Cafephilos Forums Les cafés philo Les sujets du café philo d’Annemasse Sujet avec compte rendu : La connaissance n’est pas le pouvoir, elle est la liberté (sujet de la maturité suisse) ce lundi 19.08.2024 à ANNEMASSE;

2 sujets de 1 à 2 (sur un total de 2)
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  • #7574
    René
    Maître des clés

      Rencontres philo pour le monde d’aujourd’hui, tous les lundis à 19h00
      à la brasserie l’ATLAS, 16, place de l’Hôtel de Ville. 74100 ANNEMASSE

      Pour ce lundi 19 aout 2024 (le compte rendu est en bas de page. Merci)

      Le sujet est choisi parmi les propositions de chacun.
      Nous remarquons depuis quelques séances que nous venons avec des propositions assez solides, parfois relativement préparées. Nous manquons tout simplement de temps pour l’annoncer avec d’avance.

      Nous vous invitons néanmoins à venir avec vos propositions, vos questions ou encore des citations. Éventuellement, elles seront retenues par un vote ou inscrite sur notre agenda pour une prochaine fois.

      Pensez à des sujets qui vous importent. Nous défendons l’idée que l’on philosophe mieux à partir des thèmes qui comptent pour soi, qui nous impliquent ou des questions qui nous motivent en raison de ce qui est dit, ici, lors de nos rencontres ou dans la société et les médias.

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      Compte rendu écrit de notre dernier sujet : Crise ou névrose existentielle, peut-on en sortir ?. Cliquer ici.

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      Règles de base du groupe
      – La parole est donnée dans l’ordre des demandes, avec une priorité à ceux qui s’expriment le moins.
      – Chacun peut prendre la parole, nul n’y est tenu.

      Pour limiter les effets de dispersion dans le débat
      – On s’efforce de relier son intervention à la question de départ, de mettre en lien ce que l’on dit avec ce qui a été dit.
      – Pour favoriser une circulation de la parole, de sorte à co-construire le débat avec les autres participants, on reste concis.
      – On s’attache davantage à expliquer la raison de sa pensée, plutôt qu’à défendre une opinion.
      – On s’efforce de faire progresser le débat.
      – Concrètement, on évite de multiplier les exemples, de citer de longues expériences, de se lancer dans de longues explications, mais on va au fait de son argumentation.

      > Le moment de la conclusion peut donner l’occasion d’un exercice particulier :
      – On peut dire ce que l’on pense des modalités du débat.
      – On peut faire une petite synthèse d’un parcours de la réflexion.
      – On peut dire ce qui nous a le plus interpelé, ce que l’on retient.
      – On peut se référer à un auteur et penser la thématique selon ce qu’aurait été son point de vue.
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      Avec ou sans préparation, chacun est le bienvenu, les cafés philo sont par définition, contre toute forme de discrimination et de sélection par la classe sociale, le niveau scolaire, etc.

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      Ps : En raison de la crise démocratique que nous traversons, nous postons (cliquer ici), des interviews d’historiens, de sociologues, d’économistes, de journalistes sérieux et qui nous aident à comprendre les tensions politiques que nous vivons en regard à leur discipline. Pourquoi et en quoi nous sommes à l’aune d’un fascisme en tout point comparable à celui des années 30 de l’Allemagne Nazi ?
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      René Guichardan, café philo d’Annemasse.
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      Ici, nous postons des cours, interviews, conférences dont nous avons apprécié la consistance philosophique
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      #7588
      René
      Maître des clés

        Compte rendu : La connaissance n’est pas le pouvoir, mais elle est liberté.

        Nous étions six participants, le sujet a été voté parmi une liste de propositions du niveau Maturité Suisse (équivalent BAC), rapportée par Hischème, journaliste et enseignant à Genève.

        Des définitions, mais pour arriver où ?
        La connaissance, ce n’est pas de l’information (données brutes = données telles quelles), ce n’est pas de l’instruction (un système de savoirs et de directives), ce n’est pas du « savoir » (lequel est bien délimité), la connaissance renvoie à l’acte d’apprendre, de prendre conscience, d’apprendre à connaître. François résume : la « connaissance » est organisée. Très rapidement se pose la question en vue de quoi est organisée cette connaissance, comment est-elle organisée (collecte des données + organisation de l’argumentaire + usage).
        Mais, en attendant, partir du principe que la connaissance, c’est de l’information organisée, constitue une bonne base pour notre débat (note 1).

        Le pouvoir, basiquement, c’est une possibilité d’agir. La connaissance donne ici une possibilité d’agir par le degré et l’ampleur que nous en avons sur les choses. Mais du point de vue relationnel, le pouvoir est une possibilité d’action sur l’autre ou en sa direction : pouvoir d’influence (sociale, numérique, politique), pouvoir de coercition plus ou moins direct, violent, contraignant. C’est également une aptitude à la négociation coopérative dans le meilleur des cas, celui  où on se reconnaît comme des êtres humains égaux en droit, en sensibilité, en besoin, etc.

        La liberté, nous en avons peu parlé, mais nous nous entendions sur l’idée de responsabilité qui lui est associée, et non celle de faire « n’importe quoi », sans considération des effets et des conséquences sur soi, autrui et sur l’environnement. Se pose la question : pour des individus égaux en droit (et donc en considération et dans leurs besoins), quelles libertés peuvent-ils s’accorder pour que cette denière ne soit pas une atteinte à celle de l’autre ? Ou pour que cette dernière soit aussi profitable à l’un et à l’autre ?

        Une problématique pour répondre à la question :
        La connaissance, comme un ensemble d’opérations de données brutes organisées, donne un pouvoir (des possibilités d’action) sur les choses, mais la liberté, étant relative à la responsabilité (l’aptitude à répondre des conséquences de ses actes), elle ne ressort pas d’une connaissance en tant que telle. En effet, la responsabilité se mesure en situation, dans leur infinie diversité et par les conséquences qu’auront nos actes sur les gens et les choses.
        Nous avons vu que la connaissance se mesure dans un rapport aux choses. Dans ce cas, on agit avec d’autant plus de liberté que l’on a de connaissance sur les choses, Mais on ne peut considérer les gens (et le vivant en général) comme des choses. Car les personnes, en tant qu’ils sont égaux en droit et en besoins à nous-mêmes, vont réagir. Ne pas agir avec autrui (ou sur lui) comme s’il était une chose est liberté, c’est une liberté de fait, inconditionnelle, elle s’impose à soi et à tous. La liberté impose d’instaurer un rapport à l’éthique dans la prise en compte d’autrui.

        Question : la connaissance implique-t-elle un rapport à des valeurs morales ?
        Nous n’avons pas su répondre à cette question.
        Toutefois, Rémi avance que si tu as des connaissances et que tu en fais usage pour exercer un pouvoir moral (les IA sur les populations, les politiques non transparentes, les lobbys et leur capacité d’influencer les lois), dès lors, le problème n’est pas la connaissance, mais cette volonté d’agir sur autrui qui, elle, signe à la fois une absence initiale de liberté et la volonté d’en priver autrui, voire des populations (les maintenir dans l’ignorance des conséquences de ses actes, par exemple).

        La connaissance n’est pas morale ?
        Rémi dénonce finalement la définition de départ, si la connaissance n’a pas affaire à la morale, elle est seulement de la donnée (de la cognition, des propositions) agencée d’une manière ou d’une autre, tandis que la ou les valeurs lui préexistent, et ainsi de la liberté. Ce qui pose la question de l’origine des valeurs ? Y a-t-il une connaissance des valeurs autrement que par les noms qu’on leur donne : liberté, égalité, authenticité, vérité, justice, loyauté, respect, etc… ?

        Fondamentalement, les valeurs sont des « mises en relation » d’affects, de personnes et de groupes sociaux entre eux. Ce sont des expériences dont la connaissance s’élabore comme une compréhension, c’est-à-dire une intelligence en mouvement entre une diversité d’instances (religieux, éthique, moraux, familiaux, politique, économique, sociaux, ethnique, etc…)
        Les personnes et les groupes sociaux partagent entre eux des valeurs, les négocient (se donnent normalement cette liberté) car ils savent que les valeurs sont des garanties (les bases d’un contrat tacite ou dûment négocié) données à leur vie / survie respective. C’est la possibilité de ne pas s’auto-détruire jusqu’au dernier en cas de mésentente.
        Dans le meilleur des cas, on peut « choisir » de s’ignorer, si personne ne menace la survie de l’un ou de l’autre.

        Mais nous ne sommes pas arrivés jusqu’à ce point lors de notre débat, et nous nous sommes quelque peu égarés.

        Peut-on construire des savoirs sans valeur ? Ou de la neutralité axiologique.
        Nous n’avons pas été en mesure de mobiliser instantanément la question de la neutralité en axiologie (Max Weber), mais François Bayard a été mentionné et ce fût l’occasion d’évoquer ses travaux.

        Tout d’abord, voici une citation de Max Weber (rapportée dans Politikon, cliquer ici ) : De la défense des savoirs critiques de Claude Gauthier et Michelle Zancarini-Fournel) :
        « Le juste milieu n’est pas le moins du monde une vérité plus scientifique que les idéaux les plus extrêmes des partis de droite ou de gauche. Nulle part l’intérêt de la science n’est à la longue davantage niée, que là où l’on se refuse à voir les faits désagréables et la réalité de la vie dans sa dureté. »
        M. Weber, « L’“objectivité” de la connaissance dans les sciences et la politique sociale », in : Essais sur la Théorie de la science, trad. J. Freund, coll. Agora, Éd. Presses Pocket, 1992, p. 129 

        Dit autrement, on ne construit pas un savoir (ou des connaissances) sans, à termes, qu’il ait des implications éthiques, des conséquences morales. De la manière de comprendre le monde (ou les connaissances que l’on en produit) conduit à une diversité de solutions/réponses que l’on imagine qui, elles aussi, auront des implications éthiques.

        Prenons un exemple (rapporté sur le groupe Signal) : l’enseignement de la sexualité est-il neutre (le savoir transmis est-il sans conséquence) ?
        L’éducation sexuelle est enseignée comme étant sans tabou (neutre). Mais que veut-on dire ?

        On dit ainsi que le corps n’est pas moral, la pulsion n’est pas morale, elle est animale, elle est amorale. Ce n’est donc pas un « mal », c’est simplement, un fait « biologique », physiologique.
        Deux individus qui s’entendent pour vivre leur sexualité comme des « animaux », ça les regarde.

        Pourtant, l’être humain qui vit sa sexualité au niveau de sa génitalité, et en la considérant comme telle, peut-il ne pas porter atteinte (être affecté) dans le sentiment de son estime de soi ?

        Dit autrement, tout ce qui touche au corps affecte l’être dans le sentiment de soi, car aucune partie de notre corps n’existe sans être rattachée à « soi », à son intimité, à son histoire, au processus de son individuation. C’est vrai pour tout ce qui contraint le corps (l’économie, le travail, les contentions, la prison) et c’est d’autant plus vrai que le corps est dans une relation intime.

        De fait, il n’y a pas de « sexualité neutre », ce qui ne veut pas dire qu’il faille la considérer comme étant bien ou mal, mais que sa manière de la vivre et de la penser aura des implications/conséquences sur le sentiment de soi.  La façon dont la sexualité est enseignée interagit avec notre manière d’intérioriser notre sentiment d’intimité, un sentiment qui lui, est à la fois en formation et contient une première socialisation qui s’est faite à la maison. De fait, le savoir enseigné sur la sexualité n’est pas neutre, en dépit de la volonté d’en faire un sujet « neutre », banal, sans conséquence.

        Exemple d’une réponse possible selon un angle de vue axiologique par rapport à la question : Pourquoi, les jeunes se désexualisent ?

        La saturation des affects, que provoque l’accès aux vidéos pornos, vide le désir d’intimité de sa possibilité d’être expérimentée, car l’intime est ramené à de la génitalité ou à une sexualité biologique-physiologique, animale.

        Les jeunes apprennent alors la sexualité par les vidéos porno et par une éducation sexuelle enseignée comme étant « neutre » (amorale) et uniquement relative à un soi biologique.
        Cette façon de concevoir la sexualité oublie qu’elle est constitutive du sentiment intime de soi, lequel s’établit en « relation » et dans le partage effectif, éprouvé, sensible et conscient de soi, de ce qui s’échange avec son partenaire, dans le cœur même des interactions.
        En somme, et de ce point de vue, la valeur se place en premier, puis secondairement, devraient être enseignées les connaissances afférentes vénues les étayer.
        La problématique est inversée : il ne faut pas enseigner la sexualité comme un fait « neutre », mais mettre en place les conditions d’accompagnement pour que s’élabore en chacun le sentiment intime de soi, celui d’autrui dans nos relations et, plus largement, à l’école, au travail et dans la société en général ? Ensuite, on peut parler de sexualité comme d’une activité qui engage le « sentiment de soi » dans une co-création de soi et de l’autre.

        Note 1 :La connaissance
        Une définition du Larousse philo :
        « croyance qui soit à la fois vraie et justifiée » Platon (Théétète)
        Entendre : la croyance est vraie par elle-même, comme une démonstration, en ce qu’elle est justifiée théoriquement (par des opérations de raisonnement). Question : de quelle manière cette croyance se rapporte-t-elle aux faits empiriques et sensibles ? Cela demande à être vérifié, ce qui invite à considérer qu’il y a des degrés de vérité ou de vraisemblance.

        Ici, une recherche étymologique croisée du français latin grec Sanskrit.
        La racine sanskrit « jna », dont est issu le mot « janati » donnera la racine proto indo européenne « gno » qui signifie « connaître » qui donnera le « gignosko » grec, puis le latin « gnosco » qui evoluera en « nosco » et donnera plus tard l’anglais « to know ».

        Le latin « nosco  » correspond à la forme archaïque de « gnosco », mot venant lui même du grec « gignosko » (« γιγνωσκω » [5]) qui signifie « apprendre à connaître », « se rendre compte ». De fait, la connaissance s’inscrit dans un processus, une dynamique du « prendre, apprendre » à établir des savoirs.

        Jean-François Bayard (cherheur, politologue-sociologue-historien à IHEID)
        J’ai été époustouflé par la synthèse de son travail. Il théorise la dynamique des Etats, dont il donne une définition : L’Etat est une mise en abstraction d’un réel hétérogène par :
        – le territoire, des frontières, le droit,
        – la création d’un peuple qui s’invente (se crée)
        – le marché, l’économie, des nombres,

        Et bien entendu, le tout est en conflit (chaque niveau et les niveaux entre eux), mais la manière de nommer les choses, et de concevoir les « concepts » (à la Deleuze) qui sont des événements (des dynamiques créées en situation) et non des « essences », changent totalement la façon de comprendre les guerres, les conflits. De fait, Jean-François Bayard illustre parfaitement que l’élaboration d’une connaissance, d’une manière de comprendre les choses, change totalement notre manière de l’appréhender.

        Voir ici, j’ai calé la vidéo où Jean-François Bayard en parle.
        Si vous souhaitez approfondir et comprendre la dynamique des conflits, j’ai pris davantage de notes ici dans mon forum.

        Ci-dessous, une autre conférence de Jean-François Bayard (Médecins Sans Frontières), qui illustre sa façon de concevoir la dynamique des Etats : L’illusion identitaire

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