Cafephilos › Forums › Les cafés philo › Les sujets du café philo d’Annemasse › Peut-on vivre sans croyance ? Sujet du 26.05.2014 + restitution + une carte mentale
- Ce sujet contient 8 réponses, 3 participants et a été mis à jour pour la dernière fois par René, le il y a 10 années et 7 mois.
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21 mai 2014 à 12h06 #4972Peut-on vivre sans croyance ?
Le thème m’est suggéré par le dossier de Sciences Humaines :
– Sommes-nous naturellement crédules ?
– Existe-t-il des croyances universelles ?
– La croyance présente-t-elle un avantage sélectif ?
– A quoi bon croire, si par définition, l’objet en lequel on croit, n’existe pas ?
– Est-il nocif de croire ?
– Y-a-t-il des croyances saines ?Ps : Ceux qui sont inscrits sur cafesphilo.org et qui ont rempli le formulaire de demande (cliquer ici peuvent bénéficier de 3 mois d’abonnement à la revue.
Autres ressources pour le sujet :
La thématique de la croyance traité sur « Les chemins de la connaissance » du 05 au 07 mai 2014, ici21 mai 2014 à 15h05 #4973Si on considère que toute connaissance repose sur une forme de croyance (en la validité de la logique, en la stabilité des lois physiques, des régularités sociologiques, etc.), alors on ne peut vivre sans croyance, car on ne peut vivre sans connaissances (a fortiori s’il s’agit de connaissances pratiques). Toute action efficace s’appuie sur la connaissance (parfois tacite) que nous avons du monde qui nous entoure. Les sceptiques de l’antiquité prétendaient vivre en suspendant leur jugement à tout propos. Aristote leur faisait habilement remarquer que, bien qu’affirmant ne rien croire au sujet de la réalité du monde, ils n’en allaient pas pour autant se promener au bord des précipices par jour de grand vent.
Peut-être faudra-t-il donc bien distinguer ce type de croyance là (à valeur heuristique – épistémique) et les croyances de type religieux (à valeur spirituelle – éthique). Les premières sont requises pour créer du savoir (car on ne peut tout démontrer, il faut s’appuyer sur des axiomes), les secondes sont requises pour rendre les valeurs (ou normes éthiques) efficaces et organiser la vie en commun des humains (car si on ne croit pas au bien fondé des normes, elles disparaissent dès que la contrainte qui vise à les faire respecter s’estompe).
ps : j’ai rempli le formulaire pour Sciences humaines ; merci René pour tout ce que tu fais !! Tu es génial 😉
21 mai 2014 à 22h53 #4974Pour continuer ma réflexion :
En fait, je crois que le risque de l’idée selon laquelle « on ne peut vivre sans croyance », est qu’elle peut légitimer indirectement la religiosité. J’ai souvent entendu ce saut rhétorique dans le discours de personnes pétries de spiritualité : puisque la science est une entreprise reposant elle-même sur des croyances (croyance en la validité de ses axiomes indémontrables, en la valeur de la connaissance objective, etc.), alors il n’est pas moins raisonnable de croire en Dieu que d’affirmer que toute cellule vivante comporte en son noyau de l’ADN codant pour la synthèse des protéines. On peut étendre le raisonnement à la comparaison entre la vie ordinaire du citoyen lambda (qui gouverne sa vie selon des croyances pratiques, psychologiques et sociologiques) et celle du croyant (au sens religieux du terme). En bref, si reconnaître qu’une certaine forme de croyance est au cœur de toute connaissance objective s’avère utile (cela prémunit contre le scientisme naïf), il ne faudrait pas pour autant que cela conduise à relativiser la valeur des sciences du point de vue de leur prétention à énoncer le vrai (en gommant la frontière entre science et religion).
21 mai 2014 à 23h18 #4975En relisant le sujet, je m’aperçois qu’ici la notion de « croyance » est implicitement employée pour désigner l’adhésion à une idée en l’absence de preuve. Croire, ce serait penser une chose sans raison positive de le penser. La croyance se justifierait alors, de ce point de vue, du fait que la nécessité d’avoir une opinion sur un sujet se fait jour dans l’esprit, alors qu’on ne dispose pas des moyens de se forger un savoir sur la question. Le mobile des croyances peut donc être psychologique ou sociologique.
Si on garde la signification commune de « croyance », on peut distinguer les croyances non vérifiées et les croyances invérifiables. Le débat porte, à mon avis, sur le deuxième genre de croyances.
Croyances non vérifiées : « je crois que table se dit Tisch en allemand » (mais je n’en suis pas sûr, je n’ai pas vérifié)
Croyances invérifiables : on peut distinguer les invérifiables par essence et les invérifiables par accident.
Invérifiables par essence : « Dieu existe », « l’homme est naturellement bon ».
Invérifiables par accident : « Il existe une particule que la science physique n’a pas encore découverte », « Un jour, il n’y aura plus de pauvreté dans le monde ».
Les invérifiables par essence, sont invérifiables en raison de leur formulation (et de la nature des entités qu’elles mobilisent). Les invérifiables par accident, le sont en raison de la faiblesse actuelle de nos connaissances et de notre manque d’avancement technique.
Toute la question est donc de savoir si on peut vivre sans croyance invérifiable par essence. Qu’est-ce que cela frustre en nous de devoir renoncer à croire quoi que ce soit (et être donc agnostique) sur des sujets tels que l’existence de Dieu, le sens de la vie, la nature humaine, etc. ?
Enfin, penser qu’il vaut mieux être agnostique sur ces sujets, car cela est plus raisonnable, est-il une croyance justifiée ? Que dire à quelqu’un qui affirme qu’il ne croit pas que Dieu existe, mais qu’il le sait ? Faut-il lui expliquer qu’il se méprend sur le sens du verbe savoir ? Ou reconnaître que ce que nous appelons vérification s’arrime dans une culture spécifique (celle du rationalisme critique et de la méthode expérimentale) ?
25 mai 2014 à 18h30 #4977Je ne pense pas qu’il faille opposer « Croyance » et « Savoir ». Je propose une échelle qui va de l’absolue mauvaise foi au savoir le plus éclairé :
– 2 : Foi aveugle : « Mars est habitée par des humanoïdes, je le sais, c’est tout. »
– 1 : Croyance générée par l’envie de croire : « Notre galaxie recèle forcément des milliers de civilisations plus évoluées que la nôtre »
0 : Ignorance totale : « J’ignore totalement s’il existe d’autres formes de vie dans l’univers »
1 : Doute pondéré par la réflexion personnelle : « Il me paraît improbable que nous soyons seuls dans l’univers »
2 : Quasi-savoir : « En ma qualité d’astro-physicien, je peux affirmer qu’aucune forme de vie plus évoluée que l’être humain n’habite sur la lune »26 mai 2014 à 13h14 #4987Effectivement, l’opposé de la croyance n’est pas le savoir, mais l’incroyance. Cependant, l’incroyance ne consiste pas à « ne pas croire » quelque chose mais à « ne rien croire » sur cette chose. Ne pas croire que « A » est vraie implique de croire que « non-A » l’est. Pour reprendre ton exemple : si je ne crois pas qu’« il y a de la vie sur Mars », alors je crois qu’« il n’y a pas de vie sur Mars ». Si je prétends ne pas croire non plus qu’il n’y a pas de vie sur Mars, je suis dans l’incroyance (l’agnosticisme). La pensée s’arrête alors, pour ne pas violer le principe du tiers exclu.
Ensuite, tu as raison, il y a un comme un continuum de la croyance au savoir (Platon parlait des « opinions droites », sorte d’intermédiaire entre l’ignorance et le savoir). On passe de la croyance au savoir par la capacité à justifier que la croyance est vraie. Cette justification prend des formes différentes (démonstration, argumentation, démarche expérimentale) mais doit toujours avoir quelque chose de publique (la justification doit valoir pour d’autres que moi).
To be continued… 😉
26 mai 2014 à 15h25 #4988Je ne pense pas qu’il faille opposer « Croyance » et « Savoir ». Je propose une échelle qui va de l’absolue mauvaise foi au savoir le plus éclairé
La proposition de Michel me questionne car la mauvaise foi et le savoir éclairé ne trouvent pas sur la même ligne de valeurs, on ne peut donc pas les établir sur une même échelle. Ce serait plutôt deux ordres de pensées différentes : juger de la mauvaise foi de son interlocuteur, d’une part, et d’autre part, évaluer la pertinence d’un savoir éclairé :
1) Juger de la mauvaise foi d’une personne revient à la juger une personne. Dans ce cas, il faut connaître son histoire, le fil déroulé de ses pensées, les intentions qu’elle nourrit…
2) Concernant le savoir éclairé du savant : on peut, même avec un savoir éclairé, se tromper, en raison du fait qu’il est impossible de réunir un savoir absolu sur toutes les choses. La probabilité d’avoir absolu raison contient souvent une part de croyance, en particulier si le savoir entend embrasse de grandes généralités.Depuis la Grèce Antique, grâce à Ératosthène, on sait « théoriquement parlant » que la terre est ronde. Mais dans les faits, la terre pouvait avoir une autre forme, n’est-ce pas ? Elle pouvait, par exemple, être biscornue. Il a fallu faire le tour complet de la terre, puis la voir de haut pour dire enfin: Regardez, elle est là, bien ronde.
C’est un peu pareil avec le Big Bang : toutes les observations et les calculs confirment ce phénomène, mais d’autres théories lui font de l’ombre, comme, par exemple, la théorie des cordes (qui comprend plusieurs dimensions du temps); cette approche s’avère pourtant incompatible avec celle du Big Bang. Les physiciens doivent « croire » (au moins ponctuellement) en l’une ou en l’autre des théories pour faire avancer la science.
Je ne donnerai donc pas le statut de « croyance » à ces théories encore en travail, mais celui d’hypothèse tangible (avec des degrés de validité ou de certitude plus ou moins élevés.Il y a une zone de rupture entre des savoirs établis et exploitables (loi de l’inertie des corps, de la gravitation universelle…) et les croyances qui ne reposent sur aucune observation tangible. Entre ces deux « savoirs », il y a des savoirs en travail, ils répondent aux critères méthodologiques et scientifiques qui permettent de repousser un peu plus loin certaines frontières de nos connaissances.
7 juin 2014 à 1h24 #5001Peut-on vivre sans croyance ?
En guise d’introductionÉtymologie :
Credo, credere en latin, croire, qui a donné le mot croyance. Credo est lui-même un composé du verbe « dare » (faire don). La première partie « cred » est un substantif neutre signifiant « coeur, intelligence », il est identique à « cord ».
Cred-dere alicui signifie donc « donner son cœur « , c’est-à-dire son intelligence, sa confiance à « quelqu’un ou à quelque chose ».
Cette étymologie est en grande partie extraite du « Dictionnaire étymologique latin » par Marcel Bréal et Anatole Bailly, de 1885, page 50.
Une mise en perspective historique en trois points:
1) Depuis la Grèce antique, on oppose la véritable connaissance à l’opinion. La véritable connaissance devait être universelle, invariable, intemporelle. L’opinion, quant à elle, ne pouvait être que contingente et changeante.
2) Après Galilée et avec le courant « empiriste » (Bacon, Locke, Hume), on se rend compte que des connaissances élaborées uniquement sur de purs raisonnements sont le plus souvent factices. Les empiristes proposent de construire des connaissances à partir de bases de données et d’expériences sensibles.
3) Au XIXème, le pragmatisme proposera de ne pas tergiverser sur la valeur « vraie » ou « fausse » d’une proposition, mais seulement de prendre en compte ce qui marche ou pas. Ex : peu importe si les preuves de l’homéopathie sont établies ou non, seul compte ce qui fonctionne.
Une approche traditionnelle :
Selon Al-Ghazali, philosophe persan (1058-1111), la croyance est relative à ce qui est connu :
1) par l’expérience (comme le goût d’un fruit ou la couleur du ciel qui sont connus par l’observation),
2) par le raisonnement (comme le fait que la moitié d’une chose est plus petite que cette même chose entière),
3) par la nouvelle sûre (c’est par cette voie que l’on a connu l’existence des terres lointaines et de certains événements du passé). Ainsi, sans avoir rencontré Jules César, la nouvelle de son existence, rapportée par de nombreuses voies, exclut la possibilité d’un mensonge et permet de conclure à son existence. Al-Ghazali qualifie alors cette croyance de conforme à la science et à la raison.Une approche psychologique :
Selon le psychiatre Donald Winnicott (1896-1971), le rapport de l’individu à ses croyances est primitivement déterminé par sa relation à sa mère. C’est elle qui donnera le ton, c’est-à-dire que la qualité de la relation de l’enfant avec sa mère déterminera un ensemble de croyances profondément ancrées en lui qui sera la base de la construction des croyances suivantes.Un constat anthropologique :
Les anthropologues observent toutes sortes de croyances : elles peuvent être illogiques, causer des souffrances et des injustices, mais partout on constate qu’elles sont fondatrices d’un ensemble de valeurs qui structurent un cadre de vie sociale. La croyance se pose comme un fait culturel.
(Merci aux auteurs de l’article Croyance de Wikipedia)Restitution de quelques problématiques évoquées lors de notre débatPeut-on distinguer diverses façons de croire ?
– La croyance renvoie aux religions et aux idées sur l’origine de la création (le spirituel et ses institutions).
– On peut croire en l’amour, en l’amitié, en la famille (les valeurs de l’intime).
– On peut croire en la médecine, aux valeurs de la république (les idéaux humains).
– On peut croire que l’on va gagner au loto, au tiercé (les statistiques).
– On peut être superstitieux et croire au « vendredi 13 » (le non fondé)
– On peut croire en la science (le fondé).
– A mon avis, la science ne renvoie pas à la croyance mais à des procédures méthodologiques concernant l’étude d’objets dûment identifiés.
Quel est le contraire de la croyance ?
– Le doute, la mécréance, l’agnosticisme, le nihilisme ?
– Le doute est un questionnement, il ne s’oppose pas à la croyance.
– Au Moyen Âge, le mécréant est celui qui « croit mal à propos », il n’est pas nécessairement non-croyant.
– L’agnosticisme est une sorte de non-positionnement qui consiste à suspendre son jugement (au profit d’un doute, ou d’une attente plus grand ?)
– Le nihilisme consiste en une négation des valeurs morales et intellectuelles, c’est l’affirmation d’un non-sens radical.
– Toutes ces postures n’impliquent-elles pas des formes de croyances souterraines ? En effet, pouvons-nous formuler un doute sans prendre appui sur une pensée qui, elle-même, constitue un a priori, une croyance ou un préjugé ?
De la polysémie du mot « croire »
– Le mot « croire » pose problème : le superstitieux, croit-il vraiment ou espère-t-il seulement ? Le futur marié doit-il croire en sa future épouse ou doit-il lui faire « confiance » ? Le patient doit-il croire en son thérapeute ou doit-il apprendre à travailler sur lui-même ? Est-ce qu’on croit en la science ou est-ce qu’on s’en remet rationnellement à la meilleure expertise du moment ?
– Nos croyances religieuses sont toutes des illusions, pense Freud dans « L’avenir d’une illusion »).
– « Je crois qu’il y a de la lumière chez Paul » signifie « Je crois avoir aperçu de la lumière chez Paul », autrement dit, j’ai un doute concernant le fait d’avoir vu cette lumière. On devrait remplacer l’expression « je crois » par « je doute ». (Rires)
– En fait, derrière la polysémie du mot « croyance » se dessinent des « modes de projection » : ils permettent d’envisager différentes formes d’actions dans un avenir proche ou lointain.
Croyance et foi
– Faut-il mettre la foi sur le même plan que la croyance ?
– La foi est une vertu liée à l’espérance, elle est personnelle. Les croyances sont des structures instituées par des communautés, des groupes religieux.
– La foi est une notion qui n’existe pas dans le judaïsme.
– Chez les chrétiens, la foi relève de l’expérience intime, c’est comme être habité par un sentiment du divin.
– Chez les musulmans, la foi fait référence à la croyance qui est dans la tête, à la confiance qui est dans le cœur, et à l’obéissance qui est dans le corps.
La « foi » étant par nature « subjective », tous les « montages conceptuels » sont possibles. Se posent différentes questions : A quelle la cause répond ce montage, à quel modèle de société correspond-il ? Quel effet ce montage conceptuel produit-il sur la personne, et sur sa manière d’être en relation avec la société ?De la fonction de « croire »
– Croire en une justice divine permet éventuellement de se consoler des injustices vécues sur terre.
– D’accord, au regard du nihilisme qui est cynique, voire autodestructeur, avoir « foi » en un avenir est tout simplement un avantage.
– Que faire de « Rien » ? Est-ce tout le discours que nous propose la rationalité devant l’angoisse existentielle ?
– Sur un autre plan, à propos du patient et de son thérapeute, ce n’est pas tant le thérapeute qui compte que l’école de pensée à laquelle il adhère. Refuser de croire en son thérapeute, c’est refuser de croire en un système de pensées.
En réalité, chacun se réfère à un modèle de vision du monde basé sur des croyances, sur des sciences, sur des formes d’espérance, et chaque système tend à renforcer sa propre cohérence.Nos croyances servent à la cohésion sociale
– De façon fondamentale, seules les références à un groupe, à un système de valeurs nous relient à l’humanité. Les croyances sont comme un trait d’union entre l’individu et la société, elles définissent une cohésion sociale.
– D’accord, mais les croyances sont également discriminantes, elles participent tout autant à la cohésion d’une société qu’à sa fragmentation. Les conflits, les guerres, les révolutions, les avancées et le piétinement des civilisations tout au long de l’histoire en témoignent.
– Peut-on distinguer le besoin de croire pour soi (pour se protéger de son vide existentiel) et le besoin de croire en un système de valeurs plus générales ? Je pense à un système de pensées qui permet d’organiser une société, de lancer une secte ou une nouvelle religion.
– Dans les deux cas se pose la possibilité qu’a un système de valeurs, arbitraire par définition, à « transcender » les particularismes.N’échappe-t-on pas à la croyance ?
En clair, le monde repose soit sur des concepts religieux, soit sur des concepts scientifiques.
Pour les concepts religieux, je vois deux problèmes :
1) l’un est dû à la diversité des croyances et donc à l’arbitraire des modèles religieux,
2) l’autre problème tient dans le dogme lui-même qui, présenté comme une vérité éternelle, ne permet pas à la pensée d’évoluer.
En ce qui concerne le modèle scientifique, il y a également deux problèmes :
1) l’un tient au fait que la science repose sur des axiomes, autrement dit, sur des propositions conventionnelles,
2) l’autre problème tient au fait que les explications scientifiques sont toujours partielles et délimitées dans l’espace et dans le temps.
En somme, aucun savoir n’est suffisamment absolu pour être défini comme certain. Le philosophe des sciences, Jacques Bouveresse, dit en substance : Que le monde soit « intelligible » est un présupposé religieux qui arrange les scientifiques.
Toutes les croyances se valent-elles ?
– A l’origine de nos croyances, il y a des formes d’espoir, des paris, car on ne peut pas réunir la totalité des savoirs pour prendre une décision. Des risques sont donc pris en rapport avec les points aveugles de notre croyance, qu’elle soit religieuse ou laïque.
– En introduction, on met en perspective le concept de « connaissance » de la Grèce Antique qui évolue vers le « pragmatisme » du XIXème siècle. Les religions et les croyances ont évolué elles aussi, de même que nos modèles politiques (du féodalisme aux démocraties en passant par des dictatures.)
– On fait le constat que nous tendons à renforcer la cohérence des modèles que nous adoptons, car trop d’incohérences déplaisent à la pensée, ou menacent la cohésion sociale. Mais toutes ces croyances et tous ces modèles se valent-ils ?
– Aujourd’hui, la religion, les cadres de valeurs de nos traditions ou de nos modèles politiques sont en tension. C’est comme si « un ensemble de dissonances entraient en résonance », chacun se crispe sur ses positions, ce qui génère les crises que nous connaissons aujourd’hui.
– Le processus de sécularisation des civilisations marque-t-il le pas ?
– Où sont d’aujourd’hui les croyances opératives ? Quels sont les cadres de valeurs qui fonctionnent aujourd’hui ?
La valeur d’une croyance serait fonction de sa pertinence effective à modifier le réel, et de sa capacité à générer une réflexion portant sur l’éthique et la cohésion sociale.Qu’apporte le doute à la croyance ?
– Nos connaissances sur le monde se sont construites de manière tout à fait empirique et par tâtonnements.
– Les dogmes religieux sont en contradiction avec nos connaissances d’aujourd’hui (comment la terre a-t-elle été construite en 6 jours, comment Marie peut-elle être vierge ?), il semble que certains religieux dépassent le dogme pour ne pas rester prisonniers de ces contradictions. Je pense à des religieux qui accompagnent de façon non religieuse des laïcs endeuillés. Dans ce cas, le registre de la foi dépasse le cadre conceptuel du dogme, et ce que les uns appellent « foi » d’autres le nomment « empathie ».
– Si les systèmes de croyance sont des systèmes de références, ce n’est pas le nom que l’on donne à sa « croyance » qui compte, mais sa fonctionnalité effective, sa capacité à relier les personnes entre elles.
– Le doute est naturel, mais il devient fécond lorsque, dépassant un cynisme premier, il questionne des éléments de connaissance et permet de construire une cohérence plus grande, ou des hypothèses douées d’un pouvoir explicatif plus pertinent.Quelques interventions en vrac– Le seul moyen de connaître le monde, c’est d’être soi-même le monde, ce qui n’est pas possible.
– La foi ne supporte aucun doute, alors que la connaissance se nourrit du doute.
– Intellectuellement, on ne peut pas contester la croyance des Aborigènes que le monde fût, avant d’être créé, un rêve.
– Je peux imaginer un monde sans croyances, mais il ne me resterait qu’un monde réel impensé.
– Les valeurs de la tradition ne fonctionnent plus comme des croyances, mais elles participent du vivre ensemble par l’inertie de leur répétition.
En somme, on peut vivre sans croyance mais cela n’a aucun sens 😆7 juin 2014 à 12h41 #5002 -
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