Cafephilos › Forums › Les cafés philo › Les sujets du café philo d’Annemasse › Sujet libre avec compte rendu, le mal est la condition du bien. Seneque, ce lundi 29.07.2023 à Annemasse.
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26 juillet 2024 à 22h25 #7551
Rencontres philo pour le monde d’aujourd’hui, tous les lundis à 19h00
à la brasserie l’ATLAS, 16, place de l’Hôtel de Ville. 74100 ANNEMASSE
juste à côté de l’ancien lieu, la TavernePour ce lundi 29 juillet 2024
Le sujet est choisi parmi les propositions de chacun.
Nous remarquons depuis quelques séances que nous venons avec des propositions assez solides, parfois relativement préparées. Nous manquons tout simplement de temps pour l’annoncer avec d’avance.Nous vous invitons néanmoins à venir avec vos propositions, vos questions ou encore des citations. Éventuellement, elles seront retenues par un vote ou inscrite sur notre agenda pour une prochaine fois.
Pensez à des sujets qui vous importent. Nous défendons l’idée que l’on philosophe mieux à partir des thèmes qui comptent pour soi, qui nous impliquent ou des questions qui nous motivent en raison de ce qui est dit, ici, lors de nos rencontres ou dans la société et les médias.
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Compte rendu écrit de notre dernier sujet : Est-il nécessaire de comprendre un sujet pour le traiter ?Cliquer ici.
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Règles de base du groupe
– La parole est donnée dans l’ordre des demandes, avec une priorité à ceux qui s’expriment le moins.
– Chacun peut prendre la parole, nul n’y est tenu.Pour limiter les effets de dispersion dans le débat
– On s’efforce de relier son intervention à la question de départ, de mettre en lien ce que l’on dit avec ce qui a été dit.
– Pour favoriser une circulation de la parole, de sorte à co-construire le débat avec les autres participants, on reste concis.
– On s’attache davantage à expliquer la raison de sa pensée, plutôt qu’à défendre une opinion.
– On s’efforce de faire progresser le débat.
– Concrètement, on évite de multiplier les exemples, de citer de longues expériences, de se lancer dans de longues explications, mais on va au fait de son argumentation.
> Le moment de la conclusion peut donner l’occasion d’un exercice particulier :
– On peut dire ce que l’on pense des modalités du débat.
– On peut faire une petite synthèse d’un parcours de la réflexion.
– On peut dire ce qui nous a le plus interpelé, ce que l’on retient.
– On peut se référer à un auteur et penser la thématique selon ce qu’aurait été son point de vue.
—————-Avec ou sans préparation, chacun est le bienvenu, les cafés philo sont par définition, contre toute forme de discrimination et de sélection par la classe sociale, le niveau scolaire, etc.————————————-
Ps : En raison de la crise démocratique que nous traversons, nous postons (cliquer ici), des interviews d’historiens, de sociologues, d’économistes, de journalistes sérieux et qui nous aident à comprendre les tensions politiques que nous vivons en regard à leur discipline. Pourquoi et en quoi nous sommes à l’aune d’un fascisme en tout point comparable à celui des années 30 de l’Allemagne Nazi ?
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René Guichardan, café philo d’Annemasse.
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> Vous pouvez nous rejoindre sur notre groupe Signal (cliquer ici)3 août 2024 à 17h24 #7557Compte rendu de : Le mal est la condition du bien moral. Sénèque.
La proposition de Sénèque peut être entendue comme une formule « positiviste », il y a du mal autour de nous, qu’à cela ne tienne, il est tout à la fois la condition et l’opportunité par lesquelles l’être humain peut s’évertuer à pratiquer le bien.
Précisons que ce bien s’entend d’un point de vue moral, immanent, résultant d’une vertu (un effort) humaniste, et non, du point de vue de Sénèque, d’une métaphysique : du Logos, ne peut s’originer un mal, tout y est parfait, sans défaut. De fait, le mal relève d’effets secondaires à la création du cosmos, il est donc relatif à l’appréciation humaine.
Nous assumons, dans notre groupe, et pour ce soir, que cette perspective est anachronique, le positivisme et l’humanisme ne relevant pas des conceptions de l’Antiquité, mais découlant des Lumières et des pratiques de développement personnel d’aujourd’hui.Nous étions 6 durant ce débat…et la question du mal, de sa définition, pose quelques problèmes :
– Le mal ne peut se réduire au registre subjectif d’une appréciation toute personnelle : ce qui nous plait et ce qui nous déplait. Exemple, travailler ne nous fait pas toujours plaisir, mais on ne peut en faire un mal en soi. C’est avant tout une nécessité et selon le type d’emploi que l’on occupe, selon l’époque et/ou la société dans laquelle on vit, que le travail soit un tripalium, une œuvre ou une action (Hannah Arendt), on peut en tirer un plus grand bien, notamment par le confort de vie dont on bénéficie en retour. De fait, si le travail est un calvaire et confronte à une précarité grandissante une population toujours plus nombreuse, cela tient davantage à la manière dont il est pensé, à savoir, sur un mode prédateur, compétitif, financier, hiérarchique, consumériste, asservissant. Alors qu’il pourrait être pensé sur un mode émancipateur, participatif, coopératif, libérateur de notre créativité. Le travail pourrait être créateur de sens et d’avenir. Il ne l’est plus (pour une partie toujours plus grande de la population).
Ainsi, aujourd’hui, en termes de conséquence, on peut tirer un très grand mal de notre mode de vie. Pour certains économistes (Bernard Maris), notre mode de vie consumériste joue avec les pulsions de vie et de mort qui se livrent bataille sur les contradictions inhérentes au capitalisme financier mondialisé (note 1). Tous les êtres humains et l’ensemble du vivant (la biodiversité) est embarqué bon gré, mal gré, et le plus souvent à son insu dans une course à l’autodestruction.
Toutefois, il y a un flou dans la représentation que nous nous faisons de l’état de survie biologique de la planète. Quelle est la fraction de l’humanité qui est mise en danger de façon imminente (d’une année à l’autre et à l’échelle d’une décennie) ? Qui en a conscience parmi la population ? Quelles sont les réponses envisagées sur un plan individuel, associatif, universitaire et à l’échelle des pays ?L’infodémie, les médias-capitalistes, les climatosceptiques, la multiplicité des canaux d’information privés et alternatifs, tout est là pour ne pas nous permettre d’avoir accès facilement à des informations fiables, mises en contexte, discutées, pondérées, hiérarchisées par degré d’importance (d’urgence, de vie et de mort). Tandis que nous pouvons noter, par ailleurs, que jamais les IA et la captation des données des populations n’ont été si efficaces, si généralisées. Ce ne sont donc pas les moyens et la capacité à savoir qui nous manquent, mais le fait que l’accès aux informations et aux savoirs ne sont pas facilités. En tant que population, nous ne pouvons nous former une conscience partagée du monde et des enjeux qui le traversent.
De fait, le décalage entre les «producteurs-détenteurs» d’informations et ceux qui sont laissés dans le flou est abyssal.
Tout au plus, au niveau de la population en général et dans les pays occidentalisés, nous sommes accoutumés de l’idée que notre mode de vie n’est pas durable et généralisable à l’ensemble de la planète. Ce point aveugle sur notre avenir (cette absence d’horizon) alimente de façon souterraine, mais certaine, l’idée qu’il n’y en aura pas pour tout le monde. En conséquence, c’est l’occident qui se bat contre le reste du monde. En raccourci, cela donne : le bien, c’est nous, le mal, ce sont les autres.
Et, puisque dans le fond, à notre échelle de citoyens, nous n’y pouvons rien. Il ne nous reste plus qu’à accepter notre sort. D’ailleurs, nous allons tous mourir. A quoi bon ? (Après moi le déluge). Rappelons que, selon Spinoza, le mal, ou plutôt, les affects de tristesse naissent de notre rapport « passif » au monde, ils résultent du fait que nous subissons les causes extérieures qui nous affectent, plutôt que nous ne prenions conscience de manière adéquate des puissances en action, c’est-à-dire d’une manière qui nous permette de les comprendre, plutôt que de les juger, et d’être, à terme, les auteurs conscients des réponses que nous pouvons proposer.Second problème : Le mal des uns est le bien des autres.
Autrement dit, pour l’instant, on peut admettre qu’il n’y a ni bien ni mal en soi, mais seulement des luttes dans un monde d’incompréhension. Des luttes dont les lignes de partage s’observent en gros ainsi : d’un côté, nous avons les partisans du solutionnisme technique, eux trouveront la réponse à toutes nos difficultés.
De l’autre, il y a les écologistes qui prônent le détachement ou de faire sécession avec le monde comme il va.
Entre les deux, il y a une diversité de degrés d’adhésion en faveur d’un camp ou d’un autre.
On entend également dans notre débat, que les gentils sont les pacifistes : ce sont les écologistes, ceux qui savent renoncer au pouvoir et se contenter de peu. Autrement dit, au degré d’adhésion à un camp plutôt qu’un autre, correspond des idéaux, des degrés d’engagement dans les pratiques et les manières de lutter.
Ces problèmes précités et brossés à gros traits, résument bien une première partie du débat : les méchants (et donc, le créateur de maux) sont tous les ambitieux qui n’ont pas compris qu’il fallait se contenter de peu. Et inversement pour les solutionnistes, les pacifistes sont des arriérés, des non-instruits, des naïfs, etc.– Enfin, Eva et Rémy proposent, à défaut de prédéfinir un mal ou un bien en soi, que le mal nait de la négation de l’autre ou/et de la volonté à ne pas voir que toute vie, humaine et non humaine, se trouve dans un rapport d’interaction, d’adversité également et d’évolution par les échanges/transactions qui s’effectuent.
C’est dans l’échange (la valeur des échanges) ce qu’ils impliquent d’efforts, de contraintes, de résistance, d’adaptation, que se jouent les changements, les postures, les évolutions. Le rapport de « mal » ou plutôt de « pénibilité », d’affects tristes, de conditions d’inégalité et de mépris de l’autre semblent se jouer dans les postures que nous tenons, et les espérances qui leur sont attachées. Autrement dit, le mal, c’est de nier autrui dans l’échange qu’il nous propose. C’est de ne plus considérer le rapport d’interaction.La vie est une lutte.
Ce qui se joue est une dialectique, c’est-à-dire, un rapport d’oppositions qui doit conduire à un rapport supérieur de compréhension et de résolution, et non à une autodestruction, à une annihilation des oppositions.
Deux questions se posent : comment nommer les oppositions en lutte ? Ce ne sont pas les bons contre les méchants, les classes supérieures contre les inférieures, les partisans du progrès contre des écologistes (qui ne seraient pas, eux aussi, partisans d’un certain progrès), etc. Sinon, comme nous le voyons aujourd’hui, nous rigidifions (essentialisons) les positions dans des luttes stériles et destructrices.
Comment comprendre la lutte, qu’est-ce qui est en lutte et pour quoi ? Pour quel avenir ? C’est ce qu’il faut réussir à mettre dialogue, à définir, à nommer.
Je vais terminer mon compte rendu ainsi (par manque de temps), mais je garde l’idée qu’il me semble que les gens (en général et ici, parmi les participants) acceptent (ou se résignent) trop facilement à l’idée qu’ils savent, dans le fond, qu’ils vont mourir et, par conséquent, il faut faire avec. Se contenter ou lutter, peu importe, puisque nous n’y pouvons rien.
A vrai dire, je crois que c’est un grand dommage que de penser ainsi, je devrais plutôt dire, de se résigner ainsi. Mais plus intimement, j’ignore, lorsqu’on baisse par avance les bras, si ce n’est pas en raison d’une amputation originelle d’une image de soi. C’est l’idée que le sentiment de soi n’a pas été totalement approprié (mal reconnaissance durant la petite enfance) et qui conduit, lorsqu’on est adulte, à ne pas vraiment lutter pour la vie, pour la sienne comme pour celles des autres, et à choisir des voies de traverse, à s’extraire de la société et de ses turbulences. Aux inégalités de traitement psychologique durant l’enfance s’ajoute les inégalités de traitements économiques, sociétaux et politiques de la vie adulte.
La question qui se pose finalement est: qui détient le pouvoir, la force et l’habileté à jouer avec les représentations que nous avons du monde ?Note 1. Les contradictions du capitalisme
1° Contradiction entre la production et la consommation :
Surproduction et sous-consommation : Le capitalisme tend à produire plus de biens et de services qu’il n’en est consommé, ce qui entraîne des crises de surproduction. Paradoxalement, alors que les biens sont en abondance, une grande partie de la population peut ne pas avoir les moyens financiers de les acheter, créant ainsi une situation de sous-consommation. A terme, le capitalisme l’emporte en excluant le consommateur, qui est aussi le client et le producteur.2° Contradiction entre le travail et le capital :
Exploitation des travailleurs : Pour maximiser les profits, les entreprises réduisent les salaires, augmente les heures de travail ou diminue les avantages sociaux, ce qui conduit à une surexploitation des travailleurs.
La compétition généralisée crée une tension entre les intérêts des travailleurs (qui cherchent de meilleures conditions de travail et de meilleurs salaires), compétition répercutée sur le système d’éducation dès la plus jeune enfance et sur les systèmes de formation des adultes. Tandis que les détenteurs de capitaux gagnent à toujours diviser les travailleurs, à les mettre en compéttion entre eux. Tous les services publics tendent également à être privatisés, autrement dit, appauvris.3° Contradiction entre accumulation de richesse et pauvreté :
Inégalités économiques : Le capitalisme génère une accumulation massive de richesse pour une minorité, tandis qu’une grande partie de la population reste dans la pauvreté ou voit sa situation économique se détériorer. Cette inégalité croissante entraine des tensions sociales, politiques, notamment par les délocalisations et la migration forcée des populations.4° Contradiction entre concurrence et monopole :
Concentration des entreprises : Bien que le capitalisme soit basé sur la concurrence, il conduit paradoxalement à la concentration du capital, à la formation de monopoles, d’oligopoles et à des alliances opportunistes pour faire tomber un concurrent. Ces grandes entreprises dominent le marché, réduisent la concurrence et imposent leurs conditions aux consommateurs, aux travailleurs et aux Etats, qui croient en la compétition généralisée.Aujourd’hui, notons également que les grands patrons sont en possession de tous les médias, dont ils contrôlent les contenus et la diffusion. Les Gafam, de leur côté, contrôlent tous les contenus d’internet et leur diffusion dans les réseaux.
Pour les fines bouches qui osent dire encore qu’il y a des médias publics, voir ici dans ce forum, des analyses pertinentes de leurs contenus et de leurs financements.Bernard Maris (entretien ici, diffusée en hommage à la suite de son assassinat contre Charlie-Hebdo) dénonce également ces contradictions du capitalisme, mais pourquoi les grands dirigeants du politique et des entreprises le font-ils, alors qu’ils n’ignorent pas les effets de leurs entreprises ?
C’est là que se jouent la pulsion de vie et de mort, elle est dans l’intensité du vivre auquel se confrontent les protagonistes. C’est un honneur, une fierté, un dimension des ego, ou c’est encore une pathologie, une insensibilité, de l’immaturité, une addiction comme celle du joueur invétéré au casino. Il joue sa vie sur la table du monopoly, car sa vie réelle et celle de ses proches n’est pas, dans la réalité immédiate de son jeu, concernée. Il est aveuglé par sa prestance, son importance, son pouvoir, sa magnificience, son excitation du moment.
A termes, ce genre d’individu, partisan d’une philosohie hégélienne se dit, ce sont les meilleurs qui l’emportent dans la loterie que constitue la vie.————————-
René Guichardan, café philo d’Annemasse.
> Lien vers les sujets du café philo d’Annemasse, ici.
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