De quelles valeurs se revendiquer ? Sujet du lundi (Pentecôte) 05.06.2017

[René]

De quelles valeurs se revendiquer ?

Pour notre sujet ci-dessous, je m’inspire directement de l’article de Adélaïde De Lastic (philosophe, ENS, CNRS), dont voici un extrait ci-dessous :

« Il est courant d’entendre des discours inquiets sur « la perte des valeurs », la « crise des valeurs », la « perte de repères ». Cette crise axiologique fait partie d’une crise systémique globale. Le système mondialisé que les humains ont mis en place pour faire circuler les richesses ne nous permet plus de croire qu’il fonctionne pour le bien de l’humanité, et l’impression de chaos se fait sentir dans tous les domaines : crise écologique, alimentaire, politique, sociale, financière, économique, et enfin crise des valeurs.
(…)
Nous nous trouvons dans une situation contradictoire où la perte de repères n’a d’égal que l’accroissement des injonctions morales – contradictoires – que l’on retrouve aussi bien dans les médias, presse et TV (injonction aux comportements écologiques), dans les entreprises (soyez responsables), sur les packaging alimentaires (mangez des légumes, faites de l’exercice, ne fumez pas, ne buvez pas trop d’alcool, surtout si vous êtes enceinte), à la fin de nos mails (n’imprimez ce mail que si vous en avez un besoin vital), qu’à l’école. Ainsi, depuis 2011, les ministres de l’éducation appellent à la mise en place de cours de morale dans les écoles primaires.
Nous en sommes là, à essayer de réinsuffler du sens en réhabilitant ou en réinventant des valeurs.  »

– Mais qu’est-ce qu’une valeur ?
– Qu’est-ce qui différencie la valeur d’une norme sociale ?
– Toute valeur est-elle avant tout morale ?
– Les valeurs sont-elles relatives uniquement à la culture ?
– Existe-t-il des valeurs intemporelles et communes à tous les hommes ?
– Les êtres humains peuvent-il se reconnaître dans des valeurs cardinales structurant leurs conduites ?
– Toute tentative de donner au monde un sens, est-elle une illusion ?
– Si certains principes ressortent et nous permettent de structurer l’agir des êtres humains contemporains, quels sont-ils, vers où vont-ils ?
– Sur quoi peut-on fonder l’existence des valeurs ?

Définition de Nathalie Heinich (sociologue) : la valeur résulte d’un ensemble d’opérations par lesquelles une qualité est affectée à un objet. En conséquence, la valeur se mesure par un prix, un attachement, des comportements, des actes, des contrats, des paroles qui engagent.

Une classification structurante des valeurs
1° Les valeurs attachés à des objets « concrets », et auxquels on fixe le plus souvent un prix.
2° Les valeurs abstraites, et incarnées dans des pratiques (la paix, la démocratie, la justice, la liberté …)
3°Les valeurs exprimant des principes ou des sentiments (authenticité, beauté, moralité, fidélité, honnêteté, engagement, vérité, …)

Un registre des valeurs
– les valeurs économiques
– les valeurs vitales qui incluent la santé, ce qui est lié au corps, à ses besoins, ce qui favorise la vie et s’oppose à la mort,
– le respect de la nature, de l’environnement, et qui est intimement lié aux valeurs vitales car notre existence est conditionnée par un environnement de qualité.
– Les valeurs morales, à l’opposé des valeurs économiques, sont mises en pratique dans un esprit matériellement désintéressé.
– les valeurs esthétiques,
– les valeurs affectives,
– les valeurs intellectuelles, caractéristiques de notre époque. La culture occidentale moderne est en effet marquée, par l’approche objective de la connaissance que constitue la science. Certaines cultures se souciaient moins de savoir, de méthode et de calcul que d’intuition ou de sagesse.

>> Pour avancer dans notre débat, peut-être pouvons-nous nous inspirer d’exemples, ou d’affaires prises dans les actualités. Par exemple : du pragmatisme ou de l’insoumission prônés par nos leaders politiques, l’écologie capitaliste ou l’écologie de la transformation (Hulot vs Mamère), l’affaire Ferrand, le mariage pour tous, l’euthanasie, les différentes conceptions de la laïcité, les lanceurs d’alertes, l’ubérisation de l’économie, le retour du religieux, l’absolue liberté de la presse, ou de celle des juges, … et nous interroger sur les valeurs qui sous-tendent les discours derrière les usages…. Nous pouvons également nous inspirer des jugements que nous portons, des prises de position que nous adoptons, et rechercher les valeurs qui sont mises en tension.

Ressources à lire, à écouter ou à voir :
– Une approche philosophique du sens des valeurs. DE LASTIC Adélaïde . Terre solidaire.
– Valeurs et culture(s) : Peut- on encore penser l’universel ? Anne-Marie Drouin-Hans. OpenEdition.
– Des valeurs. Une approche sociologique. Nathalie Heinich. Revues.

– Débattre ! Interroger la France et ses valeurs. Les rencontres de Pétrarque.
– Valeurs en baisse, morale en hausse ? Nathalie Heinich, invité des matins. France Culture.
– Quelles valeurs avons-nous encore en commun ? Du grain à moudre. France Culture.
– Nathalie Heinich, une « valeur » sûre. Invitée de la Grande Table. France Culture.
– Un entretien : Il faut repenser le concept d’Etat social. Alain Supiot est titulaire de la Chaire État social et mondialisation (collège de France): analyse juridique des solidarités.

– Vers un monde altruiste. Documentaire d’Arte. Résumé critique de Télérama.
> Le documentaire est en location sur la boutique d’Arte, ici.

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