Cafephilos Forums Les cafés philo Pensées critiques à propos des discours sur le conflit Ukraino-Russe Semaine 9. La géopolitique selon Pascal Boniface (Thinkerview) + comparatif des témoignages côté Russe et Ukrainien + Réponse à Laurent

3 sujets de 1 à 3 (sur un total de 3)
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  • #6268
    René
    Maître des clés

      Pascal Boniface, dans ses meilleurs jours, sur Thinkerview. Mai 2022.
      Pascal Boniface : Fondateur et directeur de l’IRIS (Institut de relations internationales et stratégiques)

      Une remarque :
      La perspective géopolitique et géostratégique de Pascal Boniface n’est pas uniquement occidentalo-centré, il tend à être polycentré (à situer son point de vue depuis la Chine, le Moyen-Orient, l’Afrique…etc)
      Selon quelles lignes de force s’inspire-t-il pour élaborer ses analyses ? (Économique, militaire, administrative, démographique, éducative, religieuse, popularité de leur dirigeant,… etc. ), sans doute, un peu de tout cela.

      Quelques idées retenues :
      1° Par comparaison aux USA, l’influence des thinktanks en France est contrastée, ils ne se comportent pas tous comme des lobbys pro occidental. On observe plutôt, par rapport au conflit russo-ukrainien, une opposition entre les gaulo-mittérandistes et les « néoconservateurs » (les occidentalistes).
      > Les premiers pensent que la France appartient au monde occidental, mais ne s’y réduit pas. Il est préférable de promouvoir son indépendance.
      > Les seconds estiment que les dangers sont trop grands et qu’il faut se ranger derrière les USA. Ils peuvent également estimer qu’il est un devoir d’exporter nos valeurs (de les imposer par la force, la ruse, le commerce).
      > Remarquons que la perspective d’analyse géostratégique n’est pas fonction d’une observation, mais « prospective » et ainsi, relative à une orientation prédéfinie (promouvoir son indépendance, se protéger des risques, anticiper des attaques pour gagner en influence)

      2° Le reste du monde ne nous reproche pas nos valeurs (Droit de l’homme), mais de ne pas les appliquer.

      3° Une trentaine de pays se sont abstenus de condamner l’agression Russe, mais par ailleurs, seuls les pays occidentaux appliquent des sanctions économiques. Le monde occidental a perdu le monopole de la puissance.

      4° Lorsque le monde ne comptait que 5 grandes puissances, il suffit d’être à 3 contre 2 pour l’emporter. Mais aujourd’hui, le monde devient multipolaire.

      5° La grande erreur des USA-Occidentaux, c’est de croire que le monde devenait Unipolaire avec la chute de l’URSS…

      Ps : proxy ou guerre proxy est un concept anglo-saxon qui signifie : guerre par procuration. Il s’agit de faire se battre les autres pour en tirer un avantage, et d’éviter à devoir se battre soi-même.

      Un commentaire perso
      Comme nous l’avons vu durant la crise Covid, les vaccins et autres traitements qui ne fonctionnent pas (Redemsivir), ont directement été achetés par l’Europe et ce, sans aucune transparence ni concertation d’avis d’experts médicaux indépendants, et sur la seule foi des documents du fabricant, couverts par le secret des affaires.

      Pour la guerre en Ukraine, les sanctions sont prises immédiatement, ainsi que la vente d’armes, sans consultation préalable des pays membres et des conséquences qu’ils peuvent en subir.
      Comment la démocratie, construite autour d’un axe de liberté et d’égalité, promue par des citoyens qui choisissent les valeurs et ceux qui sont supposés les représenter, peuvent-ils s’y retrouver dans ces conditions, se reconnaître dans les décisions qui sont prises ?
      Pour le dire autrement, sommes-nous certains que notre intérêt général, en tant que citoyen, est au cœur des décisions européennes ?

      Je vais poser la question autrement :
      Un Français ou un Suisse qui travaille pour le FMI, pour qui travaille-t-il pour le FMI ou pour son pays ?
      Idem, tout fonctionnaire d’un pays occidental qui travaille pour l’OMC, pour qui travaille-t-il ?
      idem pour les administrations de l’Europe ?
      Idem pour l’OMS, qui loue les services de Mc Kinsey et est largement financé par Bill Gates, les Pharma, de même pour l’ONU qui vient de signer un contrat avec Klaus Schwab (Fondateur du forum Davos)
      Idem pour le marché financier, les lobbys, les grandes banques,
      En vue de quoi toutes ces administrations travaillent-elles, elles qui fixent les cadres qui contraignent tous les pays partenaires ? En vue de quelle fin, de quel projet pour l’humanité sont-elles au service ?)

      Mon hypothèse complotiste : qu’importe le guignol qui se trouve à la tête d’un pays, ses choix sont tellement contraints par le cadre de prise de décision, qu’il suffit de suivre les logiques d’intérêts financiers au niveau mondial pour se faire une idée de la direction vers laquelle il tend.

      Mon hypothèse non complotiste : le monde est entré dans une phase anarchique, résultant de la crise profonde (civilisationnelle) qui le traverse depuis 1991 (grosso modo, la Chute du Mur, le capitalisme financier mondialisé de l’économie, internet). Les lignes de force semblent suivre le paradigme hobbésien de la pensée : le plus fort l’emportera sur tous les autres qui lui seront soumis. Le Léviathan est joué par la menace nucléaire, celle des virus et la dérive climatique, le tout est chapeauté par les fakes news, les Gafams. Après quelques désastres, on verra s’opérer la pensée de Pascal :
      « N’ayant pu faire que ce qui fût juste soit fort, on a fait en sorte que la force fût juste.  » Pascal.

      Ma position dans cette guerre : plutôt neutre… mais je tiens le « dominant » pour responsable de la violence qu’il génère chez le subordonné.
      Ma position active : pour des médiations, et l’éthique qui va avec (voir ici), et le moins de violence possible.
      —————————-
      René Guichardan, café philo d’Annemasse.
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      #6269
      René
      Maître des clés

        La vérité étant toujours la première victime de la guerre (Rudyard Kippling), il est intéressant de comparer les annonces côté Ukrainien et côté Russe. Or tout ce qui vient de Russie est invisibilisé, censuré et qualifié de propagande, tandis que les nouvelles venant de l’Ukraine, sont diffusées sans prise de recul, sans critique dans les médias en France, et dans la plupart des pays occidentaux.
        ———————————————–

        Le témoignage du côté Donbass de la même usine, par une reporter de guerre Française, Christelle Néant

        Lien vers la vidéo (durée du témoignage, 1.40mn) et sa liste en général, ici.

        Résumé, questions, commentaires.
        – Quels sont les enjeux de la libération de civil du côté Ukrainien, et du côté Russe ?
        – Qui contrôle les images que nous voyons du côté Ukrainien et du côté Russe ?

        Du côté ukrainien (LCI), on insiste sur le vécu de la rescapée (c’est nécessairement terrible). La Russie empêche l’évacuation des civils et les bombarde dès que c’est possible. Les check-up des personnes libérées durent des heures. Suite au bombardement Russe (présenté comme massif par le journaliste), 4 blessées, (2 civils et 2 militaires, dont 1 grave (militaire). Seuls les femmes, les enfants, les blessés sont évacués. Il reste de nombreux civils dans les sous-sols de l’usine.

        Du côté Donbass (Christelle Néant, reporter de guerre indépendante, et qui se présente ainsi dans les détails de sous sa vidéo).
        On voit une file de « réfugiés » évacués de l’usine Azovstal. Irina qui témoigne, rapporte grosso modo les mêmes conditions de captivités, mais dit que les RPD (les soldats russophones du Donbass – qui ne sont pas les soldats Russes) les ont libérés et leur ont immédiatement procuré des soins et de la nourriture. Elle dit que les soldats Azov (branche dure/nazi de l’armée Ukrainienne) ne sont pas venus les voir, ni les ont aidés durant leur captivité.
        Durée du témoignage 1,40mn. Le reste du reportage est une visite des lieux.

        Les enjeux.
        Du côté Ukrainien, il est dit que les Russes empêchent l’évacuation des civils, qu’ils bombardent tout et sans discrimination.
        Du côté Russe, ils proclament chercher à libérer les civils de l’emprise des nazis de l’armée ukrainienne, tout en s’évertuant à faire le moins de victimes possible.

        Du côté machiavélique de la guerre :
        Les soldats ukrainiens sacrifient tout civil qui n’est pas engagé dans la défense de l’Ukraine. Il va de soi alors de se protéger derrière des civils pour résister à l’envahisseur Russe.
        Du côté Russe, les soldats du Donbass, recherchent l’indépendance et ne souhaitent pas se mettre à dos tous les civils, donc ils les préservent et essaient de ne s’en prendre qu’aux soldats qu’ils invitent à capituler.

        Question : comment allez-vous vous faire votre propre avis ?

        Ma réponse, il n’y a pas de guerre propre, j’essaie néanmoins d’écouter les avis, analyses de tout bord. Je préfère penser que ceux (les gouvernements) qui lancent ses guerres, tout fanatique qu’ils soient, sont « raisonnables » : ils poursuivent des intérêts, ce qui ne les empêche de se tromper dans leurs calculs stratégiques. Ainsi, ils tentent d’évaluer, au fur et à mesure que la guerre se poursuit, l’intérêt de surenchérir ou de négocier.
        La promesse à l’Ukraine par l’occident de se voir donner des armes à l’infini est celle de voir cette guerre durer jusqu’à épuisement des forces, et la garantie d’en faire le plus grand nombre de victimes possible.
        Des contre argument à cette réplique : oui mais Poutine va vouloir nous envahir encore davantage + il faut sauver les libertés et les démocraties naissantes + il ne faut pas que les autres suivent son exemple.

        Autre question : comment faire en sorte que ce débat ne soit pas sans fin, et qu’il cause le moins de victimes possibles ? Vos propositions sont les bienvenues.
        —————————————
        René Guichardan, café philo d’Annemasse.
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        #6270
        René
        Maître des clés
          Merci à Laurent qui m’adresse les contre-points ci-dessous.

          Copie du message de Laurent :
          « J’ai du mal avec votre symétrie Ukraine – Russie »
          Historiquement les Ukrainiens ont bcp souffert des russes et de Lénine et de Staline, et de la dictature communiste.
          Ils veulent majoritairement s’en « échapper »
          Ils cherchent et trouvent des alliés : les américains.
          Mais je ne vois rien dans le régime en vigueur en Russie (mensonges et répressions) et dans les intentions et pratiques de Poutine d’attrayant pour les Ukrainiens.

          De leur coté, comme la plupart des états, l’Ukraine est réfractaire à l’autonomie et à l’indépendance de certains territoires. L’Europe a vraiment perdu son crédit en n’imposant pas des référendums dans les cantons voulant se différencier. Et les frontières historiques n’ont, semble-t-il, pas la bonne granularité pour voter dans un sens ou un autre.

          Mais comment se fait il que la Russie n’ait pas mieux réussi à aider depuis 2014 les Ukrainiens qui avaient vraiment envie de se séparer de l’Ukraine ? Qu’est il allé faire du coté de Kiev ?

          Le pays dominant est peut-être les USA, mais rien dans les intentions de Poutine, vis-à-vis des Ukrainiens ,n’est parallélisable avec leur guerre de libération.

          Le fait que les parties en guerre mentent et propagandent ne les met pas à égalité.

          En amont, il y a le fort désir d’une majorité d’Ukrainiens pour sortir de la séculaire emprise et violence russe .

          Bien cordialement.
          ———————————————————
          Ma réponse, en couleur, insérée ci-dessous dans le texte de Laurent :

          Présentation générale d’une situation ou d’un événement. Quatre phases peuvent être distinguées :
          1° La perception de départ (telle que les choses se présentent)
          2° Le diagnostic (tel qu’on s’explique la raison des choses, et qui découle de la perception de départ),
          3° Il s’ensuit un pronostic (où les choses vont-elles conduire)
          4° À partir de quoi sont justifiées des thérapies (les remédiations, solutions).

          – J’ai du mal avec votre symétrie Ukraine – Russie.
          Perception de départ : De mon point de vue, les deux pays sont en phase d’apprentissage de leur démocratie. En cela, ils doivent gérer leur désordre/conflit intérieur par eux-mêmes (notamment avec des aides effectives, des médiations dûment accompagnées par des pays partenaires).

          – Historiquement les Ukrainiens ont bcp souffert des Russes et de Lénine et de Staline, et de la dictature communiste.
          Diagnostic (cause) : Oui, sauf que les Ukrainiens et les Russes d’aujourd’hui ne sont pas ceux d’hier. Combien de temps et par quelles étapes la France et l’Allemagne sont-elles passées avant de devenir des amis, puis les piliers de l’Europe ?

          – Ils veulent majoritairement s’en « échapper ».
          Décalage dans le diagnostic (l’observation de la cause) : le pays est très divisé, par ses régions, par ses populations et leurs langues et par son histoire. Tous ne veulent pas en réchapper, d’où le conflit. Précisons que les révolutions et les soulèvements de populations sont encouragés et financés par les puissances extérieures qui en forment les leaders. Ref. Voir ici deux documentaires de 2015 et 2005 de Canal + en clair, sur les révolutions de couleur et l’après Maïdan.

          – Ils cherchent et trouvent des alliés…. les Américains …
          Il est ordinaire de se rechercher des alliés (mais « ils », n’étant pas une unité de peuple, ne recherchent pas les mêmes alliances). Les Américains, de leur côté, ni ils n’aident pas l’Ukraine en vue de favoriser son processus de démocratisation, ni ils souhaitent qu’elle ne s’entende avec la Russie. C’était à l’Europe de s’en occuper (ce qu’elle a partiellement, mais insuffisamment fait avec les accords de Minks). Voir ici la conf. de Pascal Baud (mai 2022), ex. responsable à l’Otan (2013-2017) de la lutte contre la prolifération des armes légères.

          – Mais je ne vois rien dans le régime en vigueur en Russie (mensonges et répressions) et dans les intentions et pratiques de Poutine d’attrayant pour les Ukrainiens.
          Karine Béchet-Golovko (Dr. en droit, Française invité à l’université de Moscou) formule la situation ainsi : Poutine est un dirigeant qui contrôle les oligarques, l’Ukraine est contrôlée par des oligarques qui contrôlent leurs présidents. Voir ici son interview du 07.03.2022. Durée 22mn

          – De leur coté, comme la plupart des états et, la plupart du temps, l’Ukraine est réfractaire à l’autonomie et à l’indépendance de certains territoires. L’Europe a vraiment perdu son crédit en n’imposant pas des référendums dans les cantons voulant se différencier. Et les frontières historiques n’ont, semble-t-il, pas la bonne granularité pour voter dans un sens ou un autre.
          Oui, il y a eu une faillite de l’Europe qui n’a pas su (voulu ?) accompagner les accords de Minks.

          – Mais comment se fait-il que la Russie n’ait pas mieux réussi à aider depuis 2014 les Ukrainiens qui avaient vraiment envie de se séparer de l’Ukraine ? Qu’est il allé faire du coté de Kiev ?
          De ce côté-là, je suis assez d’accord avec vous pour la seconde partie. Car Poutine, avant 2014, avait aidé l’Ukraine (voir ici le résumé d’Anne-Laure Bonnel), ensuite, c’est certainement une erreur de sa part que d’être parti en guerre… Bien qu’on ne connaisse pas encore le mot de la fin, et si l’erreur n’aura pas été plus grande encore de la part des pays occidentaux qui (à part les USA) sont aveugles au basculement général qui s’opère dans le monde, dans le rapport entre les nations.

          – Le pays dominant est peut-être les USA, mais rien dans les intentions de Poutine vis-à-vis des Ukrainiens n’est parallélisable avec leur guerre de libération.
          Oui, d’où, pour moi, le fait qu’il faille tout faire pour cesser les violences, autrement qu’en distribuant des armes, qui ne peuvent que faire perdurer la guerre, son coût et le déséquilibre entre toutes les nations.

          – Le fait que les parties en guerre mentent et partent en propagandent ne les met pas à égalité.
          Oui, nous sommes au niveau géostratégique, dans l’esprit d’une guerre mondiale, économique, environnementale (et dont la violence est encore contenue sur le sol ukrainien)… Pour l’instant, on ignore le coût que les « dirigeants » (ceux qui nous gouvernent, le système capitaliste boursier, les grandes administrations – Europe, FMI, OTAN, OMC…), vont faire payer aux populations, avant de refonder un droit international (de nouvelles instances onusiennes qui viendront tourner une page).

          – En amont, il y a le fort désir d’une majorité d’Ukrainiens pour sortir de la séculaire emprise et violence russe.
          La motivation du peuple (et des petites gens) est certaine, celle de leurs dirigeants, l’est beaucoup moins.

          Le dernier mot est laissé à Laurent : Mon souhait, lorsque les combats auront cessé, est que Zelensky ose rétablir l’autorisation des langues maternelles non ukrainiennes de Kiev et que des referendums sur l’autonomie des différentes régions seront organisés avec appui et contrôle international quand les combats auront cessé.

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          René Guichardan, café philo d’Annemasse.
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