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28 janvier 2015 à 2h02 en réponse à : Du dogmatisme au terrorisme, introduction et synthèse du débat. Michel Tozzi. Janvier 2015 #5178Du dogmatisme au terrorisme
MJC de Gruissan et au café philo d’Albas
Synthèse de la discussion
– Ce qui pose problème dans ces événements, à travers les assassinats de journalistes très libres vis-à-vis de tabous sexuels, religieux, politiques, c’est l’attaque du noyau dur de notre démocratie, de nos valeurs :notamment la liberté d’expression, y compris le droit à l’impertinence, à la critique radicale, au rire, à la dérision. Attaque qui entraine une vive réaction, exprimée dans des rassemblements spontanés, qui traduisent le resserrement sur nos valeurs républicaine de liberté, de laïcité. L’émotion collective partagée n’est pas seulement une réaction à l’horreur du meurtre, elle est citoyenne au sens le plus large, traversant les clivages partisans.
– Ce qui préoccupe un participant, c’est le mot guerre dont on entend parler. Peut-il qualifier ces événements, qui impliquent des français, non des étrangers, issus de nos quartiers ? Ce sont les militaires qui d’ordinaire tuent. Ici des policiers sont tués, et sont amenés à tuer, alors que la police a d’ordinaire pour tache de gérer un adversaire, non de le tuer.
– Sur la question de la liberté d’expression, il y a difficulté en démocratie. Charlie hebdo a parfois dérangé (cf. les caricatures de Mahomet). Hara Kiri a été interdit par Marcellin après la publication de sa première à la mort de De Gaulle (« Bal tragique à Colombey : un mort ! »). Mais le blasphème n’est plus un délit en France depuis 1881 (loi sur la liberté de la presse). La liberté d’expression est juridiquement encadrée (pas de diffamation, de racisme). Jusqu’où border cette liberté, car à trop le faire, on tombe dans un régime liberticide (Cf. Robespierre : « Pas de liberté pour les ennemis de la liberté ! », et c’est la terreur de la guillotine…). Quelqu’un se plaint de ce qu’un média a interviewé les assassins ! La démocratie est fragile, car elle donne la parole, au nom de ses valeurs, à ceux qui veulent la supprimer… 2000 ans de christianisme, avec l’idée d’amour et de non violence, offriraient-il un ventre mou aux terroristes ? Il faut combattre pour maintenir la démocratie ! On ne sait vraiment ce qu’est la liberté que quand on en est privé. Il ne faut pas tomber dans l’angélisme.
Le problème, c’est le développement du sentiment d’insécurité face au terrorisme, qui peut frapper n’importe quand n’importe où. Comment résister à la peur ?
– Il est posé la question du fondamentalisme. Doit-on l’identifier à l’intégrisme ? Il s’agit de revenir à la source, au fondement, aux fondamentaux, à l’essentiel recouvert par des discours, des institutions qui ont le pouvoir idéologique. Les protestants ont ainsi protesté contre les dogmes catholiques, en revenant à la lecture privée et directe (donc plurielle) de la bible. Le versant intégriste pointe son nez quand il n’y a plus pluralité des interprétations. Exemple en Arabie Saoudite, où le salafisme interprète très restrictivement le Coran, sans approche historico-critique.
Ce qui pose problème dans le dogme, c’est qu’il est arrêté, figé, indiscutable (ex : infaillibilité pontificale). En fait le dogme dans l’Eglise catholique, c’est l’aboutissement d’une discussion entre théologiens. Un concile tranche entre trois thèses : Jésus est homme, Jésus est Dieu, Jésus est à la fois homme et Dieu. Mais une fois que l’on a arrêté le dogme (l’un et l’autre), la discussion reprend : quand j’ai dit que Jésus est à la fois homme et Dieu, qu’est-ce que j’ai dit ? Le rapport entre dogme et discussion est donc complexe. On ne discute pas un dogme, mais on discute son sens… Pour certains, ériger une propsition en dogme, c’est la démission de la pensée.
– La philosophie doit réfléchir sur les usages idéologiques du langage (ex : guerre, fondamentalisme), analyser les mots employés, savoir nommer avec précision (ex : guerre), faire des distinctions conceptuelles utiles (ex : dénoncer l’amalgame entre islamisme et islam, musulman et terroriste). Les terroristes islamistes portent tort à l’islam, car ils alimentent l’ostracisation des musulmans en France.
– Un participant n’est pas étonné par ce qui se passe, régulièrement ponctué par des actes anti juifs ou arabes, symptôme de l’importation en France de conflits mondiaux, dont on croit à tort que l’on serait préservé (mali, Syrie, Irak etc.)!
– D’autres insistent sur l’impression de désenchantement, de déliquescence des valeurs et du lien social, du manque de respect dus à l’individualisme, au rejet et à l’exclusion d’une partie de la population en temps de crise, qui creuse le ressentiment, qui mène les uns à la délinquance ou à la radicalisation, les autres au Front national.
– Pourquoi ne se mobilise-t-on pas autant contre le chômage que pour défendre Charlie-Hedo ?
– Il y a aussi le double jeu des sociétés occidentales vis-à-vis des pays arabes (vente d’armes contre pétrole etc.).
– Cela illustre bien la théorie du bouc émissaire de René Girard : quand une société est en crise, on accuse de tous ses maux un bouc émissaire objet de notre haine, à chasser pour que cela aille mieux (l’étranger, l’immigré, le musulman) !Michel Tozzi
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