Cafephilos › Forums › Les cafés philo › Les sujets du café philo d’Annemasse › Sujet libre ce lundi 27.03.2023 à 19h00 chez Maitre Kanter. Annemasse + Compte rendu : faut-il exclure ce qu’on ne peut inclure ?
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24 mars 2023 à 14h08 #6557Rencontres philo pour le monde d’aujourd’hui, tous les lundis à 19h00
chez Maitre Kanter, place de l’Hotel de Ville. 74100 ANNEMASSECe lundi 27/03/2023, le sujet sera choisi parmi les questions proposées par les participants
Par un vote ou un échange ouvert, on retient la question qui semble motiver l’attention des participants présents.
– On cherche à dégager les enjeux de la question : en quoi il y a problème (sur un plan existentiel, relationnel, social, politique) et on interroge les dimensions de vérité et d’éthique que nos propositions soulèvent. C’est là où on commence à philosopher vraiment.
– De fait, nous faisons philosophie par une capacité à mener une enquête, et par celle à questionner les raisons et les références par lesquelles on pense. (Quelques éléments d’explications sur la philo dans les cafés philo, ici)– Nous avons remarqué que, lorsque des participants s’impliquaient dans les questions qu’ils posaient et, parfois, lorsqu’ils avaient sous le coude, une citation, un témoignage de ce qui les avait interpelés dans la semaine, ou une question à laquelle ils pensaient déjà, que ce contexte facilitait parfois la prise de décision du sujet retenu.
– Apprendre à réfléchir ensemble pour dégager un problème et formuler une question s’inscrit dans une démarche première en philosophie.
– La formule traditionnelle des cafés philo où un participant souhaite préparer une question avec quelques ressources est toujours ouverte, il suffit de l’inscrire dans l’agenda et de l’introduire en une poignée de minutes le jour venu.
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Le compte rendu du sujet de la semaine passée : Un objet existe-t-il parce qu’il est observé ? Cliquer iciPour ceux que cela intéresse : La sociologie des hallucinations. Une thèse défendue par David Chapuis (INSERM) sur les prises des psychédéliques. Cliquer ici.
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Règles de base du groupe
– La parole est donnée dans l’ordre des demandes, avec une priorité à ceux qui s’expriment le moins.
– Chacun peut prendre la parole, nul n’y est tenu.Pour limiter les effets de dispersion dans le débat
– On s’efforce de relier son intervention à la question de départ, de mettre en lien ce que l’on dit avec ce qui a été dit.
– Pour favoriser une circulation de la parole, de sorte à co-construire le débat avec les autres participants, on reste concis.
– On s’attache davantage à expliquer la raison de sa pensée, plutôt qu’à défendre une opinion.
– On s’efforce de faire progresser le débat.
– Concrètement, on évite de multiplier les exemples, de citer de longues expériences, de se lancer dans de longues explications, mais on va au fait de son argumentation.
—————-Avec ou sans préparation, chacun est le bienvenu, les cafés philo sont par définition, contre toute forme de discrimination et de sélection par la classe sociale, le niveau scolaire, etc.————————-
René Guichardan, café philo d’Annemasse.
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– Ici, nous postons des cours, interviews, conférences dont nous avons apprécié la consistance philosophique
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> Vous pouvez nous rejoindre sur notre groupe Signal (cliquer ici)31 mars 2023 à 16h48 #6567Compte rendu du lundi 27 mars 2023
Faut-il exclure ce qui ne peut être inclus ?Nous étions 9 participants, dont deux nouveaux (et qui se sont exprimés).
Le tour des questions proposées ouvre d’emblée sur une sorte de brainstorming, dont il nous faut délier l’écheveau. Trois questions sont proposées :
– 1 ° Les valeurs de l’universel sont-elles en contradiction avec elles-mêmes ?
Exemple : serions-nous en contradiction lorsque, par exemple, nous défendons des valeurs de vérité et de justice dans le même temps ?
Autre exemple : le droit de la femme à disposer librement de son corps est-il contradictoire avec celui de l’avortement ? Autrement dit, son droit absolu à être elle-même contrevient-il à celui de la vie à naître ?– 2° Être ou ne pas être vs être et ne pas être ? Autrement dit, faut-il être sans concession dans un rapport à la vérité avec soi et face à autrui (à l’adversité notamment) ou, à l’inverse, faut-il pondérer sa « vérité d’être » en fonction des dispositions d’accueil que nous réserve l’environnement du moment ?
– 3° Faut-il exclure ce qu’on ne peut inclure ?
Une thématique qui se cherche.
Aucune de nos questions posées, qui se montrent à la fois abstraites et complexes, ne se prêtent à une discussion facile. C’est l’inconfort auquel nous nous prêtons allègrement, car les questions cruciales, les questions de fonds et formulées précisément n’adviennent pas immédiatement à la pensée. De plus, dans ce café philo, nous nous accordons à l’idée qu’un effort est requis pour articuler sa pensée avec celle des participants présents, autrement dit, de faire en sorte que les questions mises en partage par chacun rencontrent l’intérêt de tous, et que personne (ou le moins possible) reste cantonné dans son quant-à-soi. Il s’agit, par cette approche, d’encourager la pratique d’une intelligence collective, interactive et de saisir sur un mode compréhensif ce sur quoi s’appuie la pensée des uns et des autres. Nous souhaitons ainsi nous détourner des rapports d’opposition frontale et des polémiques stériles.La thématique perçue par-delà les cas d’exemple :
La thématique porte sur un rapport aux contradictions, sur ce qui semble être inconciliable entre plusieurs possibilités : être ou/et ne pas être – inclure / exclure – justice et droit versus équité et conciliation, valeur de vie pour soi contre valeur de vie pour la communauté, progrès humain vs progrès technologique, etc…
L’une des problématiques qui se dégage de ces contradictions articule des valeurs et des intérêts individuels contre des valeurs et des intérêts collectifs.Reprenons l’exemple du progrès humain vs celui de la technologie (suggéré par Paul).
Précisons avant tout que l’axe des valeurs vise des idéaux non comptables (la justice, l’honneur, la dignité, l’engagement, le singulier, etc.), ce qui se tient dans une verticalité (l’être, la durée, le temps), tandis que les intérêts s’estiment sur le mode du quantitatif, du mesurable, de l’utile, sur ce qui se tient sur le plan d’une horizontalité (les étendues, dirait Descartes).
Dans ce rapport entre le technique et l’humain, il a été pensé que l’évolution technique, en libérant l’être humain de l’asservissement lié aux tâches les plus ingrates, lui permette de s’adonner à la philosophie, aux arts, aux savoirs et au bien-être des autres humains (note en bas de page). Or, ce n’est pas ce que nous observons. L’inclination prise est celle de la société du spectacle, de la fabrique du consumérisme, de la rivalité des uns contre les autres, de la promotion d’un individualisme invétéré contre sa sociabilité et des valeurs de coopération. Mais, devait-il en être ainsi ? Pas nécessairement, n’est-ce pas ?On conçoit aisément que l’évolution technique n’est pas celle de l’éthique, l’une se rapporte aux sciences, aux techniques, aux matériaux et l’autre, aux relations humaines, à notre manière de considérer autrui et à nos modes de gouvernance. Il n’y a pas là d’opposition franche, mais des axes de développements différents. Science (les savoirs), technique (la fabrique) et éthique (la justice) peuvent se déployer selon leur paradigme respectif, sans nécessairement s’opposer ni faire se battre les êtres humains entre eux.
Ainsi, il se pose plusieurs questions :
– La première, qui est générale : pourquoi, avec nos savoirs et notre technologie, ne favorisons-nous pas la paix et des processus de médiation, mais préférons-nous encourager la guerre en distribuant massivement des armes ?
– La seconde question souligne le rapport qui s’établit entre l’individu et la société-monde d’aujourd’hui : jusqu’à quel point les intérêts géostratégiques des gouvernements et les logiques d’intérêt poussent-elles les nations les unes contre les autres et, les individus que nous sommes, à prendre part à cette bataille, à en être les marionnettes ?
– Les questions qui ont suivi par la suite sont plutôt d’ordre anthropo-philosophiques : jusqu’à quel point ce rapport de rivalité (de mimétisme, dirait Girard) relève-t-il d’une « nature humaine » (voire d’un éternel retour), et non d’une logique de systèmes qui dépasse les individus, voire les écrase, les inhibe ?
– Jusqu’à quel point les individus s’identifient à des groupes d’appartenance et nourrissent le système techno-économico-politique dans lesquels ils s’inscrivent ?
– Jusqu’à quel point la pensée de chacun tend-elle à se dissoudre dans celle du groupe ?Il y a nécessairement des glissements, une gradation entre la personne et le collectif, entre la sécurité personnelle et celle du groupe, entre la rivalité avec le voisin d’avec celle du pays voisin. Mais précisément, c’est la question. Sommes-nous embarqués dans des batailles, dans des collectifs malgré nous ?
Ces questions sont piégeuses, car les rapports de contradictions n’y sont pas symétriques, tandis que ceux de cause et d’effet ne sont pas immédiats. En effet, la rivalité entre les nations n’est pas vraiment de même nature que celle entre les personnes. La première se rapporte à la sécurité du territoire, la seconde, à une maturité psychologique des personnes, à leur sentiment subjectif de sécurité et d’insécurité. De plus, l’adhésion des personnes à leur groupe d’appartenance est rarement sans réserve, absolu et non-conflictuelle. Nous n’avons pas nécessairement les gouvernements que nous méritons, y compris dans les démocraties, tandis que les membres d’une même famille, d’un même groupe syndical (par exemple) ou d’une même région ne partagent pas tous les mêmes idées. Il y a un rapport de négociation qui se joue dans les interactions (dans les transactions, dirait Dewey), puisque la « composition » (l’édification, la construction) de soi se tracte à la fois dans un rapport à la pression du groupe, mais aussi dans les interactions avec notre voisin. Le soi se construit avec l’autre, par l’autre et par les règles (les lois, l’éthique) que l’on se donne pour établir et pour arbitrer ce qui définira ce qui nous est commun. C’est un processus sur plusieurs couches, à des échelles et à des temporalités différentes qui est à l’œuvre.
Question, est-ce insensiblement que l’on passe d’une éthique personnelle à une éthique du groupe (ses codes moraux) et à celle d’une nation (sa loi, sa justice et son appareil d’Etat) ? Qui y-a-t-il entre moi et autrui, entre moi et les groupes que je fréquente, entre moi et la nation ?
De quelle manière les choix du collectif pèsent-ils sur mes choix personnels et, inversement, de quelle manière ces derniers renforcent-ils l’inertie et les valeurs du groupe et son système politico-économique ?
Où s’articule les deux éthiques entre, d’une part, mes choix, ma pensée, mon intériorité, ma sensibilité, mon idéal (ou mon scepticisme et ma philosophie) et, d’autre part, le monde alentour, ses incitations, son système économicopolitique, mes engagements et ce que je crois devoir être mes intérêts, mon appartenance ?Il est difficile de clarifier ce qui se joue pour chacun autour de cette table, car nous percevons bien que nos choix sont à la fois fonction des informations avec lesquelles nous nous alimentons d’une part et, d’autre part, fonction d’une éthique, sinon d’un intérêt que nous pensons défendre au nom de nos valeurs. Mais qui met en discussion les appuis à partir desquels nous fondons nos valeurs ? Où sont les lieux où nous mettons en discussion, à l’aune d’une pratique philosophique, notre regard du moment, puis le méta regard par lequel nous projeterons la vie que nous souhaitons défendre pour nous, pour nos enfants et pour un environnement durable ?
Nous n’irons guère plus loin ce soir, faute peut-être de n’avoir pas su mieux préciser/formuler, placer le coin dans l’angle d’un problème plus spécifique. Néanmoins, nous pouvons nous féliciter de cette volonté de débroussailler les automatismes de nos pensées.
Quelques références :
– Le pouvoir illégal des élites, par le sociologue, Thierry Brugvin. Durée de sa conférence 1H10.Pour la petite histoire, Thierry Brugvin a participé au café philo animé par Fred à Besançon en mars 2023.
– Joëlle Zask : « Quand la place devient publique » (à propos de Le Public et ses problèmes de J. Dewey). La Grande Table. France Culture.
– La philosophie de John Dewey », Stéphane Madelrieux et Arnaud Rosset – événement Citephilo. Durée : 1h07
– Autour de la pensée de Johen Dewey. Chaire de Philosophie de l’Hopital. 2020. Durée 1h47.
– La notion de public de John Dewey à Louis Quéré. Par Johann Michel. Durée 5.51.
– La philosophie de « l’Éducation nouvelle » – John Dewey et Célestin Freinet, deux parcours militants. Par Ancrage Editions. Durée 1H18.
– Le libéralisme autoritaire contre la démocratie – Barbara Stiegler, John Dewey. Durée 3mn (un extrait)
– Un article : Barbara Stiegler, « Il faut s’adapter ». Sur un nouvel impératif politique, Paris, Gallimard. Chez Erudit.La note qui fait référence au lien entre la technologie et l’évolution culturelle, comportementale de l’être humain
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René Guichardan, café philo d’Annemasse.
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