un compte rendu de notre échange : La raison peut-elle atteindre la vérité ?
(Vos suggestions, compléments, réflexions sont les bienvenues pour corriger ou réagir à ce compte rendu. Merci.Le débat était assez technique, à savoir, si on reformule la question : la raison (une faculté de la pensée à élaborer des logiques) peut-elle atteindre la vérité ? Autrement dit, peut-elle « pointer vers », formuler, désigner, saisir ou seulement, percevoir ce qui est « vraie » (authentique, vrai, vraisemblable, objectif) la vérité ou des vérités, voire les vérités ?
> L’idée d’une vérité unique (la vérité) laisse supposer qu’il y en a une qui comprend toutes les autres. Avec l’article « des », la question des vérités se rapporterait seulement à certaines d’entre elles (et pas les autres), tandis que « les vérités », le pluriel général peut laisser supposer que toutes les vérités potentiellement « connaissables » peuvent être atteintes.Nous étions une douzaine de personnes, et le débat ne s’est malgré tout pas enlisé dans d’inextricables noeuds.
Autres questions qui furent posées :
La raison pourrait faillir à atteindre la vérité, mais sans en interdit l’accès. Elle pourrait également ne pas être la seule à accéder à de la vérité et, dans ce cas, se pose la question : quels sont les autres « organes (facultés) qui permettent d’accéder à de la vérité ? A quoi reconnait-on que nous atteignons à la vérité ? Qu’appelle-t-on « vérité » ? Quelles différences entre le pluriel, des vérités et le singulier, la vérité ?La question des définitions.
Raison : à distinguer la faculté d’exercer une aptitude à raisonner (construire des logiques, un rapport entre des choses) et se donner raison (s’auto-légitimer, y compris si l’on a tort) et avoir des raisons (des mobiles, des motivations).Vérité : elle se définit par un rapport de vraisemblance entre ce qui est d’une chose (sa nature, son identité, son ontologie) et ce qui en est dit (l’énoncé sur la chose, sa description, ses caractéristiques, son nom). Se marque ici une première distance entre la chose même et ce qui peut en être dit (la philosophie du langage).
Mais très rapidement, une distinction survient entre ce qui apparait à une personne (de son point de vue) et ce qui apparaît à une autre personne depuis un autre point de vue. Pour s’accorder sur deux points de vue différents, il convient d’objectiver, de décrire ce qui est vu et, pour les témoins en question, de déplacer leur point de vue, pour adopter le point de vue de l’autre et croiser les regards sur la chose décrite. Il semble que cet exercice peut être à la portée du plus grand monde.
Ainsi, dans un premier temps, on peut s’accorder sur le fait que les vérités de chacun sont relatives à des points de vue spécifiques, mais qu’ils peuvent converger vers une chose « unique » et, que cette chose peut être décrite ou pointée du doigt. On s’entend sur le fait que cette chose contient sa propre vérité, qu’elle puisse ou non être décrite dans tous ses aspects.> Le défi maintenant consiste à rendre compte de la vérité de cette chose… Pour un objet simple, il n’y a pas de difficulté insurmontable. Il est aisé de s’entendre sur ce qu’est une table, une chaise, d’en définir les caractéristiques essentielles, d’en dessiner le plan. Nous obtenons alors une représentation de la chose, voire une « idée » représentée de la chose, et qui n’est pas la chose même. Mais la difficulté à définir des objets augmente lorsqu’il s’agit d’objets complexes ou de situations complexes : un virus, est-ce un être vivant, entendu qu’il n’a pas l’autonomie d’une bactérie et qu’il ne peut se diviser ou se répliquer de façon autonome ? Peut-on considérer qu’il y a un réchauffement climatique, alors que les couches supérieures de l’atmosphère se refroidissent ?
Dans ces cas-là, la vérité d’une chose n’est pas propre à la chose même, mais relative à son contexte (le virus par rapport à une définition du vivant, la température du climat par rapport aux conditions de sa mesure). Pour les objets complexes, le vrai de ces choses se prédéfinit par rapport à des critères sur lesquels une communauté (de chercheurs ou un public) s’entend pour, à leur tour, définir une norme. La vérité est, à ce stade, une convention, qui se distingue clairement de la chose même.Une autre difficulté émerge lorsqu’on évoque, non pas la complexité d’une chose (qui est donc relative à une convention), mais les causes, les fonctions, les buts de cette chose. Par exemple, quelle est la cause du virus (d’où vient-il, qu’elle est sa genèse par rapport à la biologie du vivant ?), ses fonctions (mutations) et buts (par rapport à lui, par rapport aux autres espèces) ? De même pour le climat (cause de ses transformations), à quoi réagit-il, comment interagit-il avec la chimie des éléments, avec les activités humaines ? Ici, la divergence entre les « points de vue » se fait grandissante au fur et à mesure où l’on cherche à être de plus en plus précis. On peut néanmoins s’entendre sur des observations « grossières » de certaines fonctions (le virus cherche à se multiplier; le climat réagit à la charge de Co2 rejeté dans l’atmosphère). Autrement dit, avertis des angles de vue adoptés pour convenir de « vérités », on ne prétend pas toute la dire sur des choses complexes et sur leurs interactions.
Une difficulté encore plus grande se manifeste dès que s’expriment des avis sur « ce qu’il faut faire » par rapport à des choses complexes (par rapport à un virus, par rapport au climat). Ceux qui estiment, par exemple, qu’il faut vacciner tout le monde, tandis que d’autres estiment qu’il suffit de parer au plus urgent et seulement de traiter les malades avec les molécules existantes. Idem pour le climat, ceux qui estiment que la technique parviendra à résoudre la question du réchauffement climatique et ceux estiment qu’il faut changer notre mode de vie. A la difficulté de mal connaître les « objets » étudiés s’ajoutent des convictions (des certitudes) qui font offices de « vérité » pour des politiciens, des idéologues, des journalistes.
On peut définir ici un premier ordre de problèmes : des personnes tiennent pour vraies des choses infiniment complexes en elles-mêmes et, comme si cela n’était pas suffisant, elles « savent » également ce qu’il faut faire pour résoudre le problème que ces choses soulèvent lors de nos interactions avec elles.
Une première condition pour échanger sur des questions de vérité (la vérité des choses) consiste à considérer nos « convictions » (nos certitudes) non pas comme des vérités, mais seulement comme des « points de vue ». Il semble que ce soit là, une condition élémentaire, première pour amorcer une réflexion (pour faire philosophie) : suspendre son jugement immédiat sur les choses. Il s’agit de s’autoriser à réexaminer les choses, de s’efforcer à adopter d’autres points de vue, de remettre les choses à plat pour pouvoir les repenser (se distancier à la fois des choses et des pensées que l’on a sur ces choses).L’autre problème soulevé dans l’introduction de Laura porte sur le fait que des non-humains (animaux, plantes) ont leur forme d’accès à de la vérité (ce qui fait « vérité » pour elles). Il s’agirait de vérités qui ne s’expriment pas nécessairement par la raison.
On peut être ouvert à cette idée et pourtant, on peine à se la représenter. Si des plantes ou des animaux ont « leur » vérité, de quoi parle-t-on ? Parlons-nous de ce à quoi ces êtres seraient sensibles, mais pas nous en tant qu’être humain (la capacité des plantes et des animaux à communiquer entre eux par des signes quasi impersceptibles et, néanmoins, à s’avertir de dangers qui les menacent) ? Parle-t-on en fait de leur condition de vie, de leurs « besoins » ? Il y a peut-être un glissement de sens entre ce qui fait « vérité » pour les non-humains et ce qui répond de leurs besoins ?
Toutefois, le parallèle peut être fait avec les humains, lorsqu’ils s’attachent à des « vérités », qui sont en fait des « points de vue » (comme détenir la solution à l’érradication d’un virus, au réchauffement climatique). Répondent-ils d’un besoin (non nommé), d’une sensibilité qui les pousse à s’attacher ou à concevoir telle ou telle vérité ? Est-ce une question de mots, de langage qui ne trouvent pas sa formulation ? Est-ce une question de perception dont tout le monde n’est pas pourvu ? Est-ce une question liée à l’exercice de la raison et qui demande à être mieux entrainée ?On constate, autour de notre table des débats, que des participants semblent attachés à différentes manières d’avoir accès à des vérités. Ce sont des accès qui s’expriment par la raison, mais aussi par l’intuition, par des pratiques de méditation ou d’un sport de combat… La question qui se pose alors est : supposons que chacun de nous ayons nos propres formes d’accès à nos vérités, les vérités que nous percevons sont-elles « communicables » (peut-on en rendre compte, en dire quelque chose ?). Si nous parvenons à des vérités par différents outils/pratiques, comment les partageons-nous, comment nous faisons-nous comprendre les uns les autres ? Si je suis seul à percevoir une vérité, ai-je encore les moyens d’en faire l’examen ? Comment puis-je faire l’examen d’une vérité à plusieurs, si je suis le seul à percevoir la mienne ? Il incombe à l’assemblée d’être « ouverte » (disponible à écouter, à examiner les propos) et au « détenteur » d’une vérité spécifique (non immédiatement percevable, acceptable) de trouver des moyens de faire comprendre son point de vue.
Dans tous les cas, il convient de trouver un langage commun pour dire ce qui fait vérité pour soi.
Supposons néanmoins que nous ne trouvions pas dans l’immédiat de langage commun, il convient alors de s’entendre sur des « repères » qui seraient communs à chacun pour se donner aux uns et aux autres des indices qui témoigneraient de la bonne raison de poursuivre une recherche de vérité selon telle ou telle approche. Exemple : Le bozon de x était une hypothèse pour comprendre la théorie de la masse, il fut découvert quelques 80 années plus tard. Les repères étaient donnés par des calculs, la preuve serait probablement fournie par des détecteurs. Ce qui fut fait plus tard. Sur un autre plan, les rêves témoignent d’un rapport à l’inconscient au moyen d’un langage symbolique. Ils rendent compte également d’une sociologie des identités. (Bernard Lahire, sociologue). Par cette jonction entre pensée symbolique et sociologie, le sociologue pour défendre l’idée que la société façonne notre « sentiment d’être », nos rêves et nos espérances. Pour ces deux exemples, les preuves n’étaient pas disponibles il y a quelques années, on disposait cependant d’indices suffisant pour en encourager la recherche.
Tout savoir est nécessairement orienté. De quelle manière j’élargis mon regard ?
Entre la chose même et le discours sur la chose, tout un monde.
Jusqu’où est-il raisonnable de douter, et avec quelle méthode ?
Les avec et sans pass présents au café philo d’Annemasse ce soir-là.
Un bravo au Bar Sans Pression, situé au 53, rue de la Gare, Annemasse, qui joue dans la cour des humanistes, des non-discriminants.
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