Cafephilos Forums Les cafés philo Les sujets du café philo d’Annemasse Tout ce qui est légal, est-il nécessairement juste ? Sujet pour lundi 13.02.2017 (+ une pétition pour la transparence en démocratie)

5 sujets de 1 à 5 (sur un total de 5)
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    Messages
  • #5448
    René
    Maître des clés
      Tout ce qui est légal, est-il nécessairement juste ?

      Les cafés philo ont en partie pour but de questionner les pratiques, les idées, les discours qui ont cous dans la société. Chacun ensuite éclaire le débat en, par exemple, soulignant une contradiction, en apportant des éléments de connaissance, en suggérant une hypothèse… D’une certaine manière, lors de nos débats, on se fait les acteurs et les témoins d’une pensée qui se construit sur un mode coopératif. Il s’agit autant d’exercer notre lucidité que d’élargir le champ (chant) des interprétations possibles.
       
      Pour notre prochain débat, questionnons la proposition de l’un des candidats à la présidentielle : « Je n’ai rien à me reprocher, j’ai respecté la loi ». Chacun aura reconnu son auteur : François Fillon.
      Demandons-nous à l’issu de cette « justification » si tout ce qui est légal, est-il nécessairement juste ? 

      C’est un sujet classique pour les classes de terminal, et je suis certain que nous saurons le développer en sortant du cas d’exemple affligeant pour ce « leader » politique et pour son parti. Attachons-nous au problème de fond, au rapport qui existe entre ce qui relève du droit d’une part, et de l’éthique d’autre part.

      Citations

       «  On peut être injuste de deux manières, ou par violence ou par ruse ; la ruse est l’affaire du renard, la violence celle du lion, l’une et l’autre sont tout ce qu’il y a de plus étranger à l’homme, mais la ruse est la plus détestable des deux. Dans tout le champ des actes injustes, nul n’est plus coupable que ceux des hommes qui agissent de manière à paraître honnêtes au moment où ils vous dupent le plus ».
      Traité des devoirs. I, XIII. Machiavel. 1449 – 1527.

      – « La morale n’est pas à proprement parler la doctrine qui nous enseigne comment nous devons nous rendre heureux, mais comment nous devons nous rendre dignes du bonheur. 
      Fondement de la métaphysique des moeurs. Kant (1724 – 1804)

      « Jamais en aucun cas je ne consentirai à juger convenable pour un de mes semblables, quel qu’il soit, ce que je juge moralement intolérable pour moi-même. »
      La Condition ouvrière. Simone Weil – 1909-1943.

      – « Il n’y a pas de doute qu’on pèche contre la loi si, en s’attachant à sa lettre, on contredit la volonté du législateur ».
      Somme théologique. » Thomas d’Aquin. 1225 -1274

      – « La justice sans la force est impuissante ; la force sans la justice est tyrannique [… ]Et ainsi, ne pouvant faire que ce qui est juste fût fort, on a fait que ce qui est fort fût juste. »
      Fragment Raisons des effets. Pascal Blaise. 1623 – 1662

      – « Quel est le défaut inhérent au patriotisme ? C’est que, en préférant une partie de l’humanité au reste, le citoyen transgresse le principe fondamental de la morale, celui de l’universalité : sans le dire ouvertement, il admet que les hommes ne sont pas égaux. […] la vraie morale, la vraie justice, la vraie vertu présupposent l’universalité, et donc l’égalité des droits.
      Nous et les autres. » Tzvetan Todorov. 1739 -2017

      Quelques sources
      Pourquoi le légal n’est-il pas toujours juste ? Simone Manon (professeur de philosophie) dans philolog
      Une fiche pdf : la justice et le droit.
      Comment concevoir les rapports entre justice et droit. Simone Manon (professeur de philosophie) dans philolog
      La morale chez Nietzsche. philo.com
      Un cours sur la Justice. Maphilo.
      Du rapport entre le pouvoir et l’argent. Une vidéo (5mn) de Samuel Bendahan, chercheur en économie comportementale. Samuel Bendahan révèle par le biais d’une expérience que, plus on dispose de pouvoir, moins on est attentif à autrui, et plus on se moque des règles sociales, du bien commun, de la dignité des autres.
      – La chronique de Xavier de la Porte : qu’est-ce qu’un bon chef ? Ou comment le pouvoir rend-il stupide ?

      Ressources France Culture
      Les inégalités mettent-elles en péril la démocratie ? Les rencontres de Pétrarque.
      Faut-il désobéir à la loi pour être un bon citoyen ? Du grain à moudre.
      Jusqu’où peut-on supporter les inégalités ? Du grain à moudre.
      – Les grands défis du droit en France. Esprit de justice.
      Le relativisme moral. L’essai du jour.

      #5449
      Lecoeur
      Participant

        Personne ne respecte les lois essentielles:

        La fabrication d’une existence ne sert que ceux qui existent déjà.
        Personne ne maitrise cette fabrication faite à l’aveugle.
        La mise en danger de la vie d’autrui est un délit.
        Les femmes risquent leur vie à engendrer (Plus de 800 mortes par jour) ainsi que de nombreuses pathologies (une femme sur sept).
        Les enfants fabriqués passent de l’état de non-existence à celui d’existants ce qui est un risque infini.
        La mise en danger de la vie d’autrui conduisant à la souffrance et la mort est un crime, donc faire un enfant est un crime.
        Le nombre d’enfants naissant handicapés quotidiennement est faramineux.
        L’esclavage est un crime imprescriptible, or faire un enfant c’est le faire pour servir ceux qui existent.
        Acheter son corps est de l’esclavage, et c’est ce que nous faisons tous quotidiennement.
        Nous sommes tous impliqués dans la société sans l’avoir demandé.
        Le chantage social (justice, prison, etc.) s’exerce sur nous dès notre naissance (Quel accueil!).
        Etc.

        Conclusion: puisque tout le monde se permet de fabriquer des existences alors que la Loi et les Droits l’interdisent, et toute cette prise de risque sur nos dos innocents pour nous faire subir les avanies de ce monde délicieux, pourquoi Fillon devrait-il faire passer la morale avant la Loi?

        #5450
        René
        Maître des clés

          Bonjour,

          Je me permets de répondre à chacune de vos propositions.

          Personne ne respecte les lois essentielles

          > Voulez-vous parler des textes de loi, ou de lois d’un autre ordre, et que vous estimeriez être essentielles ?

          La fabrication d’une existence ne sert que ceux qui existent déjà.

          > Voulez-vous dire qu’elle (l’existence) pourrait servir à des êtres qui n’existent pas ?
          > Sinon, il me semble que des êtres existent et qu’ils aident également d’autres êtres (des inconnus) à exister.

          Personne ne maitrise cette fabrication faite à l’aveugle.

          > Si vous parlez de la procréation, il me semble que deux cas de figures se présentent :
          1° Ceux/celles qui choisissent d’avoir des enfants
          2° Ceux/celles qui les ont par accident.
          > Et parmi ces deux options, ceux/celles qui se grandissent avec les choix qu’ils font (ils augmentent le bonheur apporté au monde), et ceux/celles qui évacuent sur les autres les malheurs/frustrations qu’ils endurent.

          La mise en danger de la vie d’autrui est un délit.

          > Oui, vous avez raison. C’est répréhensible par la loi.

          Les femmes risquent leur vie à engendrer (Plus de 800 mortes par jour) ainsi que de nombreuses pathologies (une femme sur sept).

          > Oui, selon le niveau d’hygiène des pays, le nombre de femmes qui meurent en couchent est plus ou moins élevé. On peut se référer aux publications de l’OMS sur les taux de mortalité des femmes en couche.

          Les enfants fabriqués passent de l’état de non-existence à celui d’existants ce qui est un risque infini.

          > Je ne suis pas certain que la comparaison soit valable car on ne peut comparer que des choses qui partagent des valeurs comparables. Donc, « ne pas exister » ne peut être comparé à « exister » car, « ne pas exister » relève d’une pure abstraction, tandis que « exister » s’éprouve ici bas.
          Acceptons néanmoins votre argument: si le fait d’exister comporte des risques infinis (je suis d’accord), il existe alors des chances de transformer sa vie ici bas, et celles des autres. Autrement dit, il y a des risques, mais le pire n’est pas certain.

          La mise en danger de la vie d’autrui conduisant à la souffrance et la mort est un crime, donc faire un enfant est un crime.

          > Même argument que précédemment : mettre en danger d’une part et, d’autre part, donner la vie ne peuvent se situer sur le même ordre de valeur, même si l’un (donner la vie) entraîne, à terme, une mort. Entre la vie et la mort il se passe trop de choses pour accuser la vie d’être cause de mort. On peut en fait concevoir que la création de la vie est cause d’une régénération infinie de la vie. La mort, à ce niveau, n’étant qu’une vue de l’esprit : « Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme » disait Lavoisier.

          Le nombre d’enfants naissant handicapés quotidiennement est faramineux.

          > Oui, malheureusement. La qualité du planning familial, des instituions médicales, la formation des médecins, … doivent permettre d’en faire baisser le nombre.

          L’esclavage est un crime imprescriptible, or faire un enfant c’est le faire pour servir ceux qui existent.

          > J’ai constaté de mon côté qu’il y avait des parents aimants (ou des substituts de parents aimants), et des parents trop préoccupés pour être aimants. Les parents aimants satisfont aux besoins d’épanouissement de leurs enfants. Ce faisant, ils servent beaucoup plus que leurs enfants : ils apportent des sourires à l’humanité. Les enfants, quand leurs tours viendra, seront sensibles au fait de contribuer à un monde meilleur.

          Acheter son corps est de l’esclavage, et c’est ce que nous faisons tous quotidiennement.

          > Je n’ai pas le sentiment d’acheter mon corps.

          Nous sommes tous impliqués dans la société sans l’avoir demandé.

          > Oui, je suis d’accord. On choisit cependant un degré d’implication (de pas beaucoup à 150% ) et une posture : responsable-volontaire et positif, ou non impliqué, subissant et négatif.

          Le chantage social (justice, prison, etc.) s’exerce sur nous dès notre naissance (Quel accueil!).

          > « Choisis ton camp camarade ! » nous disait Coluche 🙂

          Conclusion: puisque tout le monde se permet de fabriquer des existences alors que la Loi et les Droits l’interdisent, et toute cette prise de risque sur nos dos innocents pour nous faire subir les avanies de ce monde délicieux, pourquoi Fillon devrait-il faire passer la morale avant la Loi?

          > Il n’est pas impossible en effet que Fillon pense de cette manière. C’est peut-être une sorte de cynique invétéré qui s’ignore, ou une sorte de mythomane qui, se mentant à lui-même, croit convaincre le monde entier de sa raison.

          Ps : Avez-vous consulté des liens que j’ai postés dans mon introduction ?

          #5451
          René
          Maître des clés

            Une fois n’est pas coutume, j’ai lancé une pétition pour la transparence en démocratie. J’inviterai les candidats à la présidentielle à la signer, ou à réagir. Et vous, signeriez-vous cette petition afin que les actions politiques et les dépenses de l’argent public soient effectuées avec la transparence que nous sommes en droit d’attendre de nos élus ? Merci de faire suivre, et de faire entendre votre voix.

            Cliquer ici, si l’image ci-dessous n’est pas nette. Merci.

            La transparence en démocratie.
            Ne confions pas le pouvoir aux politiciens sans nous donner la possibilité de les contrôler.

            La transparence se conçoit sur trois niveaux :

            1° Les moyens financiers.
            > Toute dépense d’argent public doit faire l’objet d’une facture dûment conservée.

            2° La méthode de prise de décision.
            > Aujourd’hui, dans un monde de connaissance accessibles, il n’est plus possible de prendre une décision :

            – sans avoir fait un état des lieux de la situation,

            – sans s’être informé auprès des personnes directement concernées,

            – sans avoir consulté des chercheurs, des comités d’experts et d’éthique venant d’horizons différents,

            – sans anticiper les conséquences possibles de différentes options,

            – sans s’assurer que l’on prend les meilleures orientations pour le développement de l’être humain et pour son environnement,

            – sans établir de bilan, sans apprendre des erreurs commises, et sans rendre compte des actions mises en oeuvre.

            3° Les résultats attendus.
            – Si la méthode et les moyens utilisés ne conduisent pas au résultat escompté, l’élu doit s’en expliquer devant un comité de citoyens, et devant la presse.
            – La justice, s’il y a lieu, instruira l’affaire.

            La démocratie s’inscrit dans un projet historique long, elle doit encore évoluer, ne laissons pas les politiciens suffisants et sans scrupule la gâcher.

            Merci de signer cette pétition et de la faire suivre, nous la transmettrons aux candidats de la présidentielle.

            Pour information, ici, une vidéo (5mn) de Samuel Bendahan (chercheur en économie comportementale), il explique que plus on a de pouvoir, moins on est attentif à autrui. On commence à se moquer des règles sociales, du bien commun, de la dignité des autres. On se laisse corrompre. Ne laissons pas les politiciens se corrompre.

            #5452
            René
            Maître des clés

              Critiques et réponses aux propositions de la pétition :


              Critique : Les factures, vraies ou fausses, sont déjà conservées.
              Réponse : sauf les indemnités, les enveloppes spéciales et bien d’autres encore. Il ne s’agit pas de tout évaluer, mais les factures permettent le suivi des dépenses, de démarrer une étude, voire une enquête judiciaire, s’il le fallait.

              Critique : Entre les chercheurs, l’avis des comités d’éthique et d’experts, l’avis des citoyens concernés, jamais on ne peut atteindre de consensus.
              Réponse : Cela est souvent vrai, car la réalité est complexe. Mais en raison même de cette complexité, nous ne devons plus être aveuglés, mais précisément informés des grands enjeux mis en tension. La démocratie est un dialogue qui se construit entre plusieurs familles de citoyens. Ce dialogue ne sera riche que s’il s’élabore avec une connaissance, même partielle et vulgarisée, de la complexité des enjeux sociaux et environnementaux qui se pose.

              Critique : On ne peut pas prévoir toutes les conséquences possibles.
              Réponse : Exacte. Il ne s’agit pas d’anticiper toutes les conséquences possibles et leurs effets secondaires sur plusieurs générations. Néanmoins, l’essentiel parmi une poignée d’options majeures, sélectionnées en fonction des connaissances du moment, doit être pris en compte. Il s’agit de se donner les capacités de réagir, de corriger le tir s’il le fallait.

              Fondamentalement, notre démocratie est mise en danger par le simplisme des points de vue des élus qui se croient au-dessus des lois, de la morale, et des conséquences que nous aurons tous à payer des décisions qui ont été prises. Les élus agissent comme s’ils ignoraient que la démocratie s’entrevoit sur le long terme, et qu’elle se construit à chaque instant dans un dialogue informé avec les citoyens.

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