Cafephilos Forums Les cafés philo Les sujets du café philo d’Annemasse Sujet libre ce lundi 12.06.2023 à 19h00 à la Taverne. Annemasse + compte rendu : Ce que l’on perçoit du « signe » est-il suffisant pour en déterminer la « justesse » (la vérité) ?

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  • #6671
    René
    Maître des clés
      Rencontres philo pour le monde d’aujourd’hui, tous les lundis à 19h00
      chez Maitre Kanter, place de l’Hotel de Ville. 74100 ANNEMASSE

      Ce lundi 12/06/2023, le sujet sera choisi parmi les questions proposées par les participants

      Par un vote ou un échange ouvert, on retient la question qui semble motiver l’attention des participants présents.
      – On cherche à dégager les enjeux de la question : en quoi il y a problème (sur un plan existentiel, relationnel, social, politique) et on interroge les dimensions de vérité et d’éthique que nos propositions soulèvent. C’est là où on commence à philosopher vraiment.
      – De fait, nous faisons philosophie par une capacité à mener une enquête, et par celle à questionner les raisons et les références par lesquelles on pense. (Quelques éléments d’explications sur la philo dans les cafés philo, ici)

      – Nous avons remarqué que, lorsque des participants s’impliquaient dans les questions qu’ils posaient et, parfois, lorsqu’ils avaient sous le coude, une citation, un témoignage de ce qui les avait interpelés dans la semaine, ou une question à laquelle ils pensaient déjà, que ce contexte facilitait parfois la prise de décision du sujet retenu.
      – Apprendre à réfléchir ensemble pour dégager un problème et formuler une question s’inscrit dans une démarche première en philosophie.
      – La formule traditionnelle des cafés philo où un participant souhaite préparer une question avec quelques ressources est toujours ouverte, il suffit de l’inscrire dans l’agenda et de l’introduire en une poignée de minutes le jour venu.
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      Le compte rendu du sujet de la semaine passée en ligne : L’autre comme condition de soi et d’accomplissement, ou comme empêchement ? Cliquer ici

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      Règles de base du groupe
      – La parole est donnée dans l’ordre des demandes, avec une priorité à ceux qui s’expriment le moins.
      – Chacun peut prendre la parole, nul n’y est tenu.

      Pour limiter les effets de dispersion dans le débat
      – On s’efforce de relier son intervention à la question de départ, de mettre en lien ce que l’on dit avec ce qui a été dit.
      – Pour favoriser une circulation de la parole, de sorte à co-construire le débat avec les autres participants, on reste concis.
      – On s’attache davantage à expliquer la raison de sa pensée, plutôt qu’à défendre une opinion.
      – On s’efforce de faire progresser le débat.
      – Concrètement, on évite de multiplier les exemples, de citer de longues expériences, de se lancer dans de longues explications, mais on va au fait de son argumentation.

      > Le moment de la conclusion peut donner l’occasion d’un exercice particulier :

      – On peut dire ce que l’on pense des modalités du débat.
      – On peut faire une petite synthèse d’un parcours de la réflexion.
      – On peut dire ce qui nous a le plus interpelé, ce que l’on retient.
      – On peut se référer à un auteur et penser la thématique selon ce qu’aurait été son point de vue.
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      Avec ou sans préparation, chacun est le bienvenu, les cafés philo sont par définition, contre toute forme de discrimination et de sélection par la classe sociale, le niveau scolaire, etc.

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      René Guichardan, café philo d’Annemasse.
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      #6682
      René
      Maître des clés
        Compte rendu du 12 juin : Ce que l’on perçoit du « signe » est-il suffisant pour en déterminer la « justesse » (la vérité) ?

        Nous étions 7 participants, dont un nouveau.

        Les questions que nous nous sommes posés :
        1° Ce que l’on perçoit du « signe » est-il suffisant pour en déterminer la « justesse » ?
        2° La vulgarisation donne-t-elle accès à la connaissance ?
        3° En quoi l’humour nous sauve-t-il pour un instant ?
        4° Doit-on apprendre à maitriser l’occasion (le moment présent) ? (référence à Jankélévitch)

        Par vote, la question n°1 a été retenue.
        Les questions autour de la définition des trois termes : percevoir, signe et justesse ont été importantes pour ne pas perdre de vue une problématique centrale, mais cette dernière est davantage sous-entendue, qu’explicitement formulée. Par exemple, le mot « justesse » fait référence à une question d’exactitude, c’est juste ou c’est faux. Il s’agit de la possibilité de mesurer une chose et, plus largement, d’en évaluer les usages. Il est question ici d’un rapport à la réalité, voire à la vérité. Mais le mot « justesse » renvoie également à des questions de normes, c’est-à-dire, de valeurs, notion qui, à son tour, ne se limite pas à l’ordre des mesures et fraye son chemin vers l’ordre moral des choses, des conventions sociales. Le risque est grand de partir dans tous les sens et de s’y perdre. Mais, ce ne fut pas le cas, on s’en réjouit. Dans l’idée, on a pu reformuler la question du participant (Pascal) ainsi : ce que je perçois, comme signe (indice) renvoie-t-il à la vérité des choses ? Vérité des choses qui peut se rapporter à une expérience phénoménologique, mais aussi à des faits objectifs, à l’analyse d’une situation, à la psychologie d’une personne, à des intentions et, en fait, à une égratignure sur un doigt, ce qui était le cas avec Pascal, et qui a motivé sa question. La problématique de fond se trame dans un rapport de pertinence entre les choses perçues et les significations (les valeurs de sens) auxquelles les choses en question renvoient. Or tous les signes ne se lisent pas de la même façon et, de leurs lectures (interprétations) différenciées découlent des conséquences spécifiques (des architectures de la pensée). Commençons par le début. Qu’est-ce qu’un signe ?

        Jusqu’où un signe n’est-il qu’un indicateur ?
        Basiquement, un signe est un « indicateur » ou un indice, l’idée générale est qu’il oriente vers quelque chose. Fondamentalement, le signe n’existe que pour ce vers quoi il pointe. Mais nous sommes rapidement tombés sur la diversité des signes : les lettres de l’alphabet, les symptômes d’une maladie, ce que peuvent signifier les gestes et des mots d’autrui lors d’une interaction ou encore, du sens que peut avoir la symbolique de nos rêves. De fait, il y a des signes dont l’usage et la compréhension sont immédiats et sans ambiguïté (les lettres et les chiffres, une signalétique), tandis que d’autres signes demandent à être interpréter. L’interprétation, elle, est fonction des cartes de lectures dont nous disposons. Ces dernières peuvent être culturelles, émotionnelles, professionnelles, académiques, mais elles peuvent être aussi conscientes ou inconscientes. Par exemple, les couleurs n’ont pas toutes le même sens et la même prégnance pour l’artiste. Autre exemple, la chemise de mon voisin ne m’inspire aucun signe, mais elle en aura pour le sociologue, le faiseur de mode ou encore, le psychanalyste.
        Mais, pour éviter de nous égarer, ne cherchons pas à interpréter les différents sens que peut avoir une chemise. Observons simplement que le symbole a valeur de révélation. Cela change la nature du signe, il ne montre plus une direction, il révèle ce qui peut faire valeur de vérité pour celui/celle qui l’interprète. Ce qui pose la question de savoir jusqu’à quel point le « signe » ne serait pas en lui-même, un indicateur de vérité ? Mais est-ce encore un signe (une indication) s’il est révélateur, autrement dit, porteur d’une certaine vérité ? En effet, dans le cas où le signe révèle, il n’oriente plus, il est tout à la fois, le contenant et le contenu, le signifiant et le signifié. On se retrouve là avec une donnée de la phénoménologie, la vérité de la chose est dans son apparence, c’est le lieu où sa vérité doit être recherchée, c’est-à-dire, dans la chose même de son phénomène (dans la chose perçue).

        Qu’est-ce qui importe, le doigt ou la lune, le signifiant ou le signifié ?
        Reprenons les séquences du film. Il y a des signes parce qu’il y a une capacité de perception. La perception, de son côté, est située par et dans la conscience de celui qui perçoit. Il s’agit d’une rencontre qui a lieu dans la conscience du sujet. D’un côté, nous savons que le signe ne vient pas de nulle part, il a sa propre existence, cette dernière est indépendante du sujet. Mais, d’un autre côté, nous devons prendre acte du fait que le signe n’est perçu que relativement aux conditions de perceptions du sujet (phénoménologie de la perception), ainsi qu’a ses catégories de penser, c’est-à-dire, à ses registres d’interprétation. De fait, lorsque le signe vient de l’intérieur, un rêve, un sentiment à propos de quelque chose, il semble que nous soyons dans une zone grise. Le signe est-il encore signe ou révélateur d’une vérité ? L’impression que l’on a lorsque, par exemple, l’autre se moque de nous par sa manière de nous regarder, rend confus la distinction entre ce qui vient de l’extérieur de soi et ce qui vient de l’intérieur : ai-je bien traduit le signe qui m’était adressé, pourquoi est-ce que je ressens les choses de cette manière et, en premier lieu, suis-je assuré d’avoir perçu le signe de façon objective et, à partir de tous les angles ? Non, n’est-ce pas ? Il ressort que tout perçu est déjà le fruit d’une interprétation subordonnée aux sens et à leurs limites, tout perçu engage à une phénoménologie, elle est relative à des concepts, à des percepts, à des affects, à des intentions, les miennes et celles d’autrui. Dès lors, suis-je physiologiquement équipé pour voir, pour saisir la « réalité » et la vérité que les phénomènes perçus contiennent ? On peut en douter, n’est-ce pas ? (la zone reste grise) De fait, toute perception est subjective (relative à mon point de vue), voire, intersubjective, lorsqu’elle est le produit de plusieurs perceptions. Ce sont éventuellement des aspects d’une certaine vérité-réalité en soi-même qui sont perçus, mais ont-ils une chance d’être communément partagés ou sont-ils strictement singuliers (propres à chacun) ? Il se pose la question de savoir si chacun est isolé dans le monde de sa perception, et de ce qu’il advient des « perçus » intersubjectifs, de ce qui est mis en commun ?

        Est-ce que je perçois, est-ce que je veux voir ou seulement ce que je peux voir ?
        L’acte de percevoir fait référence à une phénoménologie de la perception. Nous venons de considérer qu’il y a des registres d’interprétation qui peuvent se confondre avec celui de révélation car, non seulement, ils dépendent des appareils de détection (par exemple, l’œil et ses batônnets de perception) qui imposent leurs modes de fonctionnement, mais le perçu, lui, dépend des clés d’interprétations qui, elles, sont fonction de catégories de concepts, c’est-à-dire, d’abstractions, de préjugements, d’une formation préalable, etc. C’est là où une certaine prudence a été requise dans nos échanges. Jusqu’où l’interprétation que je prête aux signes perçus est-elle fantaisiste (insuffisamment structurée) et jusqu’où dit-elle une vérité sur la chose elle-même ? La chose elle-même, renvoie, en phénoménologie, à celle qui est toute entière contenue dans nos perceptions, mais la chose en soi (Kant) est celle qui existe dans le monde réel, indépendamment de toute perception. Mais jusqu’où la « vérité » et l’interprétation des choses en soi et des choses en elles-mêmes sont-elles orientées par une « intentionnalité (des préconceptions) ?

        Partageons-nous un même monde ?
        Ma perception même est déjà orientée en ce qu’elle contient des limites et en ce que chacun de nous ne perçoit pas la même chose d’un objet, d’une relation ou d’une situation. Ces derniers ont une double existence, ils sont tout entier donnés à nos perceptions tout en ayant une existence propre.
        Nous reconnaissons cette double existence pour ne pas tomber dans l’un des pièges du solipsisme (il ne peut y avoir de réalité autre qu’en ce que ma conscience peut concevoir). Le problème étant que personne ne peut prétendre accéder à cette vérité-réalité et donc, la révéler. En soi, on est tranquille, on n’attend aucune révélation de personne. Mais, pouvons-nous mettre précisément en commun nos perceptions, si chacun reste rivé à elles seules ? Le problème semble se poser ainsi : nous savons que nous partageons un monde commun, puisque nous vivons ensemble dans ce monde, mais nous doutons de la possibilité d’en partager une conscience commune, c’est-à-dire, une même conscience, car chacun a la sienne. Mais comment savons-nous si nous parlons de la même chose ? Certes, nous pouvons témoigner de la conscience que nous avons du monde, mais l’autre, peut-il accéder ou voir mon monde comme si nous en partagions une même conscience ? C’est plus facile lorsque les choses sont bien situées et objectivées à l’extérieur de soi, car on peut alors s’accorder sur des ordres de mesures et des critères d’objectivité. Mais les zones grises augmentent lorsqu’on s’avance dans les sciences quantiques, les sciences du vivant, les sciences humaines et le monde de nos perceptions.

        L’adéquation de la chose avec elle-même, nous dit-elle la vérité sur la chose ?
        Deux problèmes se sont posés. La participante, Eva, pose la condition selon laquelle, nous nous accordons pour questionner nos présupposés, c’est-à-dire, pour faire l’examen même de nos catégories de penser, pour mesurer leur pertinence ou le flou à partir duquel tout s’embrouille. Et, d’un autre côté, force est de constater, dans le quotidien de nos échanges, notamment lorsqu’il y a des enjeux dans une discussion, l’impossibilité de nous entendre sur une diversité de sujets (sur les questions du climat, de la politique, de la santé publique, sur la guerre, etc.). De fait, il nous faut reconnaître l’exigence, la détermination que demande de faire la « vérité sur une chose », tout en admettant qu’elle reste relative à nos perceptions, qui incluent des jugements, des préconceptions, des prédispositions, etc. Si nous souhaitons ne pas sombrer dans le « tout est relatif et donc rien n’est vrai », nous sommes tenus de questionner nos présupposés, nous devons nous déterminer à le faire. Okay, nous reconnaissons que nous sommes en mesure de le faire au sein de ce café philo, mais, et c’est le second problème, saurions-nous le faire dans la vraie vie, lorsque nous sommes confrontés à des problèmes personnels, à des enjeux qui nous tiennent à cœur, à des discussions éthiques, philosophiques, politiques et qui peuvent affecter la vie d’autrui, induire des effets sur notre vie sentimentale, nos convictions intimes, la vie publique ? Ce qui pose la question de ce qui peut arbitrer un désaccord sur un thème donné, lorsque nos perceptions-représentations sont en désaccord. Est-ce possible de s’entendre sur des façons d’arbitrer une décision ou sommes-nous condamnés à tourner en rond ? Devons-nous apprendre à nous détacher de nos perceptions, si l’on estime que personne ne peut dépasser sa perception du monde ? Devons-nous suspendre tout jugement (epoché) comme le préconise la phénoménologie pour revenir à la chose même ? Faut-il prendre le risque de renoncer à la réalité-vérité des choses en soi ?

        Ce que requiert l’exigence de s’entendre sur une réalité donnée.
        Prenons un exemple simple, l’égratignure du doigt de Pascal, et qui lui a suggéré sa question : à la perception de cette blessure (sommes-toute ridicule – no offense), peut-elle nous dire « sa vérité », c’est-à-dire, ce que l’on peut attendre de son évolution ? En effet, si la chose a une vérité en elle-même, elle poursuivra son évolution indépendamment de ce que l’on en pense et perçoit.
        Déplaçons les regards autour de l’exemple du doigt. Du point de vue du sujet, supposons sa crainte pour la moindre éraflure, il aura peur ; du point de vue du médecin, selon qu’il est orthodoxe ou naturaliste, ce dernier recommandera les vaccinations d’usage ou de renforcer le système immunitaire de son patient. De son côté, le psychanalyste du coin se demandera ce que l’inquiétude révèle de l’inconscient du sujet et, peut-être, de quelle manière cela peut jouer sur son immunité tant psychique que physique. Le stoïque, de son côté, verra l’occasion de soutenir sa douleur, et l’épicurien, de travailler sur ses représentations pour mieux s’accorder à son ressenti. De fait, chacun voit selon un ordre d’appréhension, une philosophie induite. Mais la blessure, elle-même, que dit-elle ? Un examen approfondi peut-il nous dire, à l’avance, ce qu’elle va devenir (va-t-elle s’infecter, contient-elle déjà des germes dangereux ?). Une conscience phénoménologique peut-elle nous révéler la vérité sur la chose en soi ou atteignons-nous les limites de ses possibilités (de son paradigme) ?

        Pour conclure, savoir partir, savoir revenir, mais équipé autrement
        En fait, s’il convient que chacun témoigne de sa perception d’une chose, et que l’on s’accorde pour dessiner une carte de l’ensemble des représentations, les bouts du perçu de chacun peuvent permettre à l’ensemble de prédéfinir un « commun partagé », qui devient alors une partie éventuelle d’une réalité partagée. Ce moment demande de suspendre notre jugement, autrement dit, de faire exercice d’epoché (suspension de son jugement), qui est un aspect central de la pratique de la phénoménologie et ce, dans la pratique même du débat. La question est, oui mais, pour combien de temps, jusqu’à quelle limite, en vue de quoi, de quelle fin suspendons-nous nos jugements ? A quelle fin questionnons-nous nos perceptions, nos catégories de pensée, voire nos résistances ? La remise en question de nos conceptions, perceptions et préconceptions s’entend comme un voyage pour changer de continent (prendre de la distance), mais il y a un retour à assumer vers la vérité-réalité, car cette dernière poursuit son chemin. Il faudra savoir y répondre.

        Ce que le compte rendu ne dit pas :
        La fin du débat nous entrainait à parler de la phénoménologie, la crise qu’elle représente dans le monde de la philosophie, qui se voit scindée en sciences humaines, notamment avec sa branche en psychologie avec le pragmatisme (William James, puis celui de John Dewey). Plusieurs « auteurs » phénoménologiques, Hegel, Heidegger ou Sartre feront école. Tandis que l’école de Francfort, s’approprie la phénoménologie pour l’intégrer/l’associer à toutes les sciences humaines (éthologie, psychologie, sociologie, etc).
        Bref, la phénoménologie a pris également un autre tournant pour la traductrice de Husserl, Natalie Depraz, qui fait le lien avec l’énaction, tout en revalorisant les travaux de Merleau-Ponty.
        Dans ce forum (cliquer ici) nous postons des liens (niveau universitaire) et quelques prises de notes vers la phénoménologie et l’énaction.

        L’époché ou la suspension du jugement, mais qu’est-ce que cela veut dire ? Un schéma inspiré d’une conférence (lien dans notre forum ici) de Natalie Dupraz (traductrice d’Husserl).


        Natalie Depraz explique précisément les opérations cognitives qui ont lieu lorsque la pensée est suspendue.
        Ce qui pose la question, entre quoi et quoi la pensée est-elle suspendue ? L’attention entre en jeu à ce moment-là. C’est une capacité que l’on développe par la pratique. Mais que fait l’attention ? Elle veille à maintenir la pensée suspendue.
        Mais si l’attention se transforme en un acte de volonté, elle peut réprimer (bloquer) toute émergence, plutôt que de laisser-vivre, plutôt que d’observer. En effet, elle tend naturellement à s’identifier à ce qu’elle « sent » ou veut être. Le « je » croit qu’il est ce qu’il sent (ou qu’il est habité de ce qu’il ressent), bref, il est un « contenu », il n’est pas pure « attention ». Souvent, il espère se libérer de lui-même, plutôt que d’y accorder son attention.Si une attention bienveillante, curieuse et néanmoins assidue est mise oeuvre (par une pratique régulière), elle observe, elle accueille, elle se découvre séreine… mais le chemin est-il direct ? La pratique est-elle évidente ? Se peut-il qu’elle soit le produit d’un auto-conditionnement plutôt que celui d’une attention ? L’attention peut-elle être la conscience qui se « divise elle-même » pour se construire un semblant de paix, un espace de sérénité ?

        Combien de temps l’attention doit-elle se soutenir/tenir dans cet état ? Et qu’est-ce qui la fera sortir d’elle-même ? Nulle ne peut y répondre pour soi-même. Il faut en faire l’expérience pour être habilité à y répondre.

        Un indice, Pascal se demande pour quelle raison on ne peut rester tranquille dans sa chambre. On peut supposer que la tranquillité laisse émerger ce qui est agité en soi, mais que l’on préfère projeter dans le « monde ». D’où le fait de ne pas rester tranquille dans sa chambre.

        Si l’on adopte l’option « bouddhiste », la suspension de la pensée existe pour sa seule fin.
        Pourquoi pas ?
        Mais l’arrière-plan bouddhiste suppose une libération, l’affranchissement des illusions, des états d’éveil et un « nirvana ».

        De quelle manière, cet arrière -plan constitue-t-il une attente, un conditionnement, une croyance, une espérance ?
        Mais ce n’est pas ce à quoi pensait Husserl, n’est-ce pas ?

        La question de l’époché reste entière. En vue de quoi, pourquoi et de quoi la conscience se fera-t-elle le témoin ?

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        René Guichardan, café philo d’Annemasse.
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