Cafephilos › Forums › Les cafés philo › Les sujets du café philo d’Annemasse › La psychanalyse du feu (Gaston Bachelard) Une idée et un dispositif proposé par Philippe. Sujet du 27.10.2014 + restitution + carte mentale
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15 octobre 2014 à 18h56 #5113La psychanalyse du Feu (Gaston Bachelard)
Une idée et un dispositif présenté par Philippe« Le feu enfermé dans le foyer fut sans doute pour l’homme le premier sujet de rêverie, le symbole du repos. On ne conçoit guère une philosophie du repos sans une rêverie devant les bûches qui flambent. Aussi, d’après nous, manquer à la rêverie devant le feu, c’est perdre l’usage vraiment humain et premier du feu. Sans doute le feu réchauffe et réconforte. Mais on ne prend bien conscience de ce réconfort que dans une assez longue contemplation ; on ne reçoit le bien-être du feu que si l’on met les coudes aux genoux et la tête dans les mains. Cette attitude vient de loin. L’enfant près du feu la prend naturellement. Elle n’est pas pour rien l’attitude du Penseur. Elle détermine une attention très particulière, qui n’a rien de commun avec l’attention du guet ou de l’observation. Elle est très rarement utilisée pour une autre contemplation. Près du feu, il faut s’asseoir ; il faut se reposer sans dormir ; il faut accepter la rêverie objectivement spécifique.
[…] Aux dents de la crémaillère pendait le chaudron noir. La marmite sur trois pieds s’avançait dans la cendre chaude. Soufflant à grosses joues dans le tuyau d’acier, ma grand-mère rallumait les flammes endormies. Tout cuisait à la fois : les pommes de terres pour les cochons, les pommes de terre plus fines pour la famille. Pour moi, un œuf frais cuisait sous la cendre. Le feu ne se mesure pas au sablier : l’œuf était cuit quand une goutte d’eau, souvent une goutte de salive, s’évaporait sur la coquille. […] Les jours de ma gentillesse, on apportait le gaufrier. Il écrasait de son rectangle le feu d’épines, rouge comme le dard des glaïeuls. Et déjà, la gaufre était dans mon tablier, plus chaude aux doigts qu’aux lèvres. Alors oui, je mangeais du feu, je mangeais son or, son odeur et jusqu’à son pétillement tandis que la gaufre brûlante craquait sous mes dents. Et c’est toujours ainsi, par une sorte de plaisir de luxe, comme dessert, que le feu prouve son humanité. Il ne se borne pas à cuire, il croustille. Il dore la galette. Il matérialise la fête des hommes. Aussi haut qu’on puisse remonter, la valeur gastronomique prime la valeur alimentaire et c’est dans la joie et non dans la peine que l’homme a trouvé son esprit. La conquête du superflu donne une excitation spirituelle plus grande que la conquête du nécessaire. L’homme est une création du désir, non pas une création du besoin. »
Gaston BACHELARD, La psychanalyse du feu, pp.33-34Procédure proposée pour ce débat :
1° Lecture du texte ensemble
1° Travail en binôme pour chercher la question centrale du texte
2° Recueil des questions
3° Sélection de la plus « consensuelle »
4° Rédaction individuelle de sa réponse en 5 mn
5° Débat autour des réponses proposées.
6° Conclusion individuelle courte.Durée : 1h20-1h35
Précisions :
– L’animateur prend en charge l’ensemble du dispositif_____________________
Sujet débattu au café philo d’Annemasse B)
Ps. Chaque été, Michel Tozzi organise un séminaire de Rencontres philosophiques où différents dispositifs peuvent être testés et évalués (voir ici).
Merci Philippe pour nous proposer cette animation au café philo d’Annemasse.28 octobre 2014 à 19h30 #5124Les questions rédigées par les pairs ou les triades de participants lors du débat
1 ) Faut-il conquérir le superflu pour atteindre la plénitude ?
2 ) Le feu inspire-t-il la méditation spirituelle ou la méditation charnelle ?
3 ) Le partage en toute amitié ?
4 ) Le désir est-il un besoin ?
5 ) La rêverie est-elle porteuse de désir ou de besoin ?
6 ) En quoi le confort nourricier du feu permet-il de s’élever ?
7 ) En quoi le désir nous humanise-t-il ?
8 ) En quoi un élément (feu, terre, air, eau…) peut-il être un vecteur de culture ?Question retenue pour le débat : En quoi le désir nous humanise-t-il ?
La première réponse : Le désir conduit à la compétition, et donc aux conflits, c’est ce qui fait notre humanité.
Contrepoint :
– Non, on peut désirer se promener en montagne sans se mettre en compétition avec autrui.
– On peut créer des œuvres artistiques, coopérer autour de projets, générer une émulation non conflictuelle avec des partenaires.
– Le désir n’est pas strictement humain, les animaux manifestent des désirs et entrent également en compétition entre eux.
> Donc le désir, la compétition et le conflit ne sont pas spécifiquement humains.A votre tour, n’hésitez pas non plus à poster les réponses que vous aviez rédigées. Merci à vous.
PS. Si vous souhaitez réagir à la méthode d’animation, au dispositif utilisé pour ce débat,
merci de poster votre réponse sur cet autre forum en cliquant ici. B)3 novembre 2014 à 12h37 #5126Le cheminement de quelques penséesAutres questions posées :
– S’humaniser est-ce se mettre en « rupture » avec les comportements des animaux ?
– S’humaniser est-ce cultiver le mythe de notre supériorité par rapport au monde animal ?
– S’humaniser est-ce être meilleur sur le plan de notre éthique ?
– S’humaniser est-ce éprouver des sentiments ?
– S’humaniser est-ce donner du sens à notre vie, et est-ce développer des capacités de penser ?
– S’humaniser est-ce s’instruire, est-ce transmettre des connaissances ?
– S’humaniser est-ce s’inscrire dans une histoire ? Est-ce contribuer à la construction d’une société ?
– Quel lien y-a-t-il entre le désir et s’humaniser ?De la nature animale du désir
– Le désir, dans sa « nature », n’est pas spécifiquement humain, les animaux ont des désirs, et leurs préférences se manifestent clairement quand plusieurs choix se présentent dans leur environnement.
– Le désir n’a pas nécessairement de sens, il est contradictoire, pulsionnel, conquérant, violent souvent. Les occidentaux ont massacré les « sauvages » sous prétexte de les humaniser.
– On ne peut « moraliser » le désir sans se fourvoyer dans une mythologie.Contrepoint : la part humaine du désir
– A mon sens, le désir « humanise » de facto car il est tributaire d’un imaginaire, et ce dernier s’inscrit dans une histoire personnelle, une complexité relationnelle et une culture.
– Humaniser le désir, c’est donner un sens à un élan qui permet la rencontre avec autrui.
– La complexité avec laquelle les êtres humains entrent en négociation pour collaborer, pour s’entendre autour de projets, les conduisent à engager leur parole, à établir des contrats, à élaborer des Constitutions. La valeur de fond de ces ententes est une éthique dans laquelle les contractants se reconnaissent. Cette éthique n’est pas nécessairement un mythe, mais l’établissement de principes qui permettent la construction d’une reconnaissance réciproque.Le désir est « frustration »
– Le désir « humain » est le résultat d’un manque, et fondamentalement nos manques sont insatiables : lorsque nos désirs ne sont pas satisfaits, on se sent frustré, et lorsque nous les réalisons, nous n’en avons jamais assez, ou nous devenons blasés.
– Le questionnement qui surgit à la suite de nos insatisfactions ne nous conduit-il pas vers une humanité plus réflexive, vers des projets moins matériels, vers des réalisations plus artistiques, et éventuellement vers une plus grande éthique ?
– Le questionnement soutenu sur la raison de nos désirs et de nos frustrations ne nous invite-t-il pas à une transcendance, à des formes de dépassement de soi ?
– S’humaniser, est-ce se transcender ?Une déclaration :
– Pour moi les humains sont déshumanisés, ils avilissent tout. Les animaux, eux, se comportement d’une façon plus éthique que les êtres humains.
Une problématique
– Le désir de manger du chocolat part-il du même principe que le désir de comprendre l’univers ? Pour ma part, il y a dans l’essence du désir une démarche d’exploration. Cette démarche d’exploration est induite par la vie elle-même : la diversité des espèces sur terre en témoigne, de même que chaque individu au sein de son espèce. Les biologistes reconnaissent aujourd’hui des capacités d’adaptation et une « curiosité » propres à chaque individu.
– L’homme ne se distingue des autres espèces vivantes que par un niveau de compétence plus élevé, il peut en cela devenir meilleur ou pire que les animaux.
– Le propre de l’homme dépasse finalement sa nature strictement biologique : les hommes écrivent leur histoire, les rites, les règles et les constitutions qui les rassemblent en société, ils définissent une histoire dont ils écrivent le sens et l’éthique a priori, ou a posteriori.Ps : Les problèmatiques traitées dans ce débat ne représentent pas les idées de Gaston Bachelard.
3 novembre 2014 à 13h16 #5129Carte mentale de quelques problématiques évoquées lors de notre échange
Si l’image n’est pas nette, cliquez sur le lien dans « Fichier Attaché » ci-dessous. Merci de votre compréhension B)
CartementaleQuestcequihumaniseletrehumainbachelard.pdf3 novembre 2014 à 14h59 #5130Carte mentale de quelques problématiques évoquées lors de notre échange
Si l’image n’est pas nette, cliquez sur le lien dans Fichier Attaché ci-dessous. Merci de votre compréhension -
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