Cafephilos Forums Les cafés philo Les sujets du café philo d’Annemasse Faut-il porter en soi un chaos pour faire naître une étoile ? Nietzsche. Sujet du 18.11.2019 + un compte-rendu

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  • #5816
    René
    Maître des clés
      Une citation de Nietzsche pour amorcer notre débat
      « Je vous le dis : il faut porter encore en soi un chaos, pour pouvoir mettre au monde une étoile dansante. Je vous le dis : vous portez en vous un chaos. »
      Ainsi parlait Zarathoustra. Le prologue de Zarathoustra. §5. Nietzsche (1844 – 1900)

      Proposition pour notre débat :
      Questionnons la citation : faut-il porter un chaos en soi pour mettre au monde une étoile dansante ?
      – Si oui, quelles sont les conditions pour transformer le chaos en soi en étoile ?

      Tempo de notre échange :
      – Tour de table informel sur la façon dont on reçoit la proposition de Nietzsche, éventuellement formulée sous forme de question ou d’une brève intervention.
      > Après un récapitulatif des questions, on essaye de construire un débat autour des questions qui semblent retenir notre intérêt ou/et soulever les enjeux les plus remarquables (enjeux éthiques, psycho/philosophiques ou sociétaux)

      Modalité des interventions
      – On privilégie les interventions courtes pour permettre à la parole de circuler.
      – On essaie de situer son propos dans le débat (en réponse à ce qui se dit, à la thématique, à des enjeux qui se posent, etc.)
      – On distingue dans ses interventions : les exemples et l’argumentation (la thèse, la leçon, l’hypothèse, la généralisation) qu’on en retire.
      – On essaie de situer son argumentation, souligne-t-elle les liens avec l’évolution du débat ? L’enrichit-elle ? Témoigne-t-elle d’une expérience personnelle qui ouvre sur des impensés ? Rend-elle compte de connaissances ou d’informations qui permettent d’élargir la compréhension du problème ? Permet-elle de souligner des liens avec des problématiques plus grandes ? Permet-elle d’approfondir un aspect du problème, souligne-t-elle des contrastes avec ce qui s’est dit jusqu’à présent, etc..
      – On note (si possible) la forme argumentative de son intervention, est-ce un contre-exemple, un fait (social, historique ou anthropologique), souligne-t-on un paradoxe, opère-t-on une reformulation, une généralisation (abusive ou adéquate), une comparaison équivalente ou pas ? Formule-t-on une opinion colportée, une théorie savante, un témoignage personnel (qu’on limite dans la mesure du possible – sauf pour en permettre le questionnement, une prise de recul avec soi-même). Distinguons-nous le préjugé, les implicites, les présupposés, les causes des conséquences ? Sommes-nous avertis des biais cognitifs, de l’idéologie sous-jacente qui se trame dans nos propos ? Etc.

      En bref, c’est le retour sur ses pensées par le truchement de nos échanges qui nourrit notre capacité réflexive, c’est-à-dire, la capacité que l’on se donne d’examiner sa propre pensée. Bienvenue à tous.

      Ressources
      Quatre malentendus nietzschéens. Une série de 4 émissions à partir de 4 citations de Nietzsche. Les chemins de la philosophie. France Culture.
      Extrait lu du prologue de « Ainsi parlait Zarathoustra ».
      Une explication/initiation à la pensée de Nietzsche par Charle Robin (pédagogue).
      Interview à lire d’Alexandre Jolien : Le chaos et l’étoile qui danse. Article PDF de Quart Monde.
      Nietzsche et le mal : du chaos à l’étoile dansante. Article de Janine Filloux (psychanalyste). Cairn info.
      Audiobook : Ainsi parlait Zarathoustra – Friedrich Nietzsche. Lu par Michael Lonsdale.
      Ainsi parlait Zarathoustra. Friedrich Nietzsche. La traduction d’Henri Albert (1903) sur Wiki.

      Quelques citations de Nietzsche :
      – Et ceux qui dansaient furent considérés comme fous par ceux qui ne pouvaient entendre la musique.
      – Quand on lutte contre des monstres, il faut prendre garde de ne pas devenir monstre soi-même. Si tu plonges longuement ton regard dans l’abîme, l’abîme finit par ancrer son regard en toi.
      – Deviens ce que tu es. Fais ce que toi seul peut faire.
      – Jadis, vous étiez des singes et aujourd’hui encore, l’homme est encore plus singe que n’importe quel singe.
      – l’un va chez le prochain parce qu’il se cherche, l’autre parce qu’il voudrait s’oublier. Votre mauvais amour de vous-mêmes fait de votre solitude une prison.
      – Il faut savoir se perdre pour un temps si l’on veut apprendre quelque chose des êtres que nous ne sommes pas nous-mêmes.

      #5817
      René
      Maître des clés
        Un bref compte-rendu de quelques éléments du débat

        Ambiance
        Nous étions une trentaine de personnes, dont 5 nouveaux participants. 4 d’entre eux ont pris la parole.
        On peut dire que les participants ont joué le jeu du débat participatif/contributif en ce sens que chacun a apporté sa réflexion en prenant en compte ce qui a été déjà dit, ou en soulignant des impasses, des contradictions, tout en proposant un regard qui se voulait complémentaire. En bref, des éléments nouveaux égrénaient l’évolution du débat et l’enrichissaient.

        Rappel de la question :
        Nous réagissons et questionons la citation de Nietzsche :
        « Je vous le dis : il faut porter encore en soi un chaos, pour pouvoir mettre au monde une étoile dansante. Je vous le dis : vous portez en vous un chaos. »
        > Faut-il porter un chaos en soi pour mettre au monde une étoile dansante ?

        Les interventions du premier tour de table
        – Nietzsche accuse-t-il les gens de porter en eux un chaos ?
        – Le chaos est-il une rupture de soi d’avec le monde (de même que les étoiles ne sont plus en contact avec le monde) ?
        – Faut-il que le chaos soit toujours présent à soi-même pour qu’en naisse une étoile ?
        – Le chaos est-il nécessaire à la naissance de l’étoile dansante en soi ?
        – Peut-on toujours naître de son chaos ?
        – Le chaos permet-il une tranformation de soi, une naissance à soi-même ?
        – Qu’est-ce que le chaos en soi ?
        – Comment le chaos se présente-il à notre conscience ?
        – Nietzsche est-il pessimiste ou optimiste ?
        – De quelle manière l’étoile que l’on perçoit ne constitue pas une illusion ?
        – Cette étoile, est-elle au contraire une espérance, la lumière nécessaire à la mise en marche de soi ?
        – Quel rapport entre ce chaos et l’idée du dernier homme dont parle Nietzsche dans la suite de l’extrait ?

        L’extrait dans son contexte (version wiki) :
        Et ainsi Zarathoustra se mit à parler au peuple :
        Il est temps que l’homme se fixe à lui-même son but. Il est temps que l’homme plante le germe de sa plus haute espérance.
        Maintenant son sol est encore assez riche. Mais ce sol un jour sera pauvre et stérile et aucun grand arbre ne pourra plus y croître.
        Malheur ! Les temps sont proches où l’homme ne jettera plus par-dessus les hommes la flèche de son désir, où les cordes de son arc ne sauront plus vibrer !
        Je vous le dis : il faut porter encore en soi un chaos, pour pouvoir mettre au monde une étoile dansante. Je vous le dis : vous portez en vous un chaos.
        Malheur ! Les temps sont proches où l’homme ne mettra plus d’étoile au monde. Malheur ! Les temps sont proches du plus méprisable des hommes, qui ne sait plus se mépriser lui-même.
        Voici ! Je vous montre le dernier homme.
        « Amour ? Création ? Désir ? Étoile ? Qu’est cela ? » — Ainsi demande le dernier homme et il cligne de l’œil.
        La terre sera alors devenue plus petite, et sur elle sautillera le dernier homme, qui rapetisse tout. Sa race est indestructible comme celle du puceron ; le dernier homme vit le plus longtemps.

        Une ou deux situations-problèmes ou problématiques évoquées
        – A rester contamment dans le doute, le questionnement, peut-on vraiment trouver une voie ? Peut-on se perdre en étant à l’écoute de son chaos ? Ne faut-il pas se protéger de son chaos ?
        – L’étoile dansante est une métaphore… De quelle manière prend-elle forme dans l’expérience de chacun ? En quoi cette expérience est-elle un chemin ?
        – La cohérence que l’on construit en soi, est-elle un endormissement ou un cheminement vers la transformation de son propre chaos ?
        – A supposer que l’on chemine vers une transformation de soi, notre façon de cheminer peut-elle être généralisable ? Peut-elle faire leçon pour d’autres personnes ou seulement pour soi ?
        – Si mon cheminement n’éclaire que moi, suis-je enfermé en moi-même ou manque-t-il une étape pour apporter ma contribution à d’autres que moi ? Autrement dit, suffit-il de sortir soi-même de son propre chaos (d’être en dehors de tout danger pour soi) ou faut-il encore, pour parler d’étoile dansante, que notre « lumière » parle également à d’autres êtres humains ?

        Autre question :
        – Qu’a-t-il fallu à Nietzsche pour que la confrontation à son propre chaos le conduise à en faire une oeuvre philosophique, c-à-dire, à être à la fois en contact avec son chaos, tout en parvenant à s’en extraire pour en tirer des concepts, une idée du dépassement de soi et une critique acerbe de la morale sociétale de son époque ? Nietzsche semblait prédire les guerres mondiales qui s’annonçaient par sa lecture du monde, par l’industrialisation massive qui abêtissait les hommes dans le consummérisme, la normativité, le refoulement de leur énergie vitale.

        Sujets corrélés :
        Deviens ce que tu es. (+ schémas et compte-rendu.)
        Une connaissance de soi est-elle possible ? Sujet à partir d’un extrait de texte de Nietzsche.

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