Cafephilos Forums Les cafés philo Les sujets du café philo d’Annemasse Sujet libre ce lundi 31.10.2022 à 19h00 chez Maitre Kanter. Annemasse + compte rendu : Qui décide du calendrier des événements ? C’est quoi le début des choses ?

2 sujets de 1 à 2 (sur un total de 2)
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    Messages
  • #6385
    René
    Maître des clés
      Rencontres philo pour le monde d’aujourd’hui, tous les lundis à 19h00
      chez Maitre Kanter, place de l’Hotel de Ville. 74100 ANNEMASSE

      Ce lundi 31/10/2022, le sujet sera choisi parmi les questions proposées par les participants

      Par un vote ou un échange ouvert, on retient la question qui semble motiver l’attention des participants présents.
      – On cherche à dégager les enjeux de la question : en quoi il y a problème (sur un plan existentiel, relationnel, social, politique) et on interroge les dimensions de vérité et d’éthique que nos propositions soulèvent. C’est là où on commence à philosopher vraiment.
      – De fait, nous faisons philosophie par une capacité à mener une enquête, et par celle à questionner les raisons et les références par lesquelles on pense. (Quelques éléments d’explications sur la philo dans les cafés philo, ici)

      – Nous avons remarqué que, lorsque des participants s’impliquaient dans les questions qu’ils posaient et, parfois, lorsqu’ils avaient sous le coude, une citation, un témoignage de ce qui les avait interpelés dans la semaine, ou une question à laquelle ils pensaient déjà, que ce contexte facilitait parfois la prise de décision du sujet retenu.
      – Apprendre à réfléchir ensemble pour dégager un problème et formuler une question s’inscrit dans une démarche première en philosophie.
      – La formule traditionnelle des cafés philo où un participant souhaite préparer une question avec quelques ressources est toujours ouverte, il suffit de l’inscrire dans l’agenda et de l’introduire en une poignée de minutes le jour venu.
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      Le compte rendu du sujet de la semaine passée est ici: Qu’est-ce qui fait groupe et l’appartenance au groupe ?

      + Puis-je ne pas faire référence à la covid (et à mes opinions la concernant) dans les cafés philo ? Cliquer ici.
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      Règles de base du groupe
      – La parole est donnée dans l’ordre des demandes, avec une priorité à ceux qui s’expriment le moins.
      – Chacun peut prendre la parole, nul n’y est tenu.

      Pour limiter les effets de dispersion dans le débat
      – On s’efforce de relier son intervention à la question de départ, de mettre en lien ce que l’on dit avec ce qui a été dit.
      – Pour favoriser une circulation de la parole, de sorte à co-construire le débat avec les autres participants, on reste concis.
      – On s’attache davantage à expliquer la raison de sa pensée, plutôt qu’à défendre une opinion.
      – On s’efforce de faire progresser le débat.
      – Concrètement, on évite de multiplier les exemples, de citer de longues expériences, de se lancer dans de longues explications, mais on va au fait de son argumentation.
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      Avec ou sans préparation, chacun est le bienvenu, les cafés philo sont par définition, contre toute forme de discrimination et de sélection par la classe sociale, le niveau scolaire, etc.

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      René Guichardan, café philo d’Annemasse.
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      #6391
      René
      Maître des clés
        Compte rendu du sujet retenu ce 31.10.2022 : Qui décide du calendrier ?

        Proposition d’une question : Qui décide du calendrier ?
        Le sujet hier aurait pu être formulé autrement : à partir de quoi les choses commencent ? Ou qui écrit l’histoire ? Qu’est-ce qui est à l’origine des choses ? Qui détermine le début d’une chose, d’un événement ? Qu’est-ce qui fait dates (Patrick Boucheron, voir ici) ?
        Pour prendre une métaphore : l’enfant commence-t-il dans l’invisible attente des futurs parents, lors de la fusion de l’ovule et du spermatozoïde, au moment de sa naissance ?
        Finalement, nous sommes arrivés à la question : Toute réponse produite dans l’urgence, en ce qu’elle relève d’une réaction, signe-t-elle l’échec de la « démocratie » ?

        Un commentaire par rapport à la recherche de la question à poser.
        Lorsqu’une question est posée, le premier tour de table consiste souvent à comprendre les enjeux que le participant cherche à souligner. Sa pensée part du « calendrier », une date qui fait histoire en tant que chronologie, puis remonte aux raisons qui en expliquent l’événement. Le long de cette pensée, d’autres événements précédant le premier sont mis en perspective, l’ensemble se prête à une diversité d’interprétations qui tissent une histoire, l’une d’elle fera date. Par la suite, l’événement qui fait date (une guerre, une révolution, une religion, une nouvelle technologie, la naissance d’une théorie, etc) s’appréhende sous différents angles selon les auteurs qui se l’approprient. Sur un autre plan, en fonction des disciplines par lesquelles les événements sont lus : l’économie, l’Histoire, la philosophie, de l’anthropologie, une sagesse traditionnelle, etc., ce sont d’autres regards qui éclairent l’événement en question.

        Des exemples contemporains ont été évoqués pour illustrer notre propos, comme celui de la guerre russo-ukrainienne. La version officielle (gouvernement et médias) la fait démarrer en février 2022 (agression Russe), d’un autre côté, des voix critiques (minoritaires) évoquent la révolution Maïdan en 2014 (coup d’État), d’autres analystes inscrivent cette instabilité internationale dans les coulisses de la révolution Orange en 2004 (contestation des élections, manipulation inter-étatiques). Or, on ne raconte pas du tout la même histoire suivant le point de recul adopté. Le récit qui fait date conditionne la réponse politique, à moins que ce soit l’inverse : le politique conditionne l’événement-date à la réponse qu’il veut donner ? Ce qui correspond à une inversion de sens des choses (dont nous n’en discuterons pas les raisons ce soir).

        Dans tous les cas, de nos jours, le politique semble surpris et réagit dans l’urgence d’une réponse qui se veut immédiate, radicale, comme si l’événement tombait du ciel, comme s’il était sans cause, sans profondeur, sans antécédents. Par cette agression de la Russie, il y a une transgression, d’un interdit qu’il faut absolument anéantir, punir et stopper net pour n’inspirer personne d’en suivre l’exemple. De fait, avec la question du calendrier, il y a cette impression d’urgence catastrophique et, en sourdine, la remise en cause des principes de la démocratie. En effet, la démocratie peut-elle penser l’urgence et dans l’urgence ? La question sous-entend disqualifier la démocratie comme procédure d’un mode de décision et, avec elle, un modèle de société qu’il convient de remettre entre les mains d’une élite dirigeante. D’un point de vue général, la démocratie est perçue comme exigeante en temps, en délibération, elle donne lieu à des débats interminables et finalement, à des réponses jamais satisfaisantes. Du point de vue des élites « dirigeantes », la démocratie s’est progressivement dépréciée et se résume à des populations grognes, menaçantes, incapables de penser autrement que par des soulèvements et la violence urbaine. Ce qui se dessine à gros traits ici, c’est le portrait de la société telle que nos échanges en rendent compte ce soir. Il y a d’un côté des élites dirigeantes, des gens éduqués, certes autoritaires, mais instruits et de l’autre côté, une population abêtie, susceptible d’être dangereuse et qu’il faut plier aux ordres. Entre les deux, il y a une grande masse silencieuse, et dont on ne sait ce qu’elle pense vraiment.
        D’autres questions corrélées sont posées : Sont-ce les aspects institutionnels de la démocratie qu’il faut questionner, la manière de structurer les contre-pouvoirs civils qu’il faut repenser ou le comportement des citoyens qu’il faut accabler ?

        Une problématique retenue pour le résumé ce soir :
        Quelle responsabilité le citoyen porte-t-il dans sa manière de contribuer à la démocratie, notamment en véhiculant le discours ambiant diffusé par les médias, ces porte-paroles des lobbys et du gouvernement ?
        Nous sommes conscients que la question comporte plusieurs thématiques : la raison citoyenne, les médias, les lobbys et le gouvernement, nous n’ignorons pas non plus que l’ensemble est étroitement interrelié. Par la magie des écrans, cet ensemble est quasiment inséparable des Gafam et de la centralisation structurelle des médias (AFP, Reuter et AP, ce sont des agences privées, elles rassemblent la majorité des informations du monde, qu’elles vendent aux médias. Voir notre forum ici). . Aussi, dans ce café philo, apprenons-nous à penser à des situations qui se présentent avec une certaine complexité, en raison de l’interdépendance des éléments qui se trouvent impliqués.
        Enfin, nous observons que la question comprendre une charge accusatrice énorme : les médias présentés comme porte-parole des lobbys et du gouvernement. Mais ce n’est pas de ce problème, que nous traiterons ce soir. (SVP, voir note en bas de message)

        Prenons l’un des exemples évoqué durant notre débat : les anti-bassines.
        Un ministre les qualifie d’éco-terroristes, il lance contre eux les CRS. Les médias filent le récit en opposant ces supposés « écofascistes» à l’agriculture industrielle (lobbyiste), laquelle, certes, pollue nos terres, mais reste indispensable pour nourrir une planète surpeuplée (voir ici, notre planète est-elle surpeuplée ? Emmanuel Pont)

        De fait, tous les problèmes de notre société sont alimentés par ce genre de récits simplistes, caricaturaux, quasi apocalyptiques et manichéens, les bons sont d’un côté, les méchants de l’autre dans un monde qui, finalement, ne nous laisse pas le choix. Une bonne part des citoyens reste sans voix, désemparés face à des injonctions contradictoires, si bien qu’une partie de la population incline à penser que le problème est trop complexe, sinon insoluble. Une partie semble également se convaincre des « vertus » du gouvernement, il fait de son mieux, ses intérêts sont aussi les nôtres, le désordre qui menace ne lui laisse pas d’autres alternatives : une révolution serait pire.
        Du descriptif qui précède, des chroniqueurs justifient que le gouvernement s’entoure d’experts et de cabinets privés qui supplantent la lourdeur des instances de veille, des administrations et avec elles, les fonctionnaires et le service public. Le glissement autoritaire des démocraties s’explique ainsi par la faillibilité de ce mode de gouvernance et par l’incivilité de populations immatures, non-instruites et frustrées par nature (Voir Gustave le Bon : La psychologie des foules ou encore, Edward Bernays, Comment manipuler l’opinion. )

        Dans un monde contraint, quel choix avons-nous ?
        À partir de ce tour d’horizon, la question étant mise en contexte, de quelle responsabilité le citoyen peut-il se porter garant, compte tenu de la nasse informationnelle qui l’environne de toute part ? La réponse, elle aussi, semble donnée d’avance : il n’a pas de choix. Ainsi, les populations n’ont pas le choix pour les raisons que le gouvernement leur prête, tandis que le gouvernement n’a pas le choix, pour les raisons que les populations prêtent au gouvernement, celle d’être perçue comme une foule susceptible d’être dangereuse, si elle n’est pas matée. Toutefois, dans ce jeu de miroir suréaliste, quatre grandes possibilités d’adaptation se dégagent pour le citoyen :
        1° le retour sur soi (sur les questions existentielles)
        2° la possibilité de s’informer autrement que par les médias mainstream,
        3° l’idée de faire sécession, d’occuper des ZAD, de rejoindre un éco-village, de s’inscrire dans des modes de résistance à la société comme elle va,
        4° de croire en son gouvernement, puisqu’il n’est pas raisonnable de penser qu’il aille contre les intérêts de son pays. Il est le plus grand garant de la sécurité pour tous (y compris s’il nous envoie à la guerre ? La question a été soulevée par l’un des participants).
        5° Un autre point vu, celui à partir du gouvernement, ce qui pourrait lui arriver ? On pourrait imaginer qu’il se trouve soudainement animé d’une sagesse (ou alors de scrupules) et d’un besoin urgent de se réformer. Nous verrions alors ce gouvernement et les contre-pouvoirs institutionnels (Parlement, Sénat, Conseil d’Etat, Cour institutionnelle) s’organiser de telle sorte à ne plus être tenté par la corruption dans leurs prises de décision. Par exemple, ils rendraient public la gestion des affaires, les critères de prises de décision, le suivi de leurs effets et la mesure de leurs conséquences. Serait rendu public les liens avec les lobbys, leur niveau de compétence pour prendre une décision et leur niveau d’acquisition de richesse au fur et à mesure du déroulement de leur mandat. Ils rendraient public tout ce qui ressort de la décision publique de sorte à ne pas être tenté par une captation de richesse privée que le conflit d’intérêts cache si bien, lorsqu’il s’effectue à l’abri des regards. Concrètement, les universités, les associations civiles et de défense des consommateurs, tout citoyen pourraient avoir accès aux informations et aux décisions que le politique prend au nom du citoyen et en vue de son intérêt. Peut-on s’attendre à moins dans une démocratie ?

        Dans tous les cas, quelle que soit l’option retenue, les réponses s’exercent à l’aune d’une « capacité critique », dont on espère (un peu de publicité pour les cafés philo) que nos débats, dans le principe même de leur gestion-modération, y contribuent (par le questionnement partagé des présupposés de nos pensées, avec toute personne qui le souhaite). Certes, la contribution « café philo » se limite à un rayon d’action locale et avec la poignée des participants qui le fréquentent.  Sur un plan national et international, nous savons qu’il existe une communauté de cafés philo et des recherches universitaires sur la diversité des pratiques d’animation qui y sont mises en oeuvre. De fait, en dépit de l’autoritarisme des gouvernements et de la médiocrité des médias, des pratiques démocratiques ouvertes, spontannées s’inventent un peu partout, ici ou là. Des démocraties informelles naissent là ou la plus « formelle », la plus instituée se crispe et montre ses limites. B)

        Un commentaire par rapport à ce débat :

        La question se cherche et nous ne parvenons pas toujours, lorsque nous partons d’une proposition lancée à la volée, à la stabiliser pour remonter dans les concepts. Il s’avère néanmoins que parvenir à circonscrire la manière dont se pose un problème constitue une démarche importante dans l’enquête philosophique et, par conséquent, dans la formation d’une capacité critique. Il s’agit d’entendre une inquiétude qui s’exprime, de formuler un problème qui se pose, de délimiter des enjeux, de souligner les contradictions qu’ils soulèvent, avant de parvenir à prédéfinir des enjeux philosophiques (éthique, esthétique, scientifique, sociétaux, politique) que l’on peut mettre au centre de nos débats. Mais une capacité critique, si l’on ne souhaite pas qu’elle demeure un exercice de pure abstraction, suppose que l’on soit informé de sorte à la confronter à des faits. Il importe que la pratique d’une « capacité critique » corresponde à la teneur de nos informations du moment, quitte à prendre acte de nos insuffisances dans le cours de notre échange.
        Parfois, un débat permet simplement de prendre la mesure d’une diversité d’informations réunies autour d’une table, à soutenir la dissonance cognitive avec des informations qui nous viennent d’ailleurs, d’un autre champ de connaissance, voire d’une autre culture. De là, et de retour chez soi, il nous faut apprendre à combler nos manques en suivant des cours, en allant à des conférences, en reprenant des lectures, bref, en cherchant à nous ouvrir toujours davantage. Le café philo est un lieu de pratique sociale et une mise à l’épreuve (bienveillante) et qui se veut structurante, de ce que nous croyons savoir.

        Une conclusion
        Pour ce soir, si les participants présents déplorent l’absence de démocratie et la médiocrité des médias, il y a l’idée que la multitude des médias « indépendants », des auteurs, des scientifiques qui se trouvent ostracisés par la sphère des médias mainstreams, témoignent en réalité d’un haut niveau de compétences laissé en jachère. Pour filer la métaphore agricole, l’humus qui fermente dans le souterrain de la société témoigne d’un renouveau démocratique possible, d’une base d’où écloront des potentialités. Aucune société ne nait ou ne renaît de rien, sa capacité à se renouveler est probablement d’autant plus grande que sa base est élargie, et qu’elle s’invite à contribuer aux débats publics avec méthode et avec philosophie.
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        Note par rapport à la question : les médias présentés comme porte-parole des lobbys et du gouvernement.
        Notre forum (voir ici) donne de nombreux éléments qui établissent que les médias n’ont plus aucune neutralité par rapport aux contenus qu’ils diffusent. C’est une question que nous avons également traité dans l’un de nos sujets philo : Philosopher à partir d’une appréhension discordantes des faits(Cliquer ici)

        Enfin, la captation des médias (+ Gafam) par le capitalisme financier (qui n’est pas celui de l’économie réelle) explique la citation que nous laissons en exergue dans notre newsletter (ici)

        Au cas où, une information sur : les méga bassines traitée par Blast Info le 05.11.2022. (Cliquer ici) un média indépendant (sans subvention du gouvernement et non détenu par un groupe financier.
        – De quoi les « ecoterroristes »sont-ils le noms ? L’analyse de Blast Info, Paloma Moritz. Cliquer ici
        – Une victoire contre un projet de bassine géante à la Clusaz par le Canard Réfractaire (novembre 2022. Voir ici.)
        – Dans le fil de ce forum, des analyses de nos médias par Julia Cagé, Aude Lancelin, Anne Cécile Robert, Salamé Saqué, Blast Info, etc. Cliquer ici.

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        René Guichardan, café philo d’Annemasse.
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