Cafephilos › Forums › Les cafés philo › Les sujets du café philo d’Annemasse › Sujet libre ce lundi 20.03.2023 à 19h00 chez Maitre Kanter. Annemasse + compte rendu : un objet existe-t-il que parce qu’il est observé ?
- Ce sujet contient 1 réponse, 1 participant et a été mis à jour pour la dernière fois par René, le il y a 2 années et 1 mois.
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17 mars 2023 à 4h18 #6544Rencontres philo pour le monde d’aujourd’hui, tous les lundis à 19h00
chez Maitre Kanter, place de l’Hotel de Ville. 74100 ANNEMASSECe lundi 20/03/2023, le sujet sera choisi parmi les questions proposées par les participants
Par un vote ou un échange ouvert, on retient la question qui semble motiver l’attention des participants présents.
– On cherche à dégager les enjeux de la question : en quoi il y a problème (sur un plan existentiel, relationnel, social, politique) et on interroge les dimensions de vérité et d’éthique que nos propositions soulèvent. C’est là où on commence à philosopher vraiment.
– De fait, nous faisons philosophie par une capacité à mener une enquête, et par celle à questionner les raisons et les références par lesquelles on pense. (Quelques éléments d’explications sur la philo dans les cafés philo, ici)– Nous avons remarqué que, lorsque des participants s’impliquaient dans les questions qu’ils posaient et, parfois, lorsqu’ils avaient sous le coude, une citation, un témoignage de ce qui les avait interpelés dans la semaine, ou une question à laquelle ils pensaient déjà, que ce contexte facilitait parfois la prise de décision du sujet retenu.
– Apprendre à réfléchir ensemble pour dégager un problème et formuler une question s’inscrit dans une démarche première en philosophie.
– La formule traditionnelle des cafés philo où un participant souhaite préparer une question avec quelques ressources est toujours ouverte, il suffit de l’inscrire dans l’agenda et de l’introduire en une poignée de minutes le jour venu.
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Le compte rendu du sujet de la semaine passée : le cerveau crée-t-il du sens jusqu’à la folie ? Cliquer ici
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Règles de base du groupe
– La parole est donnée dans l’ordre des demandes, avec une priorité à ceux qui s’expriment le moins.
– Chacun peut prendre la parole, nul n’y est tenu.Pour limiter les effets de dispersion dans le débat
– On s’efforce de relier son intervention à la question de départ, de mettre en lien ce que l’on dit avec ce qui a été dit.
– Pour favoriser une circulation de la parole, de sorte à co-construire le débat avec les autres participants, on reste concis.
– On s’attache davantage à expliquer la raison de sa pensée, plutôt qu’à défendre une opinion.
– On s’efforce de faire progresser le débat.
– Concrètement, on évite de multiplier les exemples, de citer de longues expériences, de se lancer dans de longues explications, mais on va au fait de son argumentation.
—————-Avec ou sans préparation, chacun est le bienvenu, les cafés philo sont par définition, contre toute forme de discrimination et de sélection par la classe sociale, le niveau scolaire, etc.————————-
René Guichardan, café philo d’Annemasse.
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> Vous pouvez nous rejoindre sur notre groupe Signal (cliquer ici)24 mars 2023 à 7h16 #6552Compte rendu du 20 mars
Un objet peut-il exister sans être observé ?Nous n’étions que 5 ou 6 participants à ce café philo, dont Karine qui n’était pas venue depuis longtemps (une ou deux années ?) et qui avait cinq sujets en réserve :
– « Il n’y a pas de beauté exquise sans une certaine étrangeté de la proportion ». Ellan Edgar Poe.
– Faut-il douter de tout ?
– Peut-on être contre-nature ?
– Outre la maladie et la mort, y a-t-il d’autres universels ?
– Un objet peut-il exister sans être observé ? Et qui sera retenu ce soir.La citation fait penser à l’immatérialisme de Berkeley (voir ici, vidéo de 7mn) mais il nous importait de « démonter » d’abord les termes de la question (qu’est-ce observer ? qu’est-ce qu’un objet, qu’est-ce qu’exister ?) mais aussi, pourquoi la question est-elle posée ? De quoi est-elle la cause ?
Observer s’entend comme « objectiver » par le regard un objet.
De fait, l’objet est présent et il existe.
Observer s’entend également dans l’expression, j’observe que le temps passe.
Or le temps n’est pas un objet. De fait, ce qui est observé, ce sont les conséquences d’une durée qui s’écoule. En effet, le temps n’existe que par ses effets que l’on observe, mais non en tant qu’objet palpable concrètement.
Bernadette Soubirous a eu des apparitions qui, pour elle, sont « effectives », elle ne doute pas de sa vue. Mais l’objet de sa vision est une apparition qui ne se révèle qu’à elle seule, tandis que les témoins sont convaincus, ils/elles la croient en la voyant sous l’effet de ses visions.On s’accorde à penser que le terme « observer » s’entend pour plusieurs typologies d’objets, et qu’ils n’ont pas tous les mêmes modalités d’existence. De fait, ils ne mobilisent pas les mêmes sens (l’œil pour les objets, une vision intérieure pour une apparition, une représentation pour le temps qui, pour Kant, relève d’une perception intuitive).
Mais d’autres « objets » sont observés. Par exemple, on observe, entendu comme « faire constat » en soi d’une impression, d’un sentiment que, l’idée d’observer emprunte progressivement un entre-deux entre l’empirisme et la phénoménologie. L’observation n’est plus seulement objectivable ou associée à des croyances, elle est interaction. L’observation est liée à des percepts/perceptions intérieurement représentées. Ainsi, toute conscience est conscience de quelque chose (Husserl), mais l’interaction entre la conscience et la chose représentée se trouve associée à des souvenirs, à un imaginaire, à des représentations, à des ressentis, à des situations empiriques. De fait, toute chose est objectivement située. (À voir, car la phénoménologie exclut l’imaginaire, l’empirisme, les idéaux pour s’attacher à rechercher l’essence dans le phénomène de la chose elle-même, ce qui, in fine, n’est pas sans contradiction dans les termes du projet phénoménologique, puisque le cerveau n’est pas dans un bocal, ce qui est perçu a été préalablement perçu par des sens).
Enfin, il est noté qu’il y a des choses que nous ne voulons pas voir, des amours que nous voulons oublier. Dès lors, observer est également une question de « volonté » d’intentionnalité. Toute perception est « intention » (Merleau-Ponty). De fait, voir, percevoir, se représenter, sentir, considérer (des sentiments, des valeurs, la croyance, des souvenirs, etc)… tout cela entre dans des catégories du « voir » et de la « volonté » en ce double sens que les modalités du « perçu » affectent ceux qui en éprouvent les effets. De ce point de vue, et par rapport à notre question, une chose non vue n’existe pas, mais cela ne signifie pas que la chose soit non-perçue (y compris inconsciemment), qu’elle n’existe pas ni qu’elle soit sans effet sur soi. Par exemple, le refus de reconnaître le diagnostic de sa maladie ne l’empêche pas de progresser.
Mais nous observons également que généraliser toutes ces modalités d’observation sur tant d’objets différents ne peut nous permettre d’approfondir et/ou de clarifier notre pensée car elles recouvrent trop d’expériences différentes.
Avec Bachelard, nous devons admettre que toute observation est située selon trois grands axes : à partir d’un point de vue (idéaliste, empirique, phénoménologique), en fonction d’une perspective (à la recherche d’un sens) et sur la base d’une donnée (objective, imaginaire, ressentie, effective, intuitive).Trois problématiques :
Il va de soi que des choses existent sans l’assentiment de l’être humain, puisque le monde lui préexistait, et qu’il continuera à exister après lui.La seconde problématique tient à notre volonté de voir ou pas les choses exister. Nous avons vu qu’ignorer les choses nous rend aveugle à elles-mêmes, sans pour autant en empêcher les effets (ne pas voir le réchauffement climatique, sa maladie ou la corruption des élites n’en empêche pas les conséquences sur notre vie). Or, comment expliquer cette volonté de déni tout en percevant malgré soi (la plupart du temps), que nous allons nous trouver affecté et de manière plus grave que si nous nous étions préparés ? Se peut-il que nous ne voulons pas être avertis de nos propres contradictions ?
La troisième problématique tient au statut de la vérité / réalité accordé aux choses. Peut-on s’entendre sur la vérité/réalité des choses si chacun n’est pourvu que de son point de vue ?
Réponse simple : Oui, si l’on s’évertue de préciser les modalités de nos perceptions respectives, de sorte que l’autre puisse s’en faire une représentation. Certes, il s’agit de représentations croisées, chacun a la sienne, mais elles peuvent être comparées, articulée, différenciée, discutée quant à leur valeur de vérité, de sens, d’interprétation, avec des protagonistes de bonne volonté. C’est-à-dire, avec des personnes qui donnent à la « vérité » une valeur plus haute que celle qui conforte leur point de vue du moment.Réponse plus nuancée. Dès lors que la question posée fait écho à des sentiments personnels et, partant, à une éthique, à des enjeux, alors des tensions commencent à pointer de toute part. Lorsque des décisions doivent être prises, des jugements conséquents portés, les désaccords se multiplient et se font plus francs. Par exemple, les visions de Bernadette Soubirous, si elles n’étaient pas liées à des miracles et à des croyances, nous pourrions les examiner comme une curiosité, comme un fait social, mais la question du religieux devient vite « conflictuelle » et les partis pris tendent à sédimenter leurs positions. Et que dire de la guerre, de la politique, des questions de santé publique, de celles liées au genre ou à l’environnement ? Tous les sujets deviennent vite conflictuels. S’extraire des affects pour « observer » devient impossible si la possibilité n’est pas donnée de s’entendre sur une méthode, sur des bases argumentatives, sur une définition des termes et avec une dose déterminée de « bonne volonté ». C’est, à vrai dire, ce que l’on fait, lorsque l’on se doit d’étudier un objet sur un mode « universitaire », dans un contexte de recherche, dans un café philo ou encore avec des amis soucieux de « vérité ».
Les pratiques de l’écoute active (approche centrée sur la personne de Carl Rogers), l’épochè (la suspension de toute pensée/jugement) ou le stoïcisme peuvent être détournés pour mobiliser notre attention sur ce que tente de dire autrui par-delà les mots utilisés.
C’est à partir de là qu’intervient la dernière problématique de notre sujet, avec le terme, exister, entendu comme prendre part à la vie, être parti pris, être impliqué de façon assumée et interactive (en lien avec l’autre). Mais nous n’avons pas vraiment développé ce dernier volet de la question.Pour conclure
Il n’est pas impossible que la question ait été motivée par l’idée (la volonté) d’attribuer une existence aux choses, selon qu’il nous plait ou non de les prendre en considération. Il y a un enjeu de « négation », de déni si l’on devait employer un langage psy.
Mais rien, selon notre avis, n’est possiblement sans conséquence, y compris la façon de considérer nos rêves, nos pensées intimes et nos impensés, que ces derniers soient délibérés, involontaires, inconscients ou qu’ils aient encore pour cause des raisons traumatiques, des peurs, une éducation trop formelle ou de la maltraitance. En fin de compte, la question qui se pose est : puis-je être conscient de ce à partir de quoi (les bases, les appuis) je m’auto-détermine ? Et, partant, de ce à quoi je me destine ?————————-
René Guichardan, café philo d’Annemasse.
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